La difficile prise en charge des consommateurs de crack à Paris

Paris, le lundi 5 juillet 2021 – Alors que la cohabitation entre usagers de drogue et riverains est de plus en plus difficile dans le nord-est parisien, associations et élus locaux de gauche demandent une meilleure prise en charge des toxicomanes.

Le 30 juin dernier, les forces de l’ordre ont évacué les jardins d’Eole, lieu de réunion des consommateurs de crack du nord-est parisien. Une décision prise par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et la maire de Paris Anne Hidalgo après que plusieurs incidents aient récemment opposé les toxicomanes aux riverains (tirs de mortier, agressions au couteau des uns, tirs de mortier des autres…). Pour l’instant, aucun nouveau lieu d’accueil des toxicomanes parisiens n’a été défini, bien que la friche Ordener-Poissonniers dans le 18ème arrondissement ait la préférence de la municipalité.

Cette évacuation des jardins d’Eole survient seulement six semaines après que la place de Stalingrad, « scène ouverte de consommation de drogue » selon la préfecture de police, ait été évacuée et les toxicomanes conduits vers ces jardins. Deux évacuations coup sur coup qui soulignent le problème jusque là impossible à résoudre de la prise en charge des consommateurs de crack, qui sont baladés d’un lieu de consommation à un autre, toujours dans le Nord-est parisien, depuis désormais près de 30 ans, au grand dam des riverains dont la situation ne cesse de se dégrader.

Dans ce contexte, deux tribunes récemment publiées dans Le Monde, l’une par des associations d’aide aux toxicomanes le 26 mai, l’autre par des élus locaux de gauche le 28 juin, appellent à mettre fin à cette politique court-termiste. Selon les auteurs de ces tribunes, il est urgent de mettre en place une politique globale de prise en charge des toxicomanes, plus axé sur la prévention et la réduction des risques que sur la répression. Ils appellent notamment à prendre exemple sur la politique qui a été menée en Suisse et notamment par la ville de Zurich, qui a réussi à mettre fin à une consommation endémique de crack dans les années 1980.

Vers de nouvelles salles de shoot à Paris ?

Plusieurs propositions concrètes sont mises en avant par les auteurs des tribunes. Ils proposent notamment de créer de nouvelles salles de consommation à moindre risque (SCMR), plus connus sous le nom de « salles de shoot ». Paris n’en compte actuellement qu’une seule, contre quatre à Zurich. Les associations et les élus reprennent également à leur compte une proposition faite par la Ville de Paris en 2019, à savoir la création d’un réseau métropolitain de centres de repos, soins et consommation, afin d’éviter que les toxicomanes ne se regroupent en un seul point de la région parisienne. L’objectif de ces différentes mesures est de permettre à la fois une meilleure prise en charge médicale et sociale des usagers de drogue et de redonner de la tranquillité et de la sécurité aux habitants des quartiers concernés.

Le 25 juin dernier, Anne Hidalgo a réaffirmé son engagement pour une meilleure prise en charge de la consommation de crack à Paris, avec la possible ouverture d’une nouvelle salle de shoot à la rentrée. Il faudra pour cela que le Parlement valide la pérennisation des SCMR, puisque l’expérimentation législative, débutée en 2016, prendra fin en 2022. Si le ministère de la Santé s’est dit favorable à cette pérennisation, cela risque d’entrer en contradiction avec le discours plus autoritaire et répressif du ministère de l’Intérieur.

Nicolas Barbet

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