Projet de loi de santé : le Sénat joue le jeu du gouvernement !

Paris, le mardi 29 septembre 2015 – Alors que les dernières heures de l’examen du projet de loi de santé au Sénat le 18 septembre (avant une interruption pour les journées parlementaires) avaient confirmé de manière éclatante les divergences profondes entre les sénateurs de droite (majoritaires) et le gouvernement, la reprise des débats hier a été bien plus consensuelle.

IVG médicamenteuse par les sages-femmes: c'est oui

Les élus se sont d’abord penchés sur l’opportunité d’autoriser les sages femmes à réaliser des IVG médicamenteuses. Cette mesure est défendue par le gouvernement qui considère qu’elle permettra de résoudre certaines difficultés d’accès à l’IVG en France. Si certains médecins (sans unanimité) ont pu montrer une réelle réticence vis-à-vis d’une telle évolution (s’inquiétant de la prise en charge d’éventuelles complications), cette dernière a surtout soulevé des protestations éthiques. Certains ont redouté qu’elle ne favorise une "banalisation" de l’avortement. Dans les rangs des Républicains, les avis étaient très partagés. En commission des Affaires sociales, l’amendement gouvernemental introduisant cette possibilité avait ainsi été retoqué. Cependant, hier, en séance, il a finalement été réintroduit, et a été défendu par certains élus de droite. « Chaque année 6 000 femmes sont contraintes de se rendre à l’étranger car elles ne parviennent pas à trouver des solutions à proximité dans les délais légaux » a ainsi défendu Fabienne Keller avant d’ajouter que cette mesure permettra « d’améliorer l’accès des femmes à ce type d’IVG en France, à proximité de chez elles ». Ainsi, le soutien d’une partie des élus de droite et la présence de l’ensemble des élus de gauche ont abouti à l’adoption de la mesure et au rejet des amendements qui appelaient à réserver aux seuls médecins la pratique des IVG médicamenteuses.

Déclaration des liens d’intérêt : à la fac aussi !

Autre domaine, ce même lundi 28 septembre, où les voix de droite et de gauche se sont confondues : la question de la lutte contre les "conflits  d’intérêt". Ainsi, Claude Mahuret (LR) a défendu un texte que le gouvernement ne pouvait totalement renier (il s’en est d’ailleurs remis à la "sagesse" du Sénat) : il s’agissait de rendre obligatoire les déclarations des liens d’intérêt des professionnels de santé, y compris dans le cadre de leur charge d’enseignement (ce qui n’était pour l’heure pas expressément prévu par la loi). « Sont exclus du champ de la loi, les cours universitaires, les actions de formation continue, les livres d’enseignement ou de vulgarisations et les interventions sur internet » a énuméré l’élu de l’Allié. Or, ce dernier a jugé que la période des études médicales est souvent l’occasion de tisser des liens, potentiellement délétères, entre l’industrie et les professionnels de santé. Sa réflexion et son amendement ont été approuvés par ses collègues, de droite comme de gauche. « Les membres des professions médicales qui ont des liens avec des entreprises et établissements produisant ou exploitant des produits de santé ou des organismes de conseil intervenant sur ces produits sont tenus de les faire connaître lorsqu'ils s'expriment sur de tels produits lors d’un enseignement universitaire, d'une action de formation continue, d'éducation thérapeutique, dans un livre ou sur internet » dispose ainsi le texte, dont on ne sait s’il sera retenu dans la version définitive de la loi.

Quand tous les amendements du gouvernement passent presque sans discussion

Enfin, différents amendements présentés par le gouvernement ont été adoptés sans mal par le Sénat. Il s’agissait tout d’abord d’améliorer l’accompagnement des personnes handicapées, afin de limiter le risque de ruptures de parcours. Si l’intention est louable, le rôle conféré aux maisons départementales du handicap, souvent contestées par les associations de patients, risque de faire grincer. Bien moins controversées, sont les mesures unanimement adoptées, visant à élargir le champ d’intervention des orthoptistes, afin de résorber en partie les problèmes d’accès aux ophtalmologistes. Enfin, un amendement encore une fois présenté par le gouvernement destiné à augmenter le nombre de logements mis à la disposition des personnels de l’Assistance publique des hôpitaux de Paris (AP-HP), des Hospices civils de Lyon et de l’Assistance publique Hôpitaux de Marseille a été adopté sans difficultés. Si ces différents exemples, témoignent, à l’inverse de certaines discussions précédentes, que les dissensions partisanes habituelles peuvent parfois laisser place à un dialogue plus constructif, cette entente inattendue pourrait cependant surprendre voire affecter certains responsables des syndicats médicaux.

Aurélie Haroche

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions

Soyez le premier à réagir !

Les réactions aux articles sont réservées aux professionnels de santé inscrits
Elles ne seront publiées sur le site qu’après modération par la rédaction (avec un délai de quelques heures à 48 heures). Sauf exception, les réactions sont publiées avec la signature de leur auteur.

Réagir à cet article