
La mort subite du sportif est ressentie généralement comme
incompréhensible, car brutale et touchant des individus qui
semblent être en excellente santé. Une activité physique
d’intensité élevée et/ou prolongée peut en effet, de manière
paradoxale et transitoire, augmenter le risque d'événements
cardiaques et celui de mort subite.
D’autant que ce risque existe non seulement chez les athlètes
âgés ou ceux avec une anomalie cardiaque, mais également chez les
enfants ou les athlètes aguerris. Sous l’angle épidémiologique,
l’incidence absolue des accidents cardiovasculaires liés au sport
événementiel est de 6,5 pour 100 000 habitants par an, et chez les
jeunes athlètes de compétition de moins de 35 ans, l'incidence
absolue de décès d’origine cardiovasculaire lié au sport est de 1
pour 100 000 participants par an. L’ESC (Société européenne de
cardiologie) recommande un examen cardiaque systématique et un ECG
chez tout athlète de compétition. De plus, un test à l’effort est
indiqué chez les athlètes présentant des risques cardiovasculaires
tels qu’un âge supérieur à 40 ans, un tabagisme, une hypertension,
du diabète, une dyslipidémie ou encore des antécédents familiaux de
maladie coronarienne. Mais a-t-on conscience et connaît-on le
risque cardiovasculaire des sportifs amateurs ?
Afin d’évaluer les acquis sur les facteurs de risque et les
comportements à risque en relation avec des accidents cardiaques
induits par l'exercice, une étude a recueilli les résultats d’un
questionnaire administré à un large échantillon de 3 590 sportifs.
L’âge moyen est de 30,7 ± 16 ans, 71 % sont des hommes, 9,5 %
fument, et ils ont les facteurs de risque suivants : 5,5 % ont une
hypercholestérolémie, 4,4 % une hypertension et 0,9 % un diabète.
Chez les moins de 40 ans, seulement 64 % ont déjà eu un
électrocardiogramme de repos. Chez les plus de 40 ans, seulement 54
% ont déjà réalisé un test d’effort.
Pas suffisamment renseignés sur les risques liés au tabac, l’hyperthermie et les températures extérieures
Concernant les attitudes à risque autour de la pratique
sportive, 17 % de l’ensemble ne connaissent pas les dangers du
tabac relié à l’exercice, ni l’attitude adéquate à adopter, à
savoir ne pas fumer deux heures avant et après l'effort. Une grande
majorité (67 %) n’a jamais été informée du risque de pratiquer un
exercice en ayant de la fièvre, sachant que les infections
respiratoires et urinaires, avec l’inflammation et la libération
systémique de cytokines, sont associées à un risque transitoirement
accru d'événements coronaires. De même le taux d’atteinte
myocardique peut augmenter de 5 à 10 % lors d’une infection virale
bénigne, et il est recommandé de ne pas pratiquer de sport tant que
la fièvre persiste ainsi que les 8 jours suivants. Enfin, seulement
53 % et 68 % sont avertis des problèmes que peuvent poser une
température extérieure négative ou au contraire élevée. A plus de
21° C (et d’autant plus si la température est importante), la
fréquence cardiaque est significativement accrue, ce qui augmente
le stress cardiaque et la consommation d’oxygène ; inversement dans
ces conditions le débit cardiaque et la pression artérielle
diminuent, de même que les performances physiques. Une température
en deçà de 5 ° C peut abaisser le seuil ischémique en augmentant le
tonus sympathique, la résistance vasculaire périphérique, la
tension artérielle et la viscosité du sang, et peut entraîner un
risque accru d'infarctus du myocarde. De plus, l'air sec qui
accompagne fréquemment les basses températures entraîne une perte
d'eau et une hyperréactivité des voies respiratoires.
Enfin, la nécessité de signaler palpitations, malaise et
douleur thoracique à l’exercice est inconnue de 18 %, 7 % et 11 %
sur la population interrogée. Étonnamment les athlètes « de loisir
» (notamment ceux pratiquant moins de 9h/semaine) ont eu un taux de
réponses exactes supérieur à ceux des compétiteurs.
Bien qu’aucune étude n'ait validé ces règles de prévention
pour réduire le risque de mort cardiaque subite, et que les
éléments sélectionnés ne constituent pas une liste exhaustive, il
est probable qu’une meilleure information diminuerait les facteurs
de risque cardiaque des sportifs amateurs. Cette action simple de
prévention, complémentaire aux examens médicaux et
cardiovasculaires, pourrait être délivrée par les médecins en
abordant les 10 points du questionnaire lors d’une consultation
pour certificat d’aptitude au sport (tabac, fièvre, température
extérieure trop basse ou trop haute, dopage, échauffement,
hydratation, palpitations, vertiges, douleur à la poitrine).
Anne-Céline Rigaud