
Kiev, le mardi 16 août 2022 – Les bombardements autour de la centrale nucléaire de Zaporijia inquiètent en Ukraine mais également en France.
« Chaque jour passé par le contingent russe sur le territoire de la centrale nucléaire de Zaporijia accroit la menace nucléaire pour l’Europe ; si les actions de la Russie conduisent à une catastrophe, les conséquences pourraient toucher ceux qui restent silencieux pour l’instant » a alerté ce lundi le président ukrainien Volodymir Zelensky.
Un avertissement lancé à la communauté internationale alors que la centrale nucléaire de Zaporijia, la plus grande d’Europe, a été la cible de plusieurs bombardements ces deux dernières semaines, les dernières frappes ayant eu lieu ce samedi.
Chaque belligérant s’accuse mutuellement de ces attaques et l’Ukraine reproche à l’armée russe, qui occupe la centrale depuis le 4 mars dernier, de l’utiliser comme une sorte de bouclier afin de bombarder les régions alentour sans crainte de représailles.
Le président ukrainien a d’ailleurs annoncé que l’armée ukrainienne riposterait en cas d’attaque depuis la centrale et a demandé à Moscou de retirer ses troupes de la région.
La situation périlleuse à la centrale de Zaporijia a conduit à une réunion d’urgence du Conseil de Sécurité de l’ONU ce jeudi. A cette occasion, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a une nouvelle fois exhorté la Russie à laisser ses inspecteurs se rendre à la centrale, afin de vérifier si les bombardements ont endommagé l’installation.
« L’heure est grave et l’AIEA doit être autorisée à mener sa mission aussi vite que possible » s’inquiète Rafael Grossi, directeur général de l’AIEA. De leur côté, l’ONU et les Etats-Unis ont demandé la mise en place d’une zone démilitarisée autour de la centrale, mais ont essuyé un refus de la part de Moscou.
2,2 millions de Français vivent près d’une centrale nucléaire
Les tensions autour de la centrale de Zaporijia font renaitre le spectre d’une catastrophe nucléaire de grande ampleur, plus de 35 ans après que l’Ukraine ait été endeuillée par l’accident de Tchernobyl, dans le nord du pays. Le risque nucléaire est également pris très au sérieux en France, notre pays comptant 18 centrales nucléaires.
En mars dernier, au moment de la prise de la centrale de Zaporijia par l’armée russe, le gouvernement français avait demandé aux préfets des zones de défense de vérifier le dispositif de crise en recensant les abris souterrains, en contrôlant les sirènes d’alarme et en vérifiant les stocks de pastilles d’iode et de combinaisons NRBC (nucléaire, radiologique, bactériologique, chimique).
Le plan français de réponse à un accident nucléaire comprend trois niveaux.
Le premier, le plan d’urgence interne (PUI), au niveau de la centrale touchée par l’incident ou l’accident, a pour objet d'une part de protéger le personnel travaillant sur le site nucléaire, et d'autre part, de limiter au maximum les conséquences de l'accident à l'extérieur du site nucléaire.
Le deuxième niveau, le plan particulier d’intervention (PPI), est élaboré pour protéger les personnes vivantes à moins de 20 km de la centrale. En cas d’accident, ces personnes peuvent être invitées à se mettre à l’abri ou à prendre des pastilles d’iode voire même être évacuées. Environ 2,2 millions de Français vivent à moins de 20 km d’une centrale nucléaire.
Enfin, il existe un plan national en cas d’accident de grande ampleur menaçant la santé de tous les Français, qui prévoit notamment des déplacements de population de grande envergure.
Toujours mieux qu’une guerre nucléaire
Signe d’une certaine paranoïa ambiante, des habitants de communes des Vosges ont récemment reçu des courriers de leur mairie les avertissant d’une prochaine distribution de pastilles d’iode, à consommer en cas d’accident nucléaire.
La centrale nucléaire la plus proche, celle de Cattenom, se trouve pourtant à plus de 100 km. Ces courriers sont en réalité le fruit d’une erreur d’interprétation des maires, à qui le préfet des Vosges a simplement demandé, dans le cadre du plan Orsec (organisation de la réponse de sécurité civile), de vérifier si les infrastructures de crise étaient prêtes, comme il le fait tous les 5 ans.
Aussi inquiétant qu’un accident nucléaire de grande ampleur puisse être, ses conséquences seraient bien sûr sans commune mesure avec celle d’une guerre nucléaire.
Selon une étude publiée ce lundi dans la revue Nature, une
guerre totale entre les Etats-Unis et la Russie conduirait
directement à la mort de 360 millions de personnes et plongerait
5,3 milliards de personnes dans la famine, soit les deux tiers de
la population mondiale. De quoi relativiser nos petits tracas du
quotidien.
Quentin Haroche