
Paris, le mardi 26 septembre 2017 – L’association Ensemble contre la myofasciite à macrophages (E3M) organisation ouvertement convaincue de l’existence d’un lien (pourtant non démontré) entre le développement de différents troubles et l’exposition à l’aluminium contenu dans les vaccins, a rassemblé un groupe de professionnels de santé acquis à sa cause.
Quelques 130 médecins, infirmiers, sages-femmes viennent ainsi de signer un appel à la désobéissance alors que le gouvernement s’apprête à rendre obligatoire la vaccination contre onze maladies ou groupes de maladies. « Nous appelons chaque professionnel de santé à refuser de promouvoir l’extension de l’obligation vaccinale si celle-ci devait être mise en œuvre » écrivent les praticiens. Si ces derniers assurent qu’ils sont parfaitement convaincus des bénéfices de la vaccination, ils n’hésitent pourtant pas à citer la pétition de l’Institut pour la protection de la santé naturelle (IPSN) et du professeur Joyeux comme argument d’autorité, et font surtout leur les théories concernant la dangerosité supposée de l’adjuvant aluminique.
Un pseudo scandale
La popularité de ces dernières a été ravivée par la révélation au grand public d’un avis du comité scientifique de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) concernant les derniers travaux réalisés par une équipe de l’hôpital Henri Mondor, dirigée par le professeur Gherardi, sur ce sujet. Nous l’avions évoqué dans ces colonnes : la presse a eu tôt fait de voir un scandale dans l’absence de publication du document et dans ses apparentes conclusions non suivies d’effet. Les experts de l'ANSM estimaient en effet nécessaire de poursuivre les travaux, ce qui n’a pourtant pas permis à l’équipe, six mois plus tard, de recevoir les fonds attendus.
Des failles multiples
La mise au point réalisée par l’ANSM dans les heures qui ont suivi l’article initial du Parisien a permis de confirmer que le scandale n’en était pas un. D’abord, l’agence a rappelé qu’il n’existait pas de « rapport », encore moins secret, de l’ANSM sur les études scientifiques du professeur Gherardi : les avis du comité scientifique n’ont pas vocation à être publiés. Mais pour faire œuvre de transparence, l’ANSM a pour une fois accepté de faire une exception. Ces documents confirment ainsi des discussions multiples entreses experts vis-à-vis des résultats présentés et mettent en évidence des failles multiples dans ces derniers. Petitesse des échantillons de souris, utilisation d’espèces de souris différentes, complexe injecté aux souris apparemment différent de l’aluminium vaccinal, dose nettement supérieure à celle contenue dans les vaccins et difficulté d’extrapoler les résultats obtenus (surtout dans ces conditions) chez l’animal à l’homme font partie des différents points qui ont pu faire tiquer les l'ANSM. Par ailleurs, si l’agence a bien signalé que ces travaux devraient être poursuivis et a effectivement appelé la puissance publique à prendre ses responsabilités, elle ne dispose nullement pour sa part des moyens nécessaires pour satisfaire l’équipe du professeur Gherardi. Surtout « Ce sont des recherches très fondamentales et isolées qui, si elles soulèvent des interrogations et invitent à continuer, ne remettent absolument pas en cause le rapport bénéfice/risque des adjuvants aluminiques », insiste le patron de l’ANSM, Dominique Martin, dans les colonnes du Figaro.
Les hésitants vont-ils devenir des opposants sous le poids de l’obligation ?
Pourtant, dans l’opinion publique, ces nouveaux rebondissements ont probablement contribué à alimenter la défiance. Cette défiance, on le voit, n’est pas absente chez les professionnels de santé. Outre les praticiens proches d’E3M, plusieurs enquêtes ont mis en évidence le renforcement de certaines réticences chez les praticiens. Ainsi, une étude conduite par l’INSERM publiée en juillet 2015 avait révélé qu’un généraliste sur deux considérerait que les jeunes enfants sont vaccinés contre un trop grand nombre de maladies. Concernant plus particulièrement les adjuvants, 32,8 % jugeaient qu’ils sont susceptibles d’entraîner des complications à long terme. Qu’ils soient acquis à l’idée d’une dangerosité ou pas, les praticiens sont d’une manière générale nombreux à se sentir démunis face à ces adjuvants : une enquête parue dans la revue EBioMedecine en 2015 avait indiqué que seuls 43 % des praticiens s’estimaient capables de justifier l’utilisation des adjuvants. Enfin, bien que défendue par l’association E3M l’idée selon laquelle l’obligation vaccinale risque de transformer les « hésitants en opposants » à la vaccination est partagée par d’autres observateurs, pourtant très éloignés des groupes pourfendant (en dépit des apparences qu’ils veulent bien se donner) la vaccination.
Aurélie Haroche