
Paris, le lundi 5 septembre 2016 – Le ministre de la Santé était hier l’invitée du Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI. En cette rentrée d’année électorale, alors que le secteur de la santé est l’un de ceux où la déception et l’amertume vis-à-vis de François Hollande et de son équipe sont les plus vives, Marisol Touraine était très attendue. En dépit de plusieurs signaux inquiétants, elle ne s’est pas départie d’un discours auto-satisfait.
Traitement efficace pour la Sécurité sociale et minimisation de certains effets secondaires
Revenant sur un des débats de l’été, alors que différentes enquêtes ont mis à jour une augmentation du reste à charge sous l’effet de la réforme du contrat responsable des mutuelles, qui restreint le remboursement des dépassements d’honoraires, notamment quand les praticiens ne sont pas adhérents du contrat d’accès aux soins, le ministre de la Santé a campé sur ses positions. « Ce que les Français sortent de leur proche diminue » a martelé Marisol Touraine, refusant d’entrer dans le détail des évolutions constatées récemment et avant une nouvelle fois de se féliciter de ses succès face aux dépassements d’honoraires. D’une manière générale, le ministre juge que son équipe a relevé le défi de la maîtrise des dépenses de santé. Les résultats des comptes de la Sécurité sociale pour l’année 2016 pourraient en effet être « encore meilleurs que ce qu’on avait envisagé en juin », a-t-elle assuré. « L'horizon du rétablissement complet de la sécu, de l'équilibre des comptes de la sécu, ce n'est plus une utopie, il est à portée de main (...) pas pour 2016 mais très vite » a-t-elle encore ajouté.
Des médecins en voie de guérison à leur insu
Si tout va bien du côté des chiffres de la Sécurité sociale, difficile de soutenir qu’il en est de même en ce qui concerne le rapport avec les professionnels de santé. Chez les libéraux, bien qu’une majorité de leurs représentants aient signé la nouvelle convention, on ne cesse ainsi de rappeler son hostilité à la loi de santé et au tiers payant. La confiance de Marisol Touraine qui est le plus mal aimé des ministres de la santé de la cinquième République n’en est guère ébranlée. « Mois après mois, le nombre d'actes réalisés en tiers payant augmente » a-t-elle ainsi voulu avancer pour démontrer que l’opposition des professionnels de santé et notamment des médecins ne serait que temporaire. Elle a ainsi donné l’exemple des dentistes dont désormais 60 % des actes seraient en tiers payant contre 30 % au début de l’année.
Suicide d’infirmiers : protocole thérapeutique à l’étude
Difficile cependant de totalement nier le malaise des blouses blanches, quand plusieurs d’entre elles ont mis fin à leur jour ces derniers mois. Chez les infirmières, notamment, le malaise semble connaître un point culminant avec cinq suicides cet été. Le silence public de Marisol Touraine sur ces drames a été fortement dénoncé par la communauté infirmière, jusque dans une lettre adressée ce vendredi à François Hollande par la Coordination nationale infirmière (CNI). Pressée par les journalistes, Marisol Touraine est enfin sortie de son silence. « Que des hommes et des femmes qui doivent soigner et sauver des vies portent atteinte à leur vie, c'est évidemment extrêmement préoccupant » a observé le ministre affirmant ne « pas banaliser » ces suicides. Après avoir rappelé que la lutte contre les risques psychosociaux dans les établissements de santé avait déjà été entamée, elle a annoncé la présentation d’un nouveau plan à l’automne.
Indemnisation des victimes de la Dépakine : pas de traitement de choc
Enfin, parmi les sujets brûlants de la rentrée, outre la suspension de la production du lactarium d’Ile de France après la contamination de trois nourrissons par une même bactérie dans deux hôpitaux différents, l’indemnisation des patients exposés au valproate de sodium in utero a été évoquée. Le ministre a promis : « Il faut que les victimes soient indemnisées rapidement et simplement. On ne va pas chipoter ». Concernant les critères requis pour bénéficier de cette indemnisation, elle a indiqué attendre les conclusions de deux magistrats, qui devront notamment déterminer « la date à partir de laquelle les données scientifiques étaient bien connues ». Reconnaissant la responsabilité de l’état dans cette affaire, elle n’exclut cependant pas de se retourner, le cas échéant, vers le laboratoire concerné. Elle a cependant écarté l’idée d’une taxe imposée sur les médicaments pour alimenter un fonds dédié aux victimes de la Dépakine ou plus largement aux victimes d’effets secondaires graves de médicaments. « Je suis pour que ceux qui sont responsables paient et pas pour que tout le monde mette au pot » a répondu le ministre de la Santé.
Aurélie Haroche