
Des injonctions thérapeutiques en diminution
Cependant, au fil des années et des décennies, les conditions
d’application de cette loi ont largement évolué et « les
sanctions pénales pour usage de stupéfiants se sont diversifiées.
Si elles apparaissent moins tournées vers la privation de liberté
(rare pour des faits de simple consommation), elles sont plus
fréquentes et surtout centrées sur des sanctions financières,
revendiquant parfois une portée « éducative » (stages
de sensibilisation) ». Ce mouvement s’est fait au détriment de
la prise en charge sanitaire des consommateurs. Ainsi,
l’Observatoire relève qu’après une augmentation réelle au cours des
années 2000, « les mesures alternatives à caractère sanitaire,
sous forme d’injonctions thérapeutiques comme d’orientations vers
une structure socio-sanitaire, se sont raréfiées au cours de la
décennie 2010. Le déclin des sanctions à caractère sanitaire dans
les pratiques pénales, malgré les variations territoriales, s’est
fait au profit des rappels à la loi, qui étaient déjà majoritaires
mais qui représentent désormais la quasi-totalité des orientations
vers une mesure alternative aux poursuites ».
Ainsi, aujourd’hui les injonctions thérapeutiques ne
représentent que 4 % des alternatives aux poursuites (le niveau le
plus bas jamais enregistré), tandis que les alternatives aux
poursuites sont décidées dans deux tiers des contentieux
aujourd’hui et dans les trois quart des cas en 2014. Elles ne sont
le fait que de quelques juridictions et concernent très
majoritairement des usagers de cocaïne ou de crack. On relève
également une stabilisation, voire une baisse des orientations
socio-sanitaires au cours de la dernière période. Derrière cette
terminologie, sont notamment classées les orientations vers les
Consultations jeunes consommateurs (CJC).
Des enseignements importants
Parallèlement, cependant l’OFDT note la progression des « stages stupéfiants », qu’elle qualifie de « réponse pénale hybride ». « L’essor de ce type de mesures, couplé à la baisse des alternatives aux poursuites à dimension sanitaire, semble témoigner d’une nouvelle tendance dans la réponse pénale à l’usage de stupéfiants, abandonnant progressivement la logique dichotomique du soin ou de la peine, au profit de mesures hybrides, couplant sanction et visée pédagogique, avec parfois une ouverture sur le soin, davantage inscrites dans un idéal de responsabilisation des consommateur ». En tout état de cause, cette tendance à la raréfaction des mesures sanitaires individualisées est jugée en « contradiction » avec l’esprit de la loi de 1970 note l’OFDT. De façon plus concrète l’institution estime qu’il faut s’interroger sur la capacité des juridictions à orienter les usagers vers les CJC. Dans le cadre de l’éternel débat sur l’adaptation de notre réponse pénale à l’enjeu majeur qu’est la lutte contre les drogues, ces différentes observations apportent des éléments de réflexion importants.Aurélie Haroche