Pollution atmosphérique : l’Etat fautif mais toujours pas responsable

Paris, le vendredi 5 juillet 2019 - Pour la deuxième fois en quelques semaines, la justice a reconnu une faute de l’État français dans la gestion des pics de pollution. Mais elle refuse cependant de reconnaitre la responsabilité de l’Etat dans les pathologies développées par les requérants, faute d’un lien de causalité suffisant.

La décision, qualifiée d’historique, du tribunal administratif de Montreuil du 25 juin dernier, reconnaissant la faute de l’État dans la gestion des pics de pollution atmosphérique, ne restera pas une décision isolée. Saisi par trois requérants souffrant de pathologies respiratoires supposément liées à la pollution atmosphérique, le tribunal administratif de Paris a également conclu ce jeudi à une « carence fautive » de l’État « pour réduire, le plus rapidement possible, les valeurs de dioxyde d’azote et de particules fines dans l’air ». En résumé, l’État n’a pas fait tout ce qui était en son pouvoir pour faire redescendre l’exposition aux polluants dans la région parisienne en dessous des seuils sanitaires.

« C’est une bonne nouvelle que la deuxième juridiction saisie retienne aussi la faute de l’État » a réagi Maitre François Lafforgue, également en charge du dossier jugé à Montreuil en juin dernier et dont le cabinet s’occupe déjà de 39 recours en lien avec la pollution atmosphérique. Il s’agit cependant d’une victoire en demi-teinte pour les plaignants, puisque le juge administratif a refusé de les indemniser. La faute de l’État ne suffit en effet pas à engager sa responsabilité, encore faut-il prouver le lien de causalité entre cette faute et les pathologies développées par les requérants. Et le tribunal de Paris, tout comme celui de Montreuil avant lui, a estimé que ce lien de causalité n’était pas suffisamment avéré.

« C’est une déception. Nous allons certainement faire appel de cette décision » a expliqué Maitre Lafforgue. Selon lui, il est possible de présenter « des documents médicaux, établis par des pneumologues, qui caractérisent l’aggravation de l’état de santé de la personne, si elle est vulnérable, au moment des pics de pollution ».

Olivier Blond, président de l’association Respire, se montre plus pessimiste. S’il est déjà arrivé que la justice reconnaisse un lien de causalité entre une carence de l’État et certaines pathologies, notamment dans le cas de l’amiante, il reconnait que la pollution atmosphérique est « un cas de figure plus complexe ». « Dans quasiment tous les cas de santé environnementale, c’est très compliqué de prouver ce lien de causalité ». Selon Marta Torre-Schaub, spécialiste du droit de l’environnement, la justice française est inadaptée à ce genre de préjudice, les juges français étant « insuffisamment formés sur le sujet ».

Quentin Haroche

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