
Paris, le vendredi 1er avril 2022 – Le Sénat publie un rapport d’information rédigé par sa commission d’enquête sur la « situation de l’hôpital et le système de santé en France ».
Ségur : un « palliatif » insuffisant
Si le Sénat reconnaît « l’effort salarial sans précédent » du gouvernement en faveur des soignants hospitaliers, il juge qu’il a été trop tardif. Il souligne également que « le saupoudrage de ces mesures au fil des années 2020 à 2022 et leur extension sans réflexion d’ensemble et par à-coups aux « oubliés du Ségur » auront généré une amertume qui ne tarit pas ».
Pour poursuivre dans la lancée du Ségur, le Sénat propose que les heures supplémentaires et le temps detravail additionnel soient « mieux pris en compte et encadrés, la permanence des soins hospitaliers revalorisée et les conditions d’indemnisation du travail de nuit et le week-end, fixées pour certaines il y a une vingtaine d’années, rehaussées et revues plus fréquemment pour tenir compte de l’évolution du coût de la vie ».
Le Sénat note également, qu’au-delà des salaires, c’est la qualité de vie au travail qui doit être améliorée à l’hôpital. « Ce sont avant tout les conditions de travail dégradées qui génèrent une désaffection préoccupante à l’égard de l’hôpital et risquent de l’entraîner dans une spirale négative » note ainsi la commission qui poursuit : « vétusté des équipements, charge de travail excessive, mais surtout manque de tempsmédical et soignant auprès des patients sont autant de facteurs à l’origine d’un profond sentiment de perte de sens qui provoque des départs de personnels en cours de carrière ».
Pour lutter contre cette désaffection, le Sénat recommande en particulier la délégation des tâches administratives à des secrétaires médicales pour permettre aux médecins et infirmiers de se concentrer sur le soin et que les effectifs d’infirmiers et d’aides-soignants soient significativement renforcés afin d’améliorer les ratios « patients par soignant ».
Le Sénat suggère également de favoriser un meilleur accès à la formation continue et de développer les passerelles entre les professions sur la base d’une « évaluation rigoureuse des compétences acquises ».
Plus d’autonomie et plus de pouvoirs de gestion pour les soignants
Le rapport sénatorial propose, à l’instar des syndicats, de donner davantage de poids aux représentants des soignants dans les instances dirigeantes de l’hôpital, en donnant plus de pouvoir aux CMEet en diversifiant les profils de directeurs (qui pourrait être d’ancien praticien hospitalier).
Le Sénat semble également souhaiter le retour des services à l’ancienne, avec le binôme surveillant général (cadre de santé)/chef de service et un effacement progressif des « pôles ».
Revoir les modes de financement
La commission d’enquête estime aussi nécessaire « de tourner rapidement la page du « tout T2A »et d’accélérer l’expérimentation d’un nouveau modèle de financement des activités hospitalières du champ « médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) ». Elle recommande ainsi la création d’une « dotation populationnelle » à mi-chemin entre la dotation globale et la T2A et de rendre moins contraignant l’Ondam hospitalier.
Le rôle de la ville dans le sursaut de l’hôpital
Un point sur lequel le Ségur c’est peu ou pas étendu intéresse particulièrement le Sénat : le rôle de la médecine de ville dans le désengorgement des hôpitaux.
Comme plusieurs candidats à la présidentielle, la Commission propose ainsi une 4e année d’internat de médecine générale dans les déserts médicaux. Elle imagine également de développer l’exercice infirmier en pratique avancée et des assistants médicaux. Elle précise « les cellules de coordination ville-hôpital ont aussi un rôle important à jouer, en organisant des filières d’admission directe des patients sans passage par les urgences et en préparant leur sortie d’hospitalisation en lien avec le médecin traitant : la commission d’enquête recommande ainsi leur mise en place systématique ». La Commission envisage également de soutenir l’exercice coordonné mais hors des structures trop contraignantes de type CPTS…
Si on ne peut que saluer ces travaux de la chambre haute, l’absence de chiffrage apparente quelque peu l’exercice à un vœu pieux…
F.H.