
Des patients plus jeunes qu’habituellement
Outre cette crainte concernant le nombre de jeunes patients qui pourraient devoir être pris en charge simultanément et alors que l’épidémie a connu une précocité inhabituelle, les spécialistes observent que les enfants sont beaucoup plus jeunes que lors des épidémies précédentes, quelques jours plutôt que quelques mois. Alors que les experts redoutaient que la « dette immunitaire » liée à la situation de l’hiver précédent, au cours duquel les VRS ont peu circulé notamment grâce aux confinements et aux mesures « barrières » bien appliquées, entraîne une contamination des enfants de quelques mois, mais aussi de deux ans, la part importante des nouveau-nés concernée surprend. Elle préoccupe d’autant plus que les intubations sont plus délicates chez ces très petits. Des analyses virologiques sont en cours pour tenter de mieux comprendre ce phénomène.Des lits qui restent fermés malgré la hausse des demandes
Mais quel que soit l’âge des nourrissons, le risque de saturation est similaire (si ce n’est que des enfants plus jeunes ont plus de risque d’être hospitalisés plus longtemps). Ainsi, le 17 novembre, tous les lits du service de réanimation de l’hôpital Robert Debré étaient occupés, dont la moitié par des enfants atteints de bronchiolite. Même scénario au CHU Brabois dans la banlieue de Nancy et dans un nombre croissant d’établissements en France, qu’il s’agisse de la réanimation ou de la pédiatrie. Il faut dire que dans de nombreuses unités certains lits ne peuvent ouvrir en raison du manque de personnel, même si la pédiatrie n’est pas toujours le secteur le plus touché par les désaffections. On compte par exemple un tiers des lits de réanimation pédiatrique fermé à l’hôpital de Garches (Hauts-de-Seine). Conséquences, les refus de prise en charge se multiplient et des transferts doivent être organisés.Une maladie chronique jamais traitée
Difficile cependant d’incriminer la crise sanitaire. Les
difficultés hivernales en pédiatrie sont récurrentes comme le
résume dans Le Monde, le directeur du pôle enfants-néonatologie du
CHU de Nancy, Cyril Schweitzer : « On a l’habitude de gérer
cette situation de saturation tous les hivers, mais ce n’est pas
pour autant qu’on est équipés pour ». « Ça nous arrive
régulièrement d’être à plus de 100 % de notre capacité d’accueil :
ce n’est plus conjoncturel, ça devient structurel », confirme
Noël Boussard, chef des réanimations. Aussi, on pousse les murs en
déprogrammant certaines interventions et en transférant les plus de
16 ans vers les urgences adultes, solutions que déplorent pourtant
les spécialistes. Cependant, en dépit du caractère chronique de
cette situation, certains craignent que cet hiver où les équipes
seront invitées à renforcer leurs efforts et alors que
parallèlement les urgences en pédopsychiatrie explosent contribue à
des départs massifs. « Tout le monde va serrer très fort les
dents. Mais quand les épidémies hivernales seront terminées,
qu’est-ce qui va convaincre mon personnel pédiatrique de rester
? », s’interroge ainsi à Robert Debré le chef du service des
urgences Luigi Titomanlio.
Aurélie Haroche