
Paris, le lundi 16 novembre 2020 – A l’occasion de la
conférence de presse du Premier ministre jeudi 12 novembre, quinze
jours après l’instauration d’un nouveau confinement, beaucoup
espéraient des précisions sur la façon dont le gouvernement
souhaitait s’appuyer sur les tests antigéniques pour améliorer la
surveillance de la circulation du virus. Pourtant, à l’exception
d’indications sur les commandes passées, le ministre de la Santé a
été peu disert sur le sujet.
Absence de ligne directrice
Néanmoins, certains signaux ont semblé suggéré la volonté des
pouvoirs publics de s’emparer des tests antigéniques, avec par
exemple l’annonce du déploiement de 1,2 millions de tests dans les
établissements scolaires (en particulier les lycées), le
commencement d’une campagne de « masse » en Occitanie ou
encore la multiplication de messages concernant leur généralisation
dans les Établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes.
Cependant, ces différentes dispositions ne semblent pas répondre à
une organisation unifiée et cohérente ce qui ne peut qu’inquiéter
alors qu’en Italie plusieurs voix se sont exprimées la semaine
dernière pour déplorer que les tests antigéniques déployés dès le
mois de septembre n’aient pas empêché le pays d’être confronté à un
important rebond épidémique.
Une colère sourde
Cependant, cette semaine, certaines des failles pourraient
être corrigées : un plan précis sur la stratégie de dépistage
française et la place de chacun des tests en fonction des profils
des patients et des objectifs des campagnes doit être dévoilé en
milieu de semaine. Il est à espérer qu’il comblera les attentes qui
sont multiples, tandis que la colère commence à gronder chez les
professionnels de santé libéraux. Ainsi, le 10 novembre dernier, le
Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux dénonçait
: « les effets médiatiques répétés du Ministère : la commande de
tests antigéniques destinée aux professionnels de santé de ville
n’aurait été passée par l’État que le 28 octobre... soit 13 jours
après l’annonce d’Olivier Véran, (…) l’inertie des instances »
et « enfin, la lourdeur administrative… Ainsi, depuis cet été,
les infirmiers libéraux qui participent à des actions de dépistage
en masse de type drive doivent déclarer tous lieux de prélèvement
en-dehors de leur cabinet ou du domicile des patients pour éviter
le risque d’être accusé d’exercice forain infirmier. A quand la
mise en place de la dérogation temporaire demandée à de multiples
reprises par le Sniil ? ».
Approvisionnement, enregistrement et doctrine : de nombreux manques
A l’instar des infirmiers, pharmaciens et médecins veulent une
clarification sur la doctrine à appliquer, concernant notamment les
patients auxquels doivent être réservés les tests antigéniques. : «
Que le gouvernement veuille en mettre partout, c'est très bien
mais ils sont déployés n'importe comment », résume un fabricant
cité dans le Journal du Dimanche. Si les préconisations de la Haute
autorité de Santé font normalement référence, les zones d’ombre
sont nombreuses : « Cela reste très flou, il n’y a pas de
doctrine sur les asymptomatiques » qui consulteraient en
cabinet remarque par exemple le patron de MG France, Jacques
Battistoni. Une autre limite concerne aujourd’hui l’enregistrement
des cas positifs dans la base SIDEP.
Aujourd’hui, les professionnels libéraux qui obtiennent un
résultat positif via un test antigénique, doivent envoyer un
message à la caisse d’assurance maladie. Cependant, ils ne
renseignent pas l’ensemble des tests qu’ils réalisent ce qui
pourrait fausser le taux de positivité, tandis que l’absence
d’accès direct à la base SIDEP est chronophage ; des impairs qui
eux aussi devraient être rapidement corrigés. Enfin, dans certaines
localités des inquiétudes commencent à s’exprimer concernant un
risque de pénurie. « On a des tensions d’approvisionnement.
L’État doit mettre en place un circuit via les grossistes
répartiteurs, on espère qu’il sera fonctionnel pour le 15
novembre », espère Philippe Besset, président de la Fédération
des syndicats pharmaceutiques de France.
Une collaboration pas toujours optimale
Outre ces différentes attentes concernant l’organisation et la
stratégie, les tensions concernent également la rémunération des
professionnels de santé : l’Union française des médecins libéraux
et la Fédération des médecins de France considèrent ainsi notamment
comme insuffisantes les conditions tarifaires en période de
garde.
Enfin, des dissensions s’observent par ailleurs entre les
professionnels de santé. La semaine dernière certains ont en effet
reproché aux pharmaciens de faire de la « rétention de tests
» empêchant leur plein accès aux autres professions de santé, tel
le SNIL dans son communiqué du 10 novembre.
De son côté, le patron de MG France déplore qu’en
contradiction avec les recommandations de la HAS de nombreuses
officines réalisent des tests antigéniques chez des sujets
asymptomatiques.
Léa Crébat