
Houston, le samedi 5 novembre 2016 – Régulièrement encouragée politiquement, comme l’a encore illustré le discours de Barack Obama sur le sujet le 12 octobre dernier, la NASA prépare une expédition d’astronautes sur Mars. Le voyage, d’une durée minimum de 18 mois pourrait être réalisé à l’horizon 2030. Cependant, outre les multiples défis techniques soulevés par un tel périple, les interrogations concernant les conséquences néfastes d’une aventure de ce type sur la santé des astronautes sont nombreuses. Il y a deux ans, l’Institute of Medicine (IOM) se montrait sévère sur les dangers encourus et observait que les « missions sur Mars exposeraient probablement les membres d’équipage à des niveaux de risque (…) allant au-delà de ceux autorisés par les critères actuels en matière de santé, ainsi qu’à une série de risques encore mal définis, incertains, voire imprévisibles ».
La tête dans les nuages
Au cours des deux dernières années, ce sombre diagnostic ne paraît pas pouvoir être démenti. Ainsi, les conséquences potentielles des voyages vers Mars sur le cerveau paraissent être confirmées. Trois ans après des premiers résultats publiés dans la revue Plos One reposant sur des rongeurs, une équipe de chercheurs de Californie soulignent à nouveau dans Science Reports les possibles effets dommageables des rayons cosmiques sur les capacités cognitives. Grâce à l’utilisation des noyaux atomiques d’oxygène et de titane de la NASA, ils ont pu exposer des souris et des rats à des rayons cosmiques. Un tel traitement a considérablement affecté les performances des rongeurs à différents tests de mémoire, tandis qu’ils semblaient être marqués par une anxiété accrue, par rapport aux animaux témoins. D’un point de vue physiologique, les dégâts étaient également notables : réduction de la complexité des dendrites et neuro-inflammation ont été notamment constatées, comme le relève le journaliste du Monde, Pierre Barthélémy sur son blog Passeur de Sciences. Si l’extrapolation directe de ces résultats à l’homme est délicate et si les conditions d’irradiation du cerveau des astronautes seraient quelque peu différentes de ce protocole expérimental, les résultats confortent les inquiétudes nourries par de nombreux spécialistes. Outre la dégradation de l’état des astronautes lors de leur retour sur Terre, ces expositions pourraient même compromettre le déroulement de la mission si les capacités cognitives de l’équipage étaient trop affectées…
Plein le dos
Il n’est pas que le cerveau qui serait mis à rude épreuve. Dans la revue Spine, des chercheurs de la Nasa se sont pour leur part intéressés aux effets des voyages spatiaux sur les vertèbres en étudiant six astronautes au cours d’une mission dans la Station spatiale internationale et à leur retour. Leurs observations mettent en évidence une atrophie des muscles paravertébraux, trop peu utilisés, durant le vol, une atrophie pas toujours totalement résorbée plusieurs mois après le retour sur Terre. Plus facilement évitables que les conséquences neurologiques, ces effets ne sont cependant pas négligeables, car là encore, ils peuvent compromettre la réussite de la mission. L’atrophie des muscles paravertébraux pourrait en effet exposer les astronautes à un risque accru de chute. Or « si vous cous cassez une hanche sur Mars, en fait vous êtes mort » remarque dans The Guardian le chercheur en astrobiologie, Lewis Dartnell. Dans l’espace, personne ne vous entend crier.
Aurélie Haroche