Covid-19 : l’excrétion virale pourrait reprendre après la guérison

Les très nombreuses études consacrées au Covid-19 ont essentiellement porté sur les caractéristiques épidémiologiques, cliniques et radiologiques de l’infection. Le suivi des patients considérés comme guéris n’a suscité que peu d’attention. Une lettre à l’éditeur publiée en ligne dans le JAMA du 27 février 2019 a de quoi inquiéter à l’heure où les cas de Covid-19 se multiplient hors de Chine sans que les patients zéro soit toujours identifié.

Quatre cas de Covid-19 comme les autres

L’information transmise par les auteurs concerne quatre patients chinois âgés de 30 à 36 ans (dont deux hommes) chez lesquels l’infection a été diagnostiquée et prise en charge au sein de l’hôpital universitaire Zhondang de Wuhan entre le 1er janvier 2020 et le 15 février 2020. L’un d’entre eux a été hospitalisé, cependant que les trois autres tous membres du personnel soignant ont été mis en quarantaine.

La sortie de l’hôpital ou la fin de la quarantaine étaient envisageables dès lors qu’étaient réunis les critères suivants :

(1) absence de fièvre pendant au moins trois jours consécutifs ;
(2) disparition de tous les symptômes respiratoires ;
(3) amélioration substantielle des lésions exsudatives aiguës révélées par la tomodensitométrie ;
(4) négativité deux tests de RT-PCR consécutifs, espacés d’au moins une journée et effectués sur des prélèvements pharyngés selon un protocole strict.

Guéris mais… porteurs asymptomatiques du SARS-Cov2 ?

Trois des quatre patients étaient symptomatiques à la différence du quatrième qui ne présentait aucun symptôme respiratoire. Dans tous les cas, il existait des signes radiologiques orientant vers une pneumonie à SRAS-CoV2 et la détection du virus par RT-PCR était positive.

L’infection s’est avéré légère ou modérée. Un traitement antiviral (150 mg d’oseltamivir/jour) a été prescrit chez les quatre patients et tous les signes cliniques et radiographiques ont disparu sauf dans un cas où il persistait quelques opacités en verre dépoli. La détection du virus par RT-PCR s’est avérée négative à deux reprises, le délai entre les tests étant d’au moins 24 heures. Le délai entre le début des symptômes et la guérison a été compris entre 12 et 32 jours.

Au terme de l’hospitalisation et de la quarantaine, les patients ont été incités à rester confinés cinq jours de plus à leur domicile.

L’histoire pourrait en rester là mais les auteurs ont poussé la curiosité jusqu’à pratiquer des tests RT-PCR 5 à 13 jours plus tard chez les quatre patients. Les résultats positifs dans ces quatre cas ont conduit à répéter les tests à trois reprises au cours des 4 à 5 jours suivants et la positivité s’est confirmée pour chaque observation, alors que les patients restaient totalement asymptomatiques, aucune récidive radiologique n’étant par ailleurs détectable. Le recours à d’autres kits de dosage distribués par d’autres fournisseurs n’a rien changé à l’affaire. Aucun nouveau contact avec des sujets potentiellement infectés n’a été identifié.

Le petit nombre de cas rapportés dans cette lettre à l’éditeur n’autorise que des conclusions prudentes. Elle n’en suggère pas moins que la guérison du Covid-19 affirmée selon les critères admis n’exclut pas la possibilité d’un retour rapide du virus dans les voies aériennes supérieures. Une telle perspective amène à réfléchir sur les critères de guérison actuels et à envisager la notion d’un portage prolongé chez certains patients même considérés comme guéris. Une forme de retour à la case zéro en termes de contagiosité.

Rien n’est sûr… mais des résultats, qui pourraient avoir une grande importance en santé publique, à confirmer rapidement au sein de cohortes plus fournies et plus diversifiées, incluant notamment des formes plus sévères de l’infection et des patients autres que des professionnels de santé. 

L’histoire naturelle du Covid-19 est en train de s’écrire au fil des jours. Cette lettre à l’éditeur,inquiétante au plan épidémiologique, nous renvoie à cette notion quelque peu occultée dans la myriade des publications actuelles de portage prolongé. A moins qu’il s’agisse en fait de nouvelles contaminations chez des patients guéris (dont il a été fait état très récemment), ce qui ne serait guère rassurant sur la qualité de l’immunité post infectieuse du Covid-19…

Dr Philippe Tellier

Référence
Lan L et coll. Positive RT-PCR Test Results in Patients Recovered From COVID-19. JAMA 2020 ; publication avancée en ligne le 27 février.doi:10.1001/jama.2020.

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Vos réactions (10)

  • Peu surprenant

    Le 03 mars 2020

    Il serait logique de penser que des coronavirus ont "appris" à persister de manière chronique chez ses hôtes, puisque c'est le cas chez les chauves-souris, ce qui lui procure évidemment un gros avantage biologique.

    Dr Pierre Rimbaud

  • Des questions multiples

    Le 03 mars 2020

    Cette infection virale entraine-t-elle l'apparition d'Ac protégeant, comme la rougeole par exemple ? Dans quels délais? Visiblement pas? S'agit-il de la persistance du même virus ou l'appartion d'une mutation? Spontanée? Ou par ré-infection? Le traitement par anti-viral ne ferait-il pas que décapiter l'infection ?

    Dr Jean-Paul Vasse

  • Immunité et nouvelle détection

    Le 05 mars 2020

    Mais la nouvelle positivité de la RT PCR dans les cas que vous mentionnez ne signifie pas un échec de l'immunité. Le système immunitaire sera efficace s'il n'y a pas de symptômes mais lors de son action, il ne peut complètement empêcher la pénétration du virus dans les voies aériennes supérieures. C'est l'élimination du virus par les différentes cellules immunitaires qui importe et cela prend quelques heures (jours) le temps que la mémoire immunitaire soit mobilisée. Pendant cette période, les tests de PCR seront positifs.

    Delphine Merino (pharmacien)

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