Parents opposés à la vaccination obligatoire : vers une issue judiciaire ?

Propagande anti-vaccin de l'époque victorienne

Auxerre, le mardi 15 décembre 2015 – Marc et Samia Larère connaissent désormais bien les travées du tribunal correctionnel d’Auxerre. Hier, ils s’y rendaient pour la quatrième fois en un peu plus d’un an. La première convocation de ces parents d’aujourd’hui trois enfants qui refusent de se soumettre à l’obligation de les vacciner contre la poliomyélite, la diphtérie et le tétanos remonte à octobre 2014. La famille comparaissait pour « soustraction par un parent à ses obligations légales compromettant la santé (…) de son enfant » et encourrait jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. La situation vaccinale de leur fille aînée avait en effet été signalée par un médecin hospitalier au procureur de la République. Devant le tribunal correctionnel d’Auxerre, les époux Larère ont justifié leur refus de l’obligation vaccinale par l’indisponibilité d’un vaccin trivalent et qui plus est d’un vaccin protégeant contre ces trois maladies dépourvu d’adjuvant. Nonobstant le fait que la dangerosité des adjuvants aluminiques contenus dans les vaccins n’a jamais été mise en évidence, il demeure possible dans certaines conditions de se procurer un kit vaccinal permettant uniquement la protection contre la diphtérie, la poliomyélite et le tétanos. Par ailleurs, témoignant que leur opposition n’est pas uniquement associée à des considérations pratiques, les parents ont déposé devant le Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité, afin de l’interroger sur la conformité de l’obligation vaccinale à la Constitution. En mars, le Conseil constitutionnel fit connaître sa réponse et réaffirma que l’obligation vaccinale ne pouvait être jugée contraire à la Constitution, notamment parce qu’elle répond à des enjeux de santé publique.

Une pénurie contre-productive

Ce rejet entraîna le retour des époux Larère devant le tribunal correctionnel le 21 septembre, audition à l’issue de laquelle quatre mois de prison avec sursis et 500 euros d’amende étaient requis par le Procureur de la République. Mais coup de théâtre le 29 octobre, qui devait voir présenter le jugement, le tribunal estima que devait être examinée une éventuelle requalification des faits. Plutôt qu’une soustraction à leurs obligations légales, les parents n’auraient plus à répondre que d’une infraction au Code de santé publique et encouraient alors une peine maximum de six mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende pour refus ou entrave à la vaccination. Une nouvelle audience était donc conduite hier pour examiner cette requalification, qui a la faveur du parquet, qui désormais requiert une peine de trois mois de prison avec sursis. Si cette préconisation est suivie par le tribunal (qui rendra son jugement le 7 janvier), les époux Larère et leur avocat y verront une victoire comme le suggèrent de précédentes déclarations, d’autant plus qu’ils estiment que cette infraction pourrait être considérée comme prescrite. On le devine, il est probable que ces affrontements judiciaires ne cessent pas avec le délibéré du 7 janvier prochain, tant la détermination de ces parents à refuser toute condamnation pour leur refus de vaccination apparaît forte. Cette affaire illustre la nécessité d’une clarification et d’une adaptation de la situation actuelle des stocks de vaccins avec les obligations édictées, afin que l’absence de vaccin trivalent et la « pénurie » de quadrivalents ne servent pas d’argumentation à des groupes anti vaccins dangereux. Aujourd’hui, les filles de Marc et Samia Larère ne sont toujours pas vaccinées et leur entrée à l’école demeure impossible.

Léa Crébat

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Vos réactions (1)

  • Et pendant ce temps-là...

    Le 15 décembre 2015

    Un enfant espagnol mort de diphtérie, un autre, français, atteint de tétanos cet été.
    La coercition n'est pas une solution, alors que faire ? Se battre pour les vaccins obligatoires alors que les recommandés sont tout aussi utiles en France ? Le vaccin trivalent risque de ne pas être fabriqué de nouveau car ce qui est recommandé c'est au moins le pentavallent (dTPCoqHaemophilus) pour ceux qui continuent à avoir peur du vaccin hépatite B.
    Il faut être sacrément mal informé (par les médecins y compris ?) pour refuser de protéger son enfant contre la terrible épiglottite, la méningite à haemophilus ou la coqueluche (qui vient de tuer un nourrisson en Espagne).
    De nombreux médecins responsables de collectivité d'enfant s'interrogent : hors obligation scolaire, doit-on accepter tout de même les enfants pas ou mal vaccinés ?

    Dr Blandine Courtot

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