
Paris, le jeudi 24 mars 2022 – Tous les indicateurs épidémiologiques concernant la grippe sont en hausse, faisant craindre le risque d’une double épidémie avec la Covid-19.
On l’avait un peu oublié au cours du dernier hiver, lorsque tous les esprits étaient concentrés sur la Covid-19 et que le respect des gestes barrières empêchait son essor. Mais la bonne vieille grippe saisonnière fait depuis deux semaines un retour foudroyant. Selon le dernier bulletin épidémiologique de Santé Publique France publié ce mardi, tous les indicateurs épidémiologiques sont en hausse.
Une épidémie qui reste modérée
Au cours de la semaine 11 (du 14 au 20 mars), le taux d’incidence des consultations pour syndrome grippal a augmenté de 51 % (après avoir augmenté de 95 % la semaine précédente) et le nombre de passage aux urgences pour syndrome grippal de 38 %, atteignant les 6 800. Plus de 720 personnes ont été hospitalisés pour grippe au cours des sept derniers jours, là aussi un chiffre en forte hausse (+ 24 % cette semaine, + 64 % la semaine précédente). Toutes les régions de France métropolitaine ainsi que la Guyane (où le virus tend à moins circuler) sont passés en phase épidémique. SPF le rappelle cependant, l’épidémie actuelle, bien que plus intense que celle de 2020-2021, reste à des niveaux modérés par rapport aux épidémies de 2019-2020 et surtout de 2018-2019, où le taux d’incidence des consultations était trois fois supérieur à ce qu’il était aujourd’hui.
Depuis le début de l’hiver, 195 cas grave de grippe ont été admis en réanimation, dont 20 au cours de la semaine écoulée. On dénombre 180 décès pour lesquels la grippe a directement provoqué ou contribué au décès, 79 % des victimes ayant plus de 65 ans. Au 31 décembre dernier, 51 % des personnes à risque étaient vaccinés contre la grippe. Selon SPF, les premières estimations font état d’un taux d’efficacité du vaccin d’environ 50 % contre l’ensemble des virus grippaux mais de seulement 31 % contre le virus H3N2, en passe de devenir majoritaire en France.
L’épidémie actuelle a la particularité d’être assez tardive. Les précédentes vagues grippales avaient connu leur pic fin janvier-début février. Plusieurs explications sont avancées par les scientifiques pour justifier ce rebond tardif (température plus faible qu’à l’accoutumée, fin des vacances scolaires...) mais sans aucune certitude.
La co-infection, un phénomène rare mais peu dangereux
L’épidémie de grippe rebondit alors même que l’épidémie de Covid-19 progresse également de nouveau depuis plusieurs semaines. Les épidémiologistes et médecins ont longtemps craint les conséquences d’une double épidémie, qui pourraient surcharger les services hospitaliers. Mais l’impact des deux virus sur les hôpitaux est à l’heure actuelle plutôt limitée et le risque de saturation des services de réanimation reste assez lointain.
La circulation concomitante des deux virus créé également le risque d’une co-infection, appelée par certains flurona (contraction de « flu » et de « corona »). Un phénomène rare mais pas nouveau, des cas de co-infection ayant été signalés dès le début de l’épidémie de Covid-19. Selon SPF, au moins 8 cas de co-infection grippe/SARS-Cov-2 ont été détectés, mais le nombre réel est probablement bien supérieur. En effet, les symptômes provoqués par les des deux virus étant très proches, « il est impossible pour un médecin clinicien de détecter une co-infection » estime Vincent Enouf, spécialiste des virus respiratoires à l’Institut Pasteur. Seul un test PCR permet donc de déceler une co-infection. A priori, il n’y a pas lieu de s’inquiéter de ce phénomène : selon une méta-analyse menée en décembre dernier par des scientifiques chinois, la co-infection n’augmenterait pas le risque de formes graves.
Nicolas Barbet