Etudes sur la chirurgie bariatrique, trop de perdus de vue

La qualité du suivi des patients inclus dans une étude garantit la crédibilité des résultats annoncés. Par exemple, une faille dans le « double aveugle » ou un excès de patients perdus de vue (PPDV) traduit un essai médiocre. En particulier, un taux de PPDV > 20 % à n’importe quelle étape du suivi compromet la validité d’une étude. Les barrières qui poussent un malade à ne pas honorer ses consultations postopératoires sont multiples : financières, linguistiques, il peut aussi invoquer l’éloignement, la perte de temps lié à un rendez-vous avec longue attente, la mauvaise communication, voire un certain ressentiment envers l’équipe soignante. Cette critique est particulièrement adaptée à la chirurgie bariatrique, empêchant de tirer des conclusions valables de nombreuses études.

Un suivi correct dans moins de la moitié des études

Des auteurs canadiens ont étudié la littérature sur la chirurgie bariatrique (court-circuit gastrique)  chez l’adulte, publiée en langue anglaise, entre 2007 et 2012, en éliminant les travaux ne mentionnant pas la perte de poids ou la durée du suivi. Sur les 695 articles examinés, ils en ont retenu 99 répondant aux critères de sélection, dont 11 essais cliniques randomisés, 42 études cas-témoins, 39 études de cohortes, etc. Le nombre total d’opérés avoisinait 250 000 avec un suivi moyen de 2 ans et demi. A 12 mois et à la fin de l’étude, seuls 41  et 40 articles (41 et 40,4 %) faisaient état d’un suivi satisfaisant avec, à ces 2 étapes, respectivement 19 et 31 % PPDV. La courte durée de l’étude et sa localisation aux États-Unis se sont avérées des facteurs prédictifs de qualité (moins de PPDV). En revanche, la notoriété du journal de publication, le caractère uni ou multicentrique de l’étude, le type d’étude (cohorte ou essai randomisé) n’ont eu aucun impact sur le taux de PPDV.

En conclusion, seules 40 % des études analysant les résultats du court circuit gastrique sur la perte de poids ont un taux de suivis correct, et 30 % des opérés sont perdus de vue à la fin de l’étude. Ce défaut leur enlève toute autorité pour l’évaluation de l’intervention. Il faut recommander les études brèves qui sont les plus à portée de suivre leurs malades jusqu’à la fin.

Dr Jean-Fred Warlin

Références
Switzer NJ et coll. Quality of follow-up.
Systematic review of the research in bariatric surgery.
Ann Surgery 2016; 263: 875-880

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Vos réactions (1)

  • Problème de prises en charge financière

    Le 25 juillet 2016

    Si les patients ayant subi un by-pass avait un suivi dans le centre où ils ont été opérés, que les consultations soient totalement prises en charge par la sécu et que les suppléments vitaminiques soient remboursés à 100 %, on aurait un suivi correct des patients. On éviterait de nombreuses complications (anémie de Biermer) par exemple) qui, au total reviennent certainement plus cher que les consultations et les suppléments vitaminiques.

    Le service spécialisé de la clinique Sainte Elisabeth à Namur qui emploie trois chirurgiens temps-plein uniquement pour les by-pass ou les sleeves, agit ainsi avec les patients qui ont un programme régulier de consultations.

    Mais qui s'intéresse à ce problème au Ministère de la Santé ou à la sécu ? Personne !

    Dr Guy Roche

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