Covid-19 : l’immunité naturelle vaudrait moins que l’immunité vaccinale

Des études réalisées récemment au Royaume-Uni ont montré que l’immunité persistait au moins 5 à 6 mois après une infection par le SARS-CoV-2. Le degré de l’immunité protectrice après la Covid-19 est toutefois encore mal précisée. Le sujet est pourtant déterminant quand il s’agit d’envisager l’évolution de la pandémie dans les mois à venir.

Pour en savoir plus, une équipe danoise a exploité les tests PCR réalisés au cours de la 1ère et de la 2ème vagues épidémiques. Environ 10,6 millions de tests ont été réalisés au Danemark en 2020, concernant 4 millions d’individus (69 % de la population) et offrant une base de données conséquente. Les auteurs ont analysé les données de plus de 530 000 personnes testées au cours de la première vague, parmi lesquelles 11 727 (2,20 %) avaient des résultats positifs pour une infection au SARS-CoV-2 (2,20 %).

Taux de protection naturelle : 80,5 %...

Parmi ces dernières, 72 ont à nouveau eu ensuite des tests positifs, soit 0,65 %. Ce taux est à comparer à celui de l’autre groupe, soit 16 817 personnes testées négatives lors de la 1ère - 2ème vague et positives ensuite, soit 3,27 % (risque relatif RR ajusté 0,195 ; intervalle de confiance à 95 % IC 0,155 à 0,246). Les auteurs évaluent donc à 80,5 % le taux de protection conférée par la première infection. Ce taux de protection diminue toutefois avec l’âge et est trouvé inférieur à 50 % après 65 ans. En revanche le genre ne modifie pas le degré de protection (78,4 % pour les hommes vs 79,1 % pour les femmes). Il n’apparaît pas non plus de modification de la protection avec le temps (79,3 % pendant le suivi de 3-6 mois vs 77,7 % au-delà de 7 mois).

Il faut bien admettre que ce taux de protection est plus bas et inquiétant que ce qui était annoncé jusqu’à présent. L’étude la plus vaste venait du Qatar et donnait un risque de réinfection de 0,2 %. Mais elle avait été réalisée sur une cohorte de personnes symptomatiques, alors que la cohorte danoise était issue d’une initiative nationale offrant le test aussi bien à des personnes symptomatiques que non symptomatiques. Pour expliquer la différence, les auteurs avancent l’hypothèse d’une protection moins bonne après une infection asymptomatique.  

Un argument pour vacciner ceux qui ont été vaccinés

Notons aussi que selon ces données, l’immunité conférée par l’infection semble inférieure à celle annoncée généralement pour les vaccins.

Comme le souligne l’éditorialiste du Lancet, si, comme semblent l’indiquer les données, la réponse après une dose de vaccin est augmentée chez les patients auparavant infectés par le SARS-CoV-2, cela indique que l’immunisation de la population par la vaccination est une option plus pertinente que de miser sur une immunisation « naturelle ». Et cela confirme aussi la nécessité de vacciner les personnes ayant déjà été infectées, notamment celles de plus de 65 ans.

Dr Roseline Péluchon

Références
Holm-Hansen C et coll. : Assessment of protection against reinfection with SARS-CoV-2 among 4 million PCR-tested individuals in Denmark in 2020: a population- level observational study. Lancet 2021 ; publication avancée en ligne le 17 mars. doi.org/10.1016/S0140-6736(21)00575-4
Boyton RJ et coll. : Risk of SARS-CoV-2 reinfection after natural infection. Lancet 2021 ; publication avancée en ligne le 17 mars. 10.1016/S0140-6736(21)00662-0

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Vos réactions (9)

  • Vacciner ceux qui ont été vaccinés ?

    Le 19 mars 2021

    "Les auteurs avancent l’hypothèse d’une protection moins bonne après une infection asymptomatique" peut-être parce qu'ils sont seulement positifs au test et en fait pas malades du tout! Des particules de virus dans le nez au moment d'un test ne signifient pas qu'on est malade.
    quant à "Un argument pour vacciner ceux qui ont été vaccinés" quel est l'argument? ou ceux qui ont été infectés? ou ceux qui ont été positifs? je ne comprends pas.

    Anne Levry (pharmacienne)

  • Cas clinique

    Le 19 mars 2021

    Mon épouse (80ans) et moi même (77 ans) avons eu, début janvier, une petite "gripette" avec une fièvre à 38° une seule soirée. Nous avons fait un test PCR; positif pour les 2. Après isolement de 2 semaines nous avons refait un test PCR fin février: négatif!

    Voulant savoir quel était notre immunité nous avons fait une sérologie et nos index était de 1.1 et 2.1 soit quasiment négatifs!
    J'ai donc décidé de me faire vacciner, non pas avec une seule injection (type rappel) mais avec les 2 injections classiques (Pfizer), la première ayant eu lieu il y a 15 jours ! Ensuite, plus tard, je ferai une nouvelle sérologie.
    J'en déduit que porteur pratiquement "asymptomatique", après 6 semaines, le taux des immunoglobulines seules ne m'assurait pas une immunité suffisante du moins pour le variant classique!

    Dr AV

  • Immunité...diplomatique

    Le 20 mars 2021

    À côté des études de cohorte, il y a cette composante bien peu « evidence-based medecine » qu’est l’expérience, ou encore l’empirisme...
    Ma minuscule expérience dans un ehpad+hopital de 180 places et lits sur un site, gravement et massivement touché dès le tout début de l’épidémie montre que l’immunité naturelle aussi bien des survivants que des asymptomatiques sero positifs a permis de traverser l’année sans ré-infections, malgré une prévalence majeure du Covid dans le service de médecine SSR transformé en unité Covid.

    C’est très rassurant. Par contre nous avons eu 5 ou 6 formes prolongées avec décès parfois tardif. Et beaucoup de RTPCR + par portage non pathogène après un Covid, parfois encore 6 mois après. Donc, à mon sens, une RTPCR + chez un patient non naif au covid ne signifie pas une ré-infection, d’où un biais sévère dans l’interprétation des résultats que vous présentez. Ceci concerne de grands vieillards fragiles à l’immunité réputée faible. Je n’ai pas vacciné prioritairement ceux qui avaient un antécédent prouvé ou une sérologie +, je le fais maintenant tranquillement avec une seule injection. Le bon sens requiert parfois de s’affranchir des recommandations-girouettes. Il faut faire entendre la voix du médecin qui ne doit pas être un simple relai des instances-qui-savent-tout, car lui est un sage : il ne sait qu’une chose, c’est qu’il ne sait rien.

    Dr N Rullière

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