Test antigénique : l’exemple slovaque peut-il changer la face de la pandémie ?

Bratislava, le lundi 2 novembre 2020 - Le gouvernement slovaque s’est livré ce week-end à la première étape d’une expérimentation unique au monde. Toute la population de ce pays de 5,5 millions d’habitants est appelé à bénéficier à deux reprises d’un test antigénique à une semaine d’intervalle. Cette opération d’envergure inédite est organisée sur deux week-ends.  

Débarquement en Normandie

Cet exploit logistique digne du « débarquement en Normandie » selon le Premier ministre Igor Matovic nécessite la mobilisation de 34 000 médecins, infirmiers et étudiants en médecine (y compris des renforts d’Autriche et de Hongrie) et aussi de 5000 policiers et 6000 militaires chargés d’éviter la cohue dans les 4 900 points de dépistage. Notons que pour la France cela équivaudrait à mobiliser environ 600 000 personnes !

En cas de résultat négatif, un laissez-passer est remis au sujet testé qui permet ensuite de circuler librement. Les cas positifs et ceux qui refusent de se dépister doivent, eux, immédiatement restés isolés dix jours à leur domicile. Seuls les enfants de moins de 10 ans et les personnes « très âgées » sont dispensés de ce dépistage de masse. La participation n’est pas stricto sensu obligatoire, mais les Slovaques qui circuleront sans certificat de test négatif se verront infliger une amende.

Ce dispositif est mis en place, alors que plusieurs hôpitaux du pays sont à la limite de leurs capacités. Aussi Ján Mikas, directeur général de la santé slovaque plaide « les tests antigéniques peuvent détecter rapidement les personnes à forte charge virale, les plus infectieuses. Leur isolement peut influencer l’évolution défavorable actuelle de la situation épidémiologique ».

Il vaut mieux dépister 70 % des cas que 0 !

Cette stratégie innovante est néanmoins sujette à polémique dans le pays.

L’Association slovaque des médecins généralistes a ainsi critiqué le plan du gouvernement, le considérant mal préparé. Selon l’association « la concentration de millions de personnes » sur les sites de dépistage est « en contradiction avec les recommandations des experts en maladies infectieuses de réduire autant que possible les contacts publics et la mobilité ».

Vendredi, c’est la présidente slovaque en personne,  Zuzana Čaputová qui a appelé le gouvernement à renoncer à cette opération compte tenu des difficultés logistiques et des limites de sensibilité des tests… Le gouvernement lui a répondu que la moindre fiabilité du test (avec environ 30 % de faux négatif) n’enlevait rien à l’intérêt de l’opération. « C’est déjà fantastique de pouvoir identifier 70 % des malades du pays », a vanté le ministre de la défense Jaroslav Naď.

2,6 millions de tests en une journée !

Finalement, samedi, les Slovaques ont semblé plutôt partager cet avis et ont afflué puisque 2,6 millions de personnes se sont fait tester dès le premier jour (on ne connaît pas encore les résultats de dimanche), ce qui a permis de détecter environ 26 000 cas, alors que l’Etat d’Europe centrale n’identifie habituellement que 1000 à 3000 cas par jour.

Le gouvernement souligne également le faible coût de ce dépistage. Ainsi, la Slovaquie estime avoir déboursé moins de 50 millions d’euros pour cette opération.

Espérons que cette stratégie inédite permettra de casser la courbe épidémique et que le cas échéant, la France s’en inspirera largement et rapidement. Si la taille bien plus importante de notre population rendra sans doute certains aspects logistiques plus complexes, nous pouvons également parallèlement compter sur des ressources plus importantes, ce qui permet d’envisager des opérations similaires, au moins localisées. Cependant, aujourd’hui, les tests antigéniques ne sont pas  encore  considérées comme devant être largement généralisés comme outil de surveillance épidémiologique par les autorités sanitaires.

Quoi qu’il en soit, d’autres Etats européens comme le Luxembourg et Monaco (qui se caractérisent eux aussi par leur taille limitée) ont déjà annoncé leur volonté d’imiter l’exemple Slovaque.

F.H.

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions (5)

  • Dépistage de masse

    Le 03 novembre 2020

    Les tests de masse sont-ils possibles dans notre île ? Et d'île en île au moins dans les outremers ?

    Un pays de 5 millions d'habitants la Slovaquie, a soumis plus d’un million d’habitants à un test de dépistage du coronavirus, devenant ainsi le premier pays à essayer de ralentir l’infection en testant presque toute sa population en un seul week-end.

    Le dépistage massif a été organisé avec plus de 5000 sites de test et au moins 40 000 travailleurs médicaux, bénévoles et soldats mobilisés pour l’occasion.

    Toutes les personnes âgées de plus de 10 ans dans ce pays de 5,5 millions d’habitants doivent passer le test gratuit de dépistage de l’antigène par écouvillonnage avant lundi, sous peine d’être mises en quarantaine.

    Dr Jean Doremieux

  • Idée intéressante

    Le 08 novembre 2020

    Voilà une idée très intéressante à mettre en place dans d’autres pays ou région ou ville même ... car la contamination ne se fait principalement que dans son entourage familial ou professionnel (scolaire)
    À réfléchir en tout cas...

    Philippe Garcia (pharmacien)

  • Quelle efficacité

    Le 08 novembre 2020

    Voilà un exemple à suivre quelle efficacité et organisation.

    Dr Yves Rio

Voir toutes les réactions (5)

Réagir à cet article