Accorder un congé menstruel : bonne ou mauvaise idée?

Rome, le mercredi 29 mars 2017 - La prévalence des dysménorrhées est difficile à évaluer : de très importantes variations sont retrouvées dans les études consacrées à ce sujet ne serait-ce qu'en raison des définitions différentes utilisées.  Cependant, il est avéré que l'intensité des douleurs ressenties par certaines femmes durant leurs règles peut se révéler invalidante. Néanmoins, faute de pouvoir consulter systématiquement un médecin afin de bénéficier d'un arrêt de travail, un grand nombre de femmes qui en sont atteintes n'interrompent pas leurs activités. Conscients de cette situation, plusieurs pays ont adopté des législations offrant aux femmes la possibilité de prendre un congé menstruel, d'un ou deux jours par mois. Le Japon a fait figure de pionnier en la matière en inscrivant ce dispositif dans son arsenal législatif en 1947. Les modalités sont très diverses en fonction des pays en ce qui concerne notamment l'indemnisation de ce congés ou encore la façon de "prouver" l'importance de sa dysménorrhée.

Ambivalence

En Italie quatre députés femmes ont récemment déposé un projet de loi destiné à créer un congé menstruel intégralement payé. Pour pouvoir y prétendre, les femmes devront présenter un certificat médical confirmant l’existence d’une dysménorrhée importante ; certificat qui devra être renouvelé chaque année. Sans surprise, la présentation de cette proposition n’est pas passée inaperçue. Outre les railleries peu subtiles tendant à minimiser le caractère potentiellement invalidant des symptômes associés aux règles, les féministes  s’opposent quant à la pertinence d’un tel projet.

Certains, comme dans les colonnes de la version italienne de Marie-Claire se félicitent d’une mesure qui représenterait un véritable progrès social et offrirait enfin une visibilité à un phénomène souvent tabou. Mais d’autres observateurs redoutent les effets contre-productifs d’une telle mesure : les employeurs ne seront-ils pas encore plus dissuadés d’embaucher des femmes, redoutant de devoir se passer de leur nouvelle recrue une à deux journées par mois ? La question est d’autant plus prégnante en Italie où le taux d’emploi des femmes est un des plus bas d’Europe (61 % des femmes travaillent en Italie, contre 72 % dans l’ensemble de l’Europe). D’autres encore craignent qu’un congé menstruel ne renforce les a priori concernant les règles et favorise l’idée d’une infériorité physique des femmes, en particulier face à la douleur. Aujourd’hui, dans les pays où il est mis en place, le congé menstruel est peu utilisé, en raison en particulier des réticences des femmes à aborder le sujet avec leurs supérieurs… souvent masculins !

Avant de penser au congé menstruel…

Au-delà de ces débats et réflexions, le fait de s’interroger sur la pertinence d’un congé menstruel témoigne d’une évolution des esprits, alors que les règles constituent encore dans de nombreuses régions du monde un tabou, voire même un motif d’exclusion des femmes. Dans certaines régions du monde nombre de jeunes filles ne peuvent ainsi fréquenter l’école lorsqu’elles ont leurs règles, tandis que diverses  injonctions frappent les femmes pendant leurs menstruations. Par ailleurs, l’accès à des protections périodiques hygiéniques est très inégal. Quand dans les pays occidentaux, les interrogations se concentrent sur la composition des tampons ou sur leur taux de TVA, dans de très nombreux autres états, ils demeurent un rêve difficilement accessible.

Aurélie Haroche

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