
Face à ces observations équivoques, beaucoup s’interrogeaient sur les conséquences de l’extension de l’obligation vaccinale sur la confiance globale des Français que l’on savait chancelante et particulièrement basse par rapport à de nombreux autres pays (même occidentaux).
Une augmentation de 14 points en deux ans
Les résultats du sondage conduit par l’IPSOS pour le LEEM (syndicat de l’industrie pharmaceutique) apparaissent rassurants et même encourageants (même si toute enquête souffre de biais et si des confirmations demeurent nécessaires). Aujourd’hui 83 % des Français se déclarent favorables à la vaccination pour eux et leurs proches dont 34 % assurent même y être « tout à fait favorables ». Ces proportions ont nettement progressé : seuls 69 % des Français s’affirmaient favorables à la vaccination en 2016. « La prise de parole forte des pouvoirs publics contribue à réduire l’inquiétude vis-à-vis des vaccins » s’est félicité le patron du LEEM Philippe Lamoureux.L’arme du fact-checking
Cette réplique des pouvoirs publics ne s’est pas uniquement manifestée par l’adoption, sans tergiversation, d’une mesure simple : l’extension vaccinale. Une forte présence sur les réseaux sociaux a également contribué à renverser certaines tendances. Une étude confiée à la société La Netscouade chargée d’analyser les conversations sur les vaccins sur les réseaux sociaux entre juin 2017 et juin 2018 a en effet mis en évidence : « la forte présence dans les discussions des ministères et des instituts de recherche ». Le rapport du LEEM à partir des constatations de La Nestscouade signale même que « sur Youtube, la lutte contre la désinformation a été exemplaire. Les contenus faux ont été majoritairement supprimés, afin de favoriser le fact-checking, à l’instar de la campagne menée par le Ministère des Solidarités et de la Santé avec des Youtubeurs scientifiques ». Cette résistance n’a pas été que le fait des acteurs institutionnels, on constate également sur « Twitter, les communautés de professionnels de santé et de médecins se sont mobilisées contre les argumentaires antivaccins. Le grand public a largement fustigé les positions antivaccins par le biais de l’humour et de la dérision », indique le LEEM. L’effet combiné et la réactivité des uns et des autres paraissent contribuer à apaiser le débat.Ainsi, les analyses de La Netscouade montrent qu’après une forte activité à la fin de 2017 autour de l’annonce de l’extension de l’obligation et de l’entrée en vigueur de cette dernière, on constate aujourd’hui « un retour à la normale des retombées et discussions autour de la vaccination ».
Des jeunes vulnérables aux fake news
Demeurent cependant quelques éléments préoccupants. D’abord, contre la plupart des maladies, la couverture vaccinale demeure insuffisante et fait le lit d’épidémies, comme on le constate actuellement avec la rougeole, dont la flambée n’est également peut-être pas totalement étrangère au regain de confiance dans la vaccination (on a ainsi observé une hausse des ventes de vaccin dans les régions les plus touchées). Par ailleurs, des leaders actifs continuent à sévir, tel le professeur Joyeux sur sa page Facebook. A cet égard : « La certification de sa page (…) renvoie une partie de la responsabilité de son audience à la plateforme Facebook, qui n’a pas lutté activement contre la désinformation » déplore le LEEM. Enfin, il apparaît que les jeunes demeurent toujours assez sensibles aux discours anti-vaccins. L’enquête de La Netscouade signale ainsi que « les e-parents constituent une population en plein doute, ciblée par la désinformation des antivaccins ».Par ailleurs, une récente enquête de la mutuelle étudiante la SMEREP met en évidence l’ambiguïté des étudiants et leur vulnérabilité aux fake news. Ainsi, alors que 92 % des jeunes gens interrogés se disent d’accord avec l’assertion selon laquelle : « la vaccination doit être obligatoire pour certaines pathologies », ils sont parallèlement 50 % à penser que certaines pathologies sont liées aux vaccins. La lutte sera donc encore longue et appliquer certaines des préconisations formulées par les experts du LEEM (dont l’implication plus grande de l’école) ne sera sans doute pas inutile.
Aurélie Haroche