Encore trop peu d’hôtels réquisitionnés pour isoler les malades
Paris, le vendredi 15 mai – Bien que le gouvernement ait
évoqué depuis quelques semaines la possibilité d’isoler les
personnes atteintes du Covid-19 dans des hôtels, seule une dizaine
de ces établissements ont été réquisitionnés en France.
C’est un service d’étage quelque peu particulier. A l’hôtel
Première classe de Perpignan, les résidents reçoivent deux fois par
jour la visite de soignants de Médecins sans frontières qui
viennent les ausculter. Depuis le 27 mars, les 79 chambres de cet
établissement ont été réquisitionnées, sur ordre du préfet, pour
accueillir des patients atteints du Covid-19 peu ou pas
symptomatiques qui viennent y terminer leur
quarantaine.
L’objectif est double : libérer des chambres d’hôpital et
surtout éviter que les patients ne contaminent les membres de leur
foyer. L’isolement des patients est volontaire. S’ils peuvent, en
principe, quitter l’hôtel à tout moment, il leur est demandé de
rester isolé jusqu’à deux jours après la disparition des symptômes
soit au total environ une dizaine de jours. Dans d’autres
établissements, c’est seulement après deux tests PCR négatifs que
l’on peut rentrez chez soi.
L’Académie de médecine favorable à la réquisition des
hôtels
Depuis le 29 mars, un décret autorise les préfets à
réquisitionner des hôtels pour y isoler des patients. Des
initiatives similaires à celle de Perpignan se multiplient partout
en France. A Paris, dans le cadre du dispositif Covisan lancé
mi-avril, l’AP-HP a réquisitionné plusieurs hôtels appartenant au
groupe Accor pour y isoler des malades.
Le 10 avril, l’Académie de médecine a rendu un avis très
favorable à l’isolement des patients dans des hôtels. Cette
stratégie, déjà éprouvé en Corée du Sud, en Tunisie ou en Espagne,
est vue comme un moyen efficace de casser la chaine de
contaminations et d’éviter de créer des foyers infectieux dans les
domiciles. Les académiciens appelaient donc de leurs vœux une
généralisation au niveau national de ces initiatives locales.
Seule une dizaine d’établissements réquisitionnés
Mais alors que le déconfinement a commencé depuis ce lundi,
très peu d’hôtels ont été réquisitionnés par l’État. Selon des
journalistes de France 2, seul une dizaine d’établissements dans
tout le pays accueillent des patients atteints du Covid-19. A
Chelles, en Seine-et-Marne, c’est une association privée qui a dû,
d’elle-même et sur ses deniers, réserver un hôtel pour les patients
de la ville.
Dès le 19 avril, en exposant son plan de déconfinement, le
Premier Ministre Édouard Philippe avait pourtant expliqué que les
personnes testées positives au Covid-19 pourraient, si elles ne
pouvaient ou ne souhaitaient pas être isolés chez elles, être
confinées à l’hôtel. La réquisition d’établissements hôteliers
semblait donc faire partie intégrante de la stratégie de
déconfinement en trois points : « protéger, tester, isoler
».
Les hôteliers privés prêts à collaborer
Difficile d’expliquer ce manque d’empressement des autorités à
utiliser les hôtels pour isoler les personnes contagieuses. Les
acteurs privés de l’hôtellerie se montrent pourtant
particulièrement coopératifs depuis le début de la crise. Selon le
Groupement national des chaines hôtelières, 1 000 établissements,
soit 40 000 chambres au total, sont à la disposition des autorités.
Le groupe Accor à lui seul, dont de nombreux hôtels ont été
réquisitionnés en Corée ou en Espagne, est prêt à fournir 300
hôtels à l’État : seul deux ont été réquisitionnés pour l’instant
!
Face au début de polémique, le gouvernement a expliqué que les
préfectures avaient mis en place des cellules chargés de
réquisitionner les hôtels de la région…disponibles pour certains
cas depuis plus d’un mois.
Pourquoi est-on toujours en retard d'un ou plusieurs trains ?
Le 15 mai 2020
Tout cela est étonnant et incompréhensible. Plusieurs publications convergentes confirment le rôle important des contaminations familiales (fallait-il en douter ?). Il est vraisemblable que si cette mesure avait été mise en place il y a 1 mois, la défervescence des hospitalisations aurait été encore plus importante. Pour information (données personnelles), un sondage auprès de médecins généralistes dans un département a indiqué que 70 % de ces praticiens étaient disposés à poser la question suivante à leurs patients : "si vous le souhaitez, seriez vous prêts à vous isoler dans un endroit dédié (hôtel ou autre) pour protéger vos proches ?" Cette même question a été posée à des soignants d'un établissement hospitalier : 70% également de réponses favorables.
Pourquoi est-on toujours en retard d'un ou plusieurs trains ?
Certes, au moment de la décision, le pourcentage de ces soignants volontaires n'aurait peut-être pas été de 70%, mais si on ne propose rien, il est certain que les patients ne demanderont jamais rien. Maintenant, on va peut-être rétorquer que ça n'est plus la peine puisque tout s'améliore. Et si, malheureusement, on constate malheureusement une nouvelle dégradation, on prendra alors un 2e mois de retard.