Où l'on alimente le débat sur les effets de la charcuterie dans l'asthme

La viande transformée, notamment la charcuterie, a récemment été classée comme probable  facteur cancérigène par l’Organisation Mondiale de la Santé, possiblement à cause de la présence de sels de nitrites. Il semble également qu’une consommation  élevée de viandes transformées puisse influencer l’évolution d’autres affections chroniques. Dans ce domaine, où les normes et les habitudes alimentaires font que les résultats sont difficilement transposables d’un pays à un autre, les conclusions d’une étude réalisée en France sur les liens ente régime alimentaire et asthme sont intéressantes.

Les auteurs ont enquêté sur l'association entre consommation de viande transformée et aggravation de l'asthme chez les adultes en utilisant les données de la cohorte EGEA, une étude longitudinale et prospective sur la génétique et l’environnement de patients asthmatiques et atopiques (constitution du groupe entre 2003 et 2007 et suivi entre 2011 et 2013). Un questionnaire de fréquence alimentaire de 118 items (validé en français) a été utilisé pour déterminer le profil alimentaire moyen au cours des 12 mois précédents. Les 118 produits sont répartis en 46 groupes d'aliments et une consommation moyenne est calculée pour chaque groupe. Le groupe de la viande transformée comprenait 3 articles: jambon (2 tranches / portion), saucisse (1 / portion) et saucisson (2 tranches / portion).  Selon les réponses, l'exposition a été catégorisée en trois classes: < 1 portion / semaine (exposition faible, 19 % des participants), de 1 à 3,9 portions /semaine (exposition moyenne, 48 %) et  plus de 4 portions / semaine (exposition élevée, 33 % de l’ensemble). Le groupe ayant le plus faible apport est considéré comme «non exposé» et pris comme groupe de référence.

Pour tenir compte de l'effet global du reste de l'alimentation, les analyses ont été ajustées selon deux modèles alimentaires préétablis : un modèle prudent caractérisé par une forte consommation de légumes, de fruits, d'huiles, de céréales complètes et de poisson et  un modèle occidental marqué par une forte consommation de produits tout préparés, de frites, condiments, alcool, bière / cidre, sandwichs et pommes de terre.

Effet positif de la consommation de charcuterie sur l’aggravation des symptômes d'asthme

Parmi les 971 participants (âge moyen 43 ans ; 49 % d'hommes; 42 % d’asthmatiques), 20 % ont constaté une aggravation des symptômes d'asthme pendant le suivi moyen de 7 ans. Après ajustements pour l'âge, le sexe, le tabagisme, le niveau d'éducation et d’activité physique,  on observe un effet direct positif de la consommation de viande transformée sur l’aggravation des symptômes d'asthme avec un Odds Ratio (OR) de 1,76 (Intervalle de Confiance à  95 % [IC 95 %] de 1,01 à 3,06) entre les expositions élevées par rapport aux faibles consommateurs. L’effet indirect médié par l’IMC (OR de 1,07; IC 95 % de 1,01 à 1,14), représente14 % de l'effet total.

Une consommation plus élevée de viande transformée apparaît donc associée à une aggravation des symptômes de l'asthme au fil du temps chez l’adulte, résultats expliqués pour une faible part par la surcharge pondérale. Cette approche associant habitudes alimentaires et contrôle de l’asthme est troublante et risque de nourrir la polémique ...

Dr Béatrice Jourdain

Références
Li Z et coll. : Cured meat intake is associated with worsening asthma symptoms.
Thorax 2017;72:206–212. doi:10.1136/thoraxjnl-2016-208375

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