Autisme : Sophie Cluzel provoque l’ire de psychiatres

Paris, le lundi 8 avril 2019 – Sur RMC, le 1er avril, à la veille de la « journée mondiale de l’autisme », la secrétaire d’État aux Personnes handicapées, Sophie Cluzel s’est exprimée sur la question de la place de la psychiatrie dans la prise en charge des personnes souffrant d’autisme, un sujet très controversé depuis de nombreuses années.  
Elle a ainsi déclaré au micro de Jean-Jacques Bourdin : « avec notre plan, il s’agit de ne plus placer des enfants autistes devant des psychiatres (…) Face à un spectre de l’autisme très large, il faut que l’on arrête de parler de psychiatrie ». Elle a aussi pointé des « prises en charge inadéquates dans des hôpitaux psychiatriques où [les personnes autistes] n’ont rien à faire ».

Ces déclarations très tranchées ont vivement fait réagir les psychiatres.

Une attaque pour masquer les déceptions ?

Premier à monter au créneau, le Conseil national professionnel de psychiatrie qui rassemble une dizaine d’organisations professionnelles qui a intimé l’ordre à Sophie Cluzel « d’immédiatement retirer ses déclarations indignes ».

Aussi, le CNPP « condamne à l'unanimité et avec la plus grande fermeté les propos irresponsables et scandaleux de la secrétaire d'État (…) ces appréciations brutales découragent et affligent » les psychiatres sur lesquelles « un membre du gouvernement se permet de jeter l'opprobre » au lieu de « rester en cohérence avec la ministre de la Santé et le président de la République ». 

Le CNPP fait ainsi référence à la promesse présidentielle de « réinvestir » dans la psychiatrie, en particulier pour « redonner une perspective à la pédopsychiatrie ».

Plus mesuré, dans des propos rapportés par le journaliste de Libération Eric Favereau, le professeur Bernard Golse, patron de la pédopsychiatrie de l’hôpital Necker rappelle au secrétaire d’état « la psychiatrie n’est pas seulement la spécialité de la folie (…) C’est aussi le soin du lien et notamment le lien entre le patient et son environnement (…) ».

Enfin, Eric Favereau s’interroge faussement candide : « comment ne pas croire dès lors que ces propos de la secrétaire d’État visent d’abord à cacher les déceptions actuelles qui s’accumulent vis-à-vis des fortes promesses lancées ? Souvenez-vous, Emmanuel Macron avait fait de l’intégration des autistes une priorité de son quinquennat. Deux ans plus tard, cela traîne pour le moins, même si l’objectif était louable. Et comme toujours ce sont les mêmes qui restent à l’abandon, enfants autistes devenus objets récurrents de propos définitifs et lénifiants ».

Il est vrai que, sur cette question comme pour d’autres, l’enthousiasme soulevé par les premières déclarations du Président de la République et du ministre de la santé semble s’amenuiser au fil du quinquennat…

F.H.

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Vos réactions (2)

  • Mort programmée des psychiatres

    Le 09 avril 2019

    Il suffit de regarder les DPC. Ils ne laissent aux psychiatres que les prescriptions de neuroleptiques et "forment" en quelques heures les généralistes à la psychiatrie. IPA et psychologues feront le reste...

    Dr Isabelle Gautier

  • Les résultats dans notre pays sont désastreux.

    Le 09 avril 2019

    Madame Cluzel a raison.
    La France est le seul pays "moderne" au monde ou la prise en charge de l'autisme est sous la seule responsabilité des psychiatres.
    Je suis père d'un enfant autiste actuellement agé de 40 ans et connait parfaitement par mon expérience et celle des autres parents et le grand engagement de notre famille auprès de cette cause, par la connaissance de ce qui est fait dans les pays modernes (USA, Canada, Grande Bretagne et même Belgique - Theo Peters, Magerotte,...-)

    Je peux donc vous dire que les résultats dans notre pays sont désastreux. Cela coute très cher aux contribuables, la prise en charge est tellement insuffisante, que la Caisse rembourse des prises en charges à l'étranger dont le prix est exorbitant. Et les autistes pris en charge par la psychiatrie sans aucun effort de discernement sont sous camisole chimique (cf l'histoire de la soeur de Sandrine Bonaire), complètement décérébrés.

    Et cela représente une naissance sur mille.
    Ecoutez les autistes Asperger comme Josef Schovanec. Ils vous diront ce qu'ils vivent. Quel est leur handicap. Il n'est pas de nature psychiatrique.
    Par contre les autistes peuvent avoir besoin d'un psychiatre qui peut intervenir ponctuellement.
    Le problème n'est pas la psychiatrie, mais la psychiatrie en France qui a été complètement sous l'influence de l'école Lacanienne psychanalytique et de B Bettelheim.

    C'est aux psychiatres d'évoluer. Et la réaction de la fédération française de Psychiatrie montre bien qu'elle n'est pas prête à le faire.
    Cela aurait été tellement plus intelligent d'avouer les erreurs du passé et d'évoluer en travaillant avec les autres et surtout les familles ainsi que de lire ce qui s'écrit sur le sujet dans le monde entier et pas forcément en anglais!

    J'attends depuis 35 ans (date où mon épouse a été suspectée d'être responsable de l'autisme d'Aurélien mon fils par une psychiatre ayant pignon sur rue) les arguments des psychiatres Dinosaures.

    Il en existe des plus jeunes qui essaient de secouer le cocotier mais ils sont encore rejetés!

    Dr Jean-Luc V

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