Qui a affirmé aux lanceurs de l’appel des 1 000 : « Si j’étais encore hospitalière, j’aurais probablement signé » ?

Paris, le lundi 5 mars 2018 – Les attentes des professionnels de santé, tant dans le monde libéral qu’à l’hôpital, ont rarement été aussi intenses. Mais si elles sont aujourd’hui très aiguisées, ne sont pas neuves. La différence, cependant, avec la mandature précédente, c’est, en dépit de quelques inquiétudes, l’espoir fondé dans le ministre de la Santé, dont la capacité d’écoute est sans commune mesure avec celle de l’équipe qui l’a précédée.

Convergence parfaite

Cette disposition s’est une nouvelle fois illustrée la semaine dernière à l’occasion de la rencontre entre Agnès Buzyn et une délégation de l’appel des 1 000. Au mois de janvier, plus d’un millier de professionnels de santé hospitaliers lançaient en effet un appel pour dénoncer la situation inquiétante des établissements hospitaliers et réclamer une réforme efficace et rapide. Cette démarche avait notamment été initiée par le professeur André Grimaldi (Pitié Salpêtrière) et se révélait relativement inédite en raison de la diversité des professions et des horizons des signataires. La semaine dernière, le ministre de la Santé a reçu plusieurs initiateurs de cette lettre ouverte, dont, outre le professeur Grimaldi, Ludovic Billard (cadre supérieur de santé, Nantes), Laurence Bouillet (PUPH, CME de Grenoble), Claire Delage (cadre santé, Bichat), Anne Gervais (PH, CME de l’AP-HP), Gisèle Hoarau (cadre, Salpêtrière) et Jean-François Pinel (PH, CME de Rennes). A plusieurs reprises, le ministre de la Santé a voulu affirmer sa proximité avec les signataires de l’appel. Elle a ainsi affirmé : « Si j’étais encore une hospitalière, j’aurais probablement signé l’appel des 1 000 ». Les membres de la délégation n’ont visiblement pas douté de la sincérité d’Agnès Buzyn, constatant : « Entre la ministre et nous, le diagnostic sur le mal dont souffrent les hôpitaux est partagé », notamment en ce qui concerne « la logique commerciale et le management par le chiffre, conséquences du "tout-T2A" ». Par ailleurs, alors que le ministre leur exposait que selon elle une réforme ne pouvait se concevoir sans envisager l’ensemble des aspects du fonctionnement hospitalier, les lanceurs de l’appel observent : « On ne peut qu’être d’accord avec la vision qu’elle a exprimée et avec les valeurs qu’elle a réaffirmées ».

Faire vite et bien

S’ils paraissent donc convaincus que le ministre de la Santé peut être une interlocutrice privilégiée, les signataires se montrent cependant vigilants, notamment en ce qui concerne le planning de mise en œuvre de la réforme. « Pendant ce temps, les tarifs baissent, les soignants, médicaux et paramédicaux, les secrétaires se démobilisent ou partent », écrivent ainsi ceux qui espèrent voir les choses évoluer rapidement et qui ne semblent pas se satisfaire de l’annonce faite vendredi d’une restitution des sommes conservées à titre de provision. Outre la rapidité de la mise en œuvre de la réforme, les praticiens hospitaliers se montrent également très attentifs quant à ses modalités. « Le 50 % maximum de T2A promis par le président de la République ne doit pas consister à mélanger pour chaque activité une moitié de T2A et une moitié de paiement à autre chose – la qualité, la pertinence, le "parcours", la baisse des taux de ré-hospitalisation, etc… - mais à ne garder le paiement au séjour ou mieux le paiement à la période de soin que pour les activités standardisées programmées ».

Disparition des pôles et réinvestissement des équipes

Au-delà de ces mots d’ordre généraux, les praticiens ont détaillé un plan de « douze mesures ». Il s’agit notamment de mettre en place de « nouveaux modes de financement » dès janvier 2019 et de reconstituer des « équipes de soins stables dirigées par un binôme cadre de santé/médecin ». Sur ce point, comme sur les autres, les praticiens semblent avoir rencontré l’écho du ministre, qui a « insisté à plusieurs reprises sur la nécessité de réhabiliter la notion d’équipe travaillant dans les services qu’on a voulu faire disparaître » relèvent les membres de la délégation. L’appel des 1 000 souhaite également une disparition des pôles « qui ne reposent pas sur un réel parcours de soin des patients » et un rééquilibrage de la gouvernance hospitalière entre les trois pouvoirs (soignants, gestionnaires et usagers, citent-ils). Leur plan s’intéresse également directement aux infirmiers avec d’une part l’attente de la « détermination pour chaque unité de soin (…) du nombre de soignants présents nécessaire pour assurer la sécurité et la qualité des soins » et d’autre part le souhait de « la généralisation aux différentes spécialités du statut d’infirmière clinicienne spécialisée ». L’appel des 1 000 évoque également comme mesures essentielles, la constitution d’équipes mobiles, la fin des fermetures systématiques de lit, l’utilisation de nouveaux critères pour le regroupement d’activités, le développement d’une « politique active de communication et d’action sur la pertinence » de certains actes (chirurgie, prescriptions de biologie et d’actes d’imagerie notamment), l’adoption d’un plan d’urgence pour la psychiatrie et l’amélioration de la communication avec la médecine de ville.

Des signaux pour attendre

N’ignorant pas que ces différentes mesures nécessitent un temps d’application important et une concertation et même si pour certaines des engagements ont déjà été pris, les signataires estiment que différents signaux envoyés par le gouvernement permettraient « aux hospitaliers de reprendre espoir ». Il s’agit de « l’annonce d’une concertation authentique avec les professionnels de santé » sur les modes de financement, la mise en œuvre d’une politique sur la pertinence des soins, la suppression des pôles sans motivation clinique, l’expérimentation dès 2019 des nouveaux modes de financement et le gel de la suppression des postes.

Des vrais états généraux

Alors que revigorés par l’accueil du ministre, les 1 000 délivrent donc de nouveaux messages, leur mobilisation a également inspiré d’autres mouvements. Ainsi, un « appel citoyen » vient d’être lancé en faveur de la constitution d’ « états généraux de la santé », sans qu’il s’agisse cependant, précise le texte, d’une énième concertation habillée de ce terme devenu « passe partout », mais d’un véritable rendez-vous avec le peuple afin qu’il se « réapproprie la souveraineté ».

Plus que jamais, le monde du soin est en marche !

Aurélie Haroche

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