Vers une obligation du port du masque dans l’espace public extérieur ?
Paris, le jeudi 30 juillet 2020 – Le jeu est devenu
presque lassant : il ne semble plus opportun de se souvenir des
déclarations passées pour observer les préconisations actuelles. En
visite hier dans les Yvelines, le ministre de la Santé, Olivier
Véran a « recommandé » le port du masque dans l’espace
public extérieur fréquenté, soulignant que dans les lieux vides ou
quasiment vides l’utilité est bien moins manifeste. Ces derniers
jours, plusieurs villes ont adopté des arrêtés visant à imposer
cette protection dans les centres, tandis que toutes les communes
de Mayenne sont également concernées et possiblement bientôt celles
du Nord. A la différence des mesures prises pendant le confinement
par certaines municipalités, dont la légalité avait été remise en
question devant la justice administrative par des associations, ces
dispositions sont le plus souvent adoptées avec l’accord voire même
sous l’impulsion de la préfecture. Aussi, sont-elles bien moins
susceptibles d’être invalidées, d’autant plus que les déclarations
d’Olivier Véran suggèrent en filigrane que l’obligation pourrait
être généralisée à l’ensemble du territoire.
Une piste à envisager sérieusement
Pour expliquer l’orientation vers une telle mesure, le ministre de
la Santé et les gouvernements locaux et nationaux qui ces
dernières semaines ont choisi d’opter pour une telle mesure (Hong
Kong, la Catalogne, les Baléares, tandis qu’entre autres la
Lombardie, certaines régions brésiliennes et indiennes ou encore la
Macédoine ont été des précurseurs…) mettent en avant les nouvelles
données concernant l’aérosolisation. Début juillet, 293
spécialistes invitaient dans une lettre ouverte l’Organisation
mondiale de la Santé (OMS) à revoir sa position sur la transmission
du SARS CoV-2 par aérosol, l’estimant « possible ».
L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a lancé une nouvelle
expertise sur le sujet et a récemment admis qu’il existait un
nombre croissant de preuves convergentes suggérant la possibilité
d’une diffusion du virus par voie aérienne. Elle estime cependant
que ces éléments doivent encore être consolidés et juge que cette
hypothèse doit renforcer la vigilance dans les lieux très
fréquentés. Pour l’OMS, une transmission par les aérosols pourrait
notamment expliquer que même sans contacts étroits avec la ou les
personnes infectées, des contaminations aient été signalées dans
certains lieux fermés et mal ventilés (excluant donc le cas des
espaces ouverts). On sait par ailleurs que les études concernant la
transmission par les objets concluent à un risque faible, voire
très faible.
Des données épidémiologiques plutôt rassurantes
Si la présence possible du virus dans l’air est de plus en
plus étayée, de nombreuses questions demeurent, notamment sur la
contagiosité des aérosols. En tout état de cause, les éléments
épidémiologiques disponibles sur le SARS-CoV-2 suggèrent que la
transmission aéroportée, si elle existe, est bien plus faible
qu’avec d’autres virus. Les données sur le R0 confirment que la
contagiosité n’est pas semblable à celle des virus pour lesquels la
transmission par les aérosols et par les objets est avérée. «
Quoi qu’il arrive, le coronavirus n’est pas autant aérosol que
des virus comme la rougeole par exemple, où le R0 est autour de 10
ou 15, alors qu’il n’a pas dépassé 3 ou 4 pour le coronavirus »
souligne dans le Huffington Post, Christophe Bécavin, chercheur à
université Côte d’Azur et à l’Institut de pharmacologie moléculaire
et cellulaire du CNRS. On peut également noter que la majorité des
cas les grands clusters ayant conduit à une large propagation ont
pour origine des réunions dans des espaces fermés mal ventilés,
avec des contacts étroits et prolongés entre les personnes,
supposant une diffusion via des gouttelettes de Pflügge. Ainsi,
même si la traçabilité est plus difficile à établir, les chaînes de
contamination à partir d’une transmission dans un espace ouvert et
même dans des lieux fermés avec une distance respectée (et/ou port
du masque) ont été bien plus rarement établies. Enfin, même en cas
de suspensions du virus dans l’air dans des aérosols, le
renouvellement de l’air en extérieur affaiblit encore le risque
d’une transmission lors d’une promenade dans un lieu même
relativement fréquenté, sans proximité un peu prolongée avec une
personne infectée.
Contexte épidémique
Ainsi, la pertinence du port du masque dans les espaces ouverts
pourrait être discutable. Elle peut néanmoins se justifier dans un
contexte d’augmentation des cas (situation actuelle en France, bien
qu’en lien avec une forte progression du nombre de tests et qui
n’est heureusement pas corrélée avec une progression du nombre de
morts ; tandis que la circulation du virus reste toujours bien plus
faible qu’au printemps où le port du masque était à peine conseillé
à l’intérieur) afin de rappeler l’importance de demeurer en alerte
(en évitant si possible une culpabilisation des populations),
notamment pour protéger les plus vulnérables. Ce port du masque
généralisé dans les espaces publics fréquentés est également une
façon d’améliorer l’utilisation du masque en diminuant les
manipulations propices à une détérioration de ces
équipements.
Des masques chirurgicaux peu efficaces
Cependant, permettant potentiellement la restriction de façon très
ponctuelle de certaines contaminations, constituant un geste fort
pour inviter la population à participer activement à la lutte
contre une éventuelle reprise de l’épidémie, les masques
chirurgicaux et probablement plus encore grand public pourraient
voir leur efficacité limitée face à la petitesse des aérosols.
L’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) signale
ainsi sur son site : « Un masque chirurgical est destiné à
éviter la projection vers l’entourage des gouttelettes émises par
celui qui porte le masque. Il protège également celui qui le porte
contre les projections de gouttelettes émises par une personne en
vis-à-vis. En revanche, il ne protège pas contre l’inhalation de
très petites particules en suspension dans l’air ». Les études
conduites sur les masques en milieu médical paraissent par ailleurs
converger pour observer l’efficacité limitée des dispositifs les
plus rudimentaires pour faire barrage aux aérosols. Sauf à équiper
l’ensemble de la population en masques FFP2, le masque obligatoire
dans l’espace public extérieur même dans le cas d’une transmission
massive par aérosol est d’abord une mesure d’éducation sanitaire…
et en partie politique. Néanmoins, elle suscite une forte adhésion
de la communauté médicale comme le suggèrent les premiers résultats
de notre
sondage en cours sur le sujet.
Quelle cacophonie... Ayant eu la covid, sévère, en mars, j'ai néanmoins continué à travailler malgré mes 70 ans passés. Et je considère que je ne peux plus transmettre le virus.
On discute en permanence sur tout (aérosols, immunité, masques,....), avec en permanence une valse hésitation. Si les aérosols sont en cause avec une faible efficacité des masques, il faudrait désinfecter, aérer, tous locaux médicaux entre deux patients, ne plus croiser personne nulle part...
Finalement quelle que soit les méthodes utilisées, on commence à voir que même les pays tant cités en exemple ont eu des morts. Tant que le virus n'aura pas fait le tour de la planète, on n'en sortira pas...
DrA. Muller (Strasbourg)
À chaque jour sa décision, selon le vent
Le 30 juillet 2020
Le masque est-il utile ? Peu utile ? Pas utile ? Sur le Vieux Port, selon qu'il y a du mistral ou non, Monsieur le Ministre me conseille-t-il de porter un masque ? Chirurgical ? Grand public ? FFP2 ? Petit-bateau ? Quelle est l'utilité de ces hommes politiques qui telles des girouettes nous imposent aujourd'hui sous peine d'amende ce qui était déclaré inutile hier ?
Dr Henri Bandini
Masques
Le 30 juillet 2020
Un article paru dans Nature Médecine a consisté à tester l'efficacité d'un masque chirurgical en analysant un échantillon d'air expiré chez 10 personnes présentant une affection respiratoire haute due à des coronavirus saisonniers retrouvés dans différents prélèvements (nez, gorge par RT-PCR. 30% avaient du coronavirus dans les gouttelettes et 40 % dans les aérosols en absence de masques alors qu'avec un masque tous les prélèvements étaient négatifs; avec les rhinovirus, les masques étaient inefficaces, tandis qu'avec la grippe ils protégeaient seulement des gouttelettes. On peut extrapoler avec prudence les résultats des coronavirus saisonniers au coronavirus Sars CoV-2 ; mais une telle étude avec ce virus serait la bienvenue.