
Une efficacité théorique
L’hydroxychloroquine (HCQ) fait partie de ceux-ci, au même titre que la colchicine : ces deux médicaments sont couramment utilisés dans des indications précises notamment en rhumatologie.Les vertus immunomodulatrices ou anti-inflammatoires de l’un ou de l’autre ne prêtent guère à discussion à la lueur d’une très longue expérience et, dans le cas de l’HCQ, nul ne saurait contester aussi son rôle de premier plan dans le traitement préventif et curatif du paludisme. Par ailleurs l’HCQ fait preuve d’une activité virale in vitro dont la traduction in vivo dans le cadre de la maladie Covid-19 a été à l’origine d’âpres débats. La colchicine, pour sa part, en tant qu’anti-inflammatoire puissant est susceptible de moduler l’inflammation sévère et potentiellement létale qui peut compliquer l’infection. Ces deux médicaments peuvent donc en théorie avoir un impact sur l’évolution de la maladie, en fonction du stade auquel ils sont prescrits.
Soit, mais quel est l’effet d’une exposition continue à l’un ou à l’autre, préalable à l’arrivée de l’épidémie de Covid-19 ? Le recours à une base de données est susceptible de répondre à cette question et d’apporter un éclairage sur l’efficacité sinon curative du moins préventive des deux molécules.
Parmi des patients testés pour une infection à SARS-CoV-2 entre le 23 février et le 31 mars 2020 ont ainsi été recherchés ceux qui avaient été exposés de manière continue à l’HCQ ou à la colchicine en raison d’une maladie rhumatismale chronique.
Pas plus de PCR négatives en cas d’exposition préalable à l’HCQ ou à la colchicine
Sur les 14 520 sujets testés, la RT-PCR des prélèvements nasopharyngés s’est avérée positive dans 1 317 cas. Les deux groupes, négatifs et positifs ont été comparés eu égard à l’exposition préalable à l’HCQ ou à la colchicine. Il apparaît que cette dernière n’a pas influé sur le taux de positivité ou de négativité de la PCR : sous HCQ, il y a eu 0,23 % de PCR+ et 0,25 % de PCR- (NS) ; sous colchicine, on note 0,53 % de PCR+ et 0,48 % de PCR- (NS). En d’autres termes, l’exposition continue à l’HCQ ou à la colchicine n’a pas réduit la fréquence des RT-PCR positives chez les patients soupçonnés d’avoir contracté un(e) Covid-19 : une étude qui peut semer le doute quant à l’utilisation préventive de ces médicaments sans pour autant clore le débat, puisqu’elle est rétrospective.De surcroît, les doses utilisées tout comme l’HCQ en monothérapie ne respectent pas les termes de certains protocoles : une pièce à verser à un épais dossier… surtout pour illustrer l’apport potentiel des bases de données nationales dans l’étude de situations épidémiologiques complexes.
Dr Philippe Tellier