Entre crainte d’un rebond épidémique et confiance dans la vaccination : c’est la rentrée des classes !

Paris, le jeudi 2 septembre 2021 - Le rituel de l’excitation et de l’appréhension n’a nullement été éclipsé par l’épidémie. Ce matin, devant les écoles françaises, si la plupart des enfants arboraient stoïquement leur masque, les conversations étaient plus centrées sur les nouveaux cartables, l’interrogation sur les professeurs et les souvenirs de vacances que sur les conséquences sanitaires de cette reprise de la vie scolaire.

Jusqu’ici…

Le degré de vigilance appliqué vis-à-vis de la Covid dans les établissements métropolitains est de niveau 2. Les dernières évolutions de la situation épidémiologique, avec une diminution depuis quinze jours de l’incidence et depuis près d’une semaine des nouvelles admissions à l’hôpital et en réanimation n’ont pu que conforter l’Éducation nationale dans ce choix. Ainsi, à l’exception du port du masque (à l’intérieur), de quelques précautions concernant le brassage des élèves et le sport en intérieur, la vie scolaire sera quasiment normale, tout au moins en ces premiers jours. Cependant, tout cas de Covid entraînera jusqu’au collège la fermeture de la classe et à partir du collège « l’éviction » des enfants non vaccinés. Pour renforcer la surveillance, 600 000 tests salivaires (pour 6 millions d’enfants…) sont prévus à l’école primaire et deux autotests par semaine pour les adultes. 

Peut déjà mieux faire

Des conditions assez souples qui font sourciller un grand nombre d’épidémiologistes. Il y a déjà une dizaine de jours, plusieurs ont ainsi signé une tribune dans le Monde regrettant une trop grande légèreté. Niveau de vigilance réhaussé, règles plus strictes concernant le brassage et le sport en intérieur, dépistages plus systématisés (au moins une fois par semaine pour tous), capteurs de CO2 et purificateurs d’air manquent cruellement dans la copie de Jean-Michel Blanquer pour ces spécialistes. À ces critiques, le ministre a répondu que le protocole pouvait être adapté en fonction de l’épidémie et que les capteurs de CO2 ou les purificateurs d’air (qui sont encouragés) ne constituent pas la panacée… et ne remplacent en rien le geste simple qui consiste à ouvrir les fenêtres.

Concernant le nombre limité des tests, Gabriel Attal a répondu ce matin : « La société française de pédiatrie ne recommande pas spécialement que l'on fasse des tests systématiques, permanents et que l'on place les enfants dans cette ambiance-là ».

Épidémie pédiatrique ?

Les préoccupations des experts sont liées au variant Delta, dont la contagiosité accrue n’épargne pas les enfants (ce qui mathématiquement peut entraîner une augmentation des formes plus graves dans d’autres classes d’âge) et au fait que les plus jeunes sont mal protégés par la vaccination (et probablement peu par l’immunité naturelle, même si contrairement à Israël, il n’existe pas d’études sur le sujet en France). Ils constatent d’ailleurs qu’à quelques jours de la rentrée les taux d’incidence chez les 0-9 ans ou les 10-19 ans sont bien plus importants que l’année dernière : sept fois plus pour les plus jeunes et quatre fois pour les adolescents. Cependant, chez ces derniers, l’impression doit être nuancée par le fait que les dépistages sont cinq fois plus fréquents. Mais toujours chez les plus jeunes, le fait que contrairement à toutes les autres classes d’âge, l’incidence soit en progression est un signal d’alerte. D’une manière générale, les brassages entraînés dans la société par la reprise de la vie scolaire, la fin des vacances et la diminution du télétravail alertent tant les experts que les autorités sanitaires. Concernant les plus jeunes, la pédiatre Lila Bouadma (Bichat) redoutait il y a quelques jours : « On peut craindre que ce soit une rentrée d'épidémie pédiatrique ».

Stop aux messages alarmistes

Face à ces discours préoccupants, comme toujours depuis le début de l’épidémie, certains s’agacent de voir l’école à nouveau désignée comme un vecteur principal de l’épidémie. Jean-Michel Blanquer ne cesse de marteler, soutenu par certains médecins et scientifiques, que l’école n’est pas un lieu plus « plus propice qu’un autre à la diffusion du virus ». L’Académicien et épidémiologiste Yves Buisson soutient la même position : « Il risque d'y avoir une reprise épidémique à la rentrée, mais ce risque n'est pas spécifiquement lié à la rentrée scolaire. L'école n'a jamais été un foyer majeur de transmission de l'épidémie, pas plus que dans une entreprise par exemple ». Enfin, la présidente de la Société française de pédiatrie (SFP), le professeur Christelle Gras-Le-Guen désapprouve les messages alarmistes : « Il est important de dire aux parents que leur enfant ne court pas un risque parce qu'il va retourner en collectivité. Il faut vraiment les rassurer, le Covid n'est pas une maladie grave pour leur enfant, quand bien même il l'attraperait (…). Il faut rétablir un climat plus serein autour de cette rentrée des classes. J'étais en colère contre cette tribune parue dans Le Monde [appelant à un protocole sanitaire plus strict, N.D.L.R.] justement parce qu'elle était source de tout sauf de sérénité. Nous ne sommes pas complètement inconscients du danger mais il ne faut pas accentuer ce climat alarmiste. Il faut au contraire que les enfants se sentent en sécurité, qu'ils retrouvent une insouciance infantile, indispensable à cet âge ! ».

La vaccination, mais pas de passe sanitaire

Au-delà de ces divergences récurrentes, la vaccination apparaît un point de convergence. D’abord celle des adultes, puisque certains signaux suggèrent que leur vaccination protège les plus jeunes, même si elle n’empêche pas toute circulation. Selon des chiffres présentés par Jean-Michel Blanquer (issues d’enquêtes internes), 89 % des professeurs auraient reçu une première dose, soit une couverture plus élevée que dans la population générale, qui ouvre des perspectives rassurantes. Ensuite, celle des adolescents : elle atteint le niveau élevé et inattendu de 62 % pour la primovaccination. Elle pourrait encore être boostée par les campagnes qui commencent à être organisées par toutes les Académies. À Versailles, Nice, Bordeaux, Lyon ou Amiens, les premières opérations débutent dès aujourd’hui, tandis qu’elles sont différées de quelques jours dans d’autres académies, comme à Paris où le coup d’envoi doit être donné mardi. Beaucoup ont fait le choix de s’associer à des centres de vaccination proches. Quand ils sont trop éloignés, des équipes mobiles ont été sollicitées, qui s’installent dans des « barnums » à proximité. Paris, devrait faire exception, avec des campagnes plus souvent installées à l’intérieur des bâtiments. Mais même si la progression de la couverture vaccinale est affichée comme une priorité du gouvernement, pas question d’imposer un passe sanitaire dans les établissements, comme le souhaiteraient pourtant certains spécialistes, tel Antoine Flahaut. L’égalité dans l’accès à l’école semble en effet inconciliable avec une telle mesure (d’autant plus quand les tests de dépistage deviendront payants).

A.H.

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