Loi sur la protection de l’enfance : une réforme a minima ?

Paris, le mercredi 23 juin 2021 – Adopté en Conseil des Ministres et bientôt débattue au Parlement, le projet de loi relatif à la protection de l’enfance est déjà critiqué par les acteurs du système.

A peine né, déjà décrié. L’adoption du projet de loi relatif à la protection de l’enfance, porté par le secrétaire d’État chargé de la famille et de l’enfance Adrien Taquet n’en est qu’à ses balbutiements, puisqu’il n’a été pour le moment qu’adopté en Conseil des Ministres et n’a pas encore été examiné par les parlementaires. Mais cette réforme est pourtant déjà décriée par les professionnels de la protection de l’enfance, qui y voit une réforme a minima, qui ne résoudra pas les principaux problèmes rencontrés par ce secteur en crise.

Selon le gouvernement, le projet de loi Taquet est axé sur plusieurs axes. Il s’agit tout d’abord d’améliorer la situation des enfants placés, en mettant notamment fin à une mesure très décriée, le placement des enfants confiés à l’aide sociale à l’enfance (ASE) à l’hôtel. Une mesure qui concerne, selon le dernier rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) environ 9 000 enfants.

Mieux encadrer l’aide aux mineurs isolés

Le projet de loi vise également à prévenir les violences contre les enfants placés (en encadrant davantage les professionnels intervenant auprès d’eux) et à moderniser et améliorer les conditions de travail des assistants familiaux, en garantissant un revenu minimal pour les familles d’accueil qui prennent en charge des enfants de l’ASE. La réforme souhaite aussi mieux répartir les migrants de moins de 18 ans, appelés mineurs non accompagnées (MNA). Enfin, le gouvernement souhaite également mettre en place un fichier d’aide à l’évaluation de la majorité (AEM) pour éviter que des migrants adultes se fassent passer pour des mineurs et bénéficient de l’ASE.

Pour la plupart des acteurs du système de protection de l’enfance, ce projet se contente de corriger des dysfonctionnements ponctuels, comme le placement des enfants à l’hôtel, sans s’attaquer aux problèmes de fond, notamment le manque de personnels et de budget. Ainsi, la fin du placement à l’hôtel ne s’accompagne d’aucune augmentation de crédits pour les foyers et le gouvernement a abandonné l’idée d’un taux d’encadrement minimal dans les foyers, qui figurait dans le texte initial. Une aberration pour les associations, alors que de tels taux existe par exemple dans les colonies de vacances.

« Personne ne prend en compte l’intérêt supérieur de l’enfant »

Autre problème structurel totalement laissé de côté par la réforme : l’éparpillement des acteurs. L’ASE fait intervenir des associations, les départements ainsi que la justice, chacun revendiquant son indépendance et sa liberté de mener ses actions comme il l’entend. « Toutes ces libertés cumulées ont abouti à ce que l’État soit tenu à l’écart » explique Michèle Créoff, ancienne vice-présidente du Conseil national de la protection de l’enfance, qui dénonce le manque de cohérence et de coordination dans l’ASE.

Mais pour certains experts, les manquements de l’ASE seraient liés à un problème plus profond. La société aurait du mal à accepter et à reconnaitre que certains parents ne peuvent ou ne veulent pas s’occuper de leurs enfants. « Il est très difficile de concevoir que certains parents ne peuvent, ne savent ou ne souhaitent pas s’occuper de leurs enfants » explique Marc Chabant, directeur de la fondation Action enfance.

« Personne ne prend réellement en compte l’intérêt supérieur de l’enfant » déplore Léo Mathey, fondateur du réseau d’entraide Repairs !, qui milite pour que chaque enfant placé soit représenté en justice par son propre avocat et non pas par la structure publique ou privé qui le prend en charge. Une réforme procédurale importante qui ne figure pas dans le projet de loi qui sera débattu en juillet au Parlement.

Nicolas Barbet

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