La hausse des prix, mesure la plus efficace contre le tabagisme

Paris, le lundi 4 novembre 2019 - Le constat est clair. Pour le Professeur Yves Martinet, président du Comité national contre le tabagisme (CNCT), la hausse du prix du tabac est « clairement la mesure la plus efficace pour réduire le tabagisme ». Ce vendredi, à l’occasion du lancement du "mois sans tabac", le prix du paquet de cigarettes a été augmenté de 50 centimes pour atteindre désormais 9 euros en moyenne. C’est la 4ème augmentation depuis le début du mandat d’Emmanuel Macron. Deux autres augmentations sont prévues pour 2020, afin d’atteindre le prix symbolique de 10 euros pour un paquet.

Deux fois moins de cigarettes vendues

Selon les différentes études menés ces dernières années, une hausse du prix du tabac de 10 % diminue la consommation de 4 %, les jeunes et les personnes les plus pauvres étant logiquement ceux chez pour qui la mesure est la plus efficace. « Les ventes et le prix évoluent en miroir » indique Christophe Palle, membre de l’observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT). Ainsi, depuis 2000, alors que le prix du paquet de cigarettes est passé de 3 euros à 9 euros en moyenne, la quantité de cigarettes vendue a été divisée par deux. A l’inverse, la stabilité des prix entre 2014 et 2017 avait conduit à un maintien des ventes à des niveaux comparables.

Ici, le modèle à suivre est celui de l’Australie, où le prix du paquet est passé de 5 dollars en 1990 à 22 dollars aujourd’hui (environ 13,5 euros). Résultat, la part de fumeurs dans la population australienne a été divisée par deux et le gouvernement envisage désormais de porter le prix du paquet à 40 dollars en 2020.

Une hausse du prix insuffisante ?

Mais contrairement aux Australiens, les autorités françaises préfèrent procéder à des hausses limitées et régulières de 50 centimes plutôt qu’à des augmentations massives. Une erreur pour le Pr Yves Martinet, qui estime qu’une hausse de 1 euro d’un coup serait plus efficace. « Pour qu’une hausse de prix soit efficace, il faut qu’elle soit importante et répétée » explique-t-il. Une idée également défendue par la Cour des Comptes dans un rapport de 2016. Mais il faut dire que dans ce domaine, le gouvernement ne cherche pas uniquement à faire baisser la consommation de tabac mais également à renflouer ses caisses, les taxes sur le tabac rapportant près d’un milliard d’euros par an à Bercy.

Depuis 2016, la part des fumeurs dans la population française est passée de 29 % à 25,4 % selon l’OFDT. Mais la baisse de la vente de tabac ne signifie pas nécessairement une diminution équivalente de la consommation, puisque la hausse des prix entraine aussi une hausse de la contrebande et des achats transfrontaliers. Ainsi, par exemple durant le week-end prolongé de la Toussaint, nombreux sont ceux qui en ont profité pour aller acheter des cigarettes à Andorre où, c’est connu, les cigarettes sont trois fois moins chères qu’en France. Et ce jusqu’à provoquer des bouchons sur la route menant à la principauté.

Quentin Haroche

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions (1)

  • Hausse de l'impôt

    Le 10 novembre 2019

    On constate en effet une corrélation entre baisse de consommation et hausse des prix.
    Mais on n'a absolument aucune preuve d'un lien de causalité.
    Du point de vue de la psychologie sociale, on peut surtout penser que le changement de statut du tabac dans notre société, qui s'accompagne d'une baisse de consommation, permet aux autorités publiques de gonfler les taxes sans que quiconque se rebelle.

    Or la taxe sur le tabac est un impôt qui pèse sur les plus démunis, et ceux qui ne sont pas en mesure de lutter contre leur dépendance.
    Les ménages les plus pauvres voient ainsi leur budget amputé au détriment de l'alimentation, de la culture, des loisirs, ce qui affecte leurs enfants.

    Cela oriente aussi leur choix vers les produits moins chers et plus toxique (cigarettes roulées) et cela fait le lit de la contrebande.
    Le vapotage est sûrement aujourd'hui le meilleur facteur de la baisse du tabagisme.

    Je me souviens à partir de 2012 des levers de boucliers des mêmes tabacologues bien-pensants contre la cigarette électronique lors des discussions que nous avions sur ce sujet. Il aura fallu du temps pour qu'ils se rendent à la raison.
    Collègues tabacologues, arrêtez de dire n'importe quoi au nom d'un hygiénisme bien pensant et voyez plus loin que le bout de votre nez. Le tabac, c'est horriblement compliqué. Bien plus compliqué que ce que vous voudriez faire penser.
    La hausse extravagante des prix n'est rien d'autre qu'une prohibition qui ne veut pas dire son nom. Et les prohibitions, on sait où cela peut mener.

    Dr Jean-Paul Huisman (plus de trente ans d'expérience en tabacologie)

Réagir à cet article