
L’incidence des AVC a diminué de 42 % au cours des 4 dernières
décennies dans les pays à revenu élevé. Qu’en est-il pour les plus
jeunes (moins de 50 ans) ? Plusieurs paramètres sont à prendre en
compte pour cet état des lieux. Tout d’abord, l’utilisation accrue
de l’imagerie cérébrale (en particulier de l’imagerie pondérée par
diffusion) a donné lieu à de nouvelles définitions des AVC, qui
pourraient avoir entraîné une dérive diagnostique entre l’AIT et
l’AVC.
De plus, étant donné qu’une proportion importante des AVC chez
les plus jeunes correspond à des événements mineurs, les études
avec une détermination moins rigoureuse pourraient minorer les
estimations, tandis que celles utilisant des méthodes de diagnostic
améliorées pourraient à l’inverse les surestimer. Devant ces
incertitudes et pour tenir compte de l’apparente hétérogénéité
entre les études, une revue systématique a cherché à déterminer
s’il existait une divergence en fonction de l’âge de l’incidence
des AVC pour les pays à revenu élevé.
Parmi 50 études menées dans 20 pays, 26 (13 études
prospectives basées sur la population et 13 études administratives)
ont rapporté des données permettant de calculer l’évolution du
rapport des incidences dans le temps (RIT). L’incidence des
AVC a été comparée chez les plus jeunes (moins de 55 ans) par
rapport aux plus âgés (plus de 55 ans) sur 2 périodes ou plus, la
dernière s’étendant au-delà de 2000.
Tendance moins favorable chez les plus jeunes
Les tendances rapportées de l’incidence absolue des AVC
étaient hétérogènes, mais toutes les études ont montré une tendance
moins favorable chez les plus jeunes par rapport aux âges plus
avancés (RIT groupé = 1,57 [intervalle de confiance à 95 % IC
à 95 %, 1,42-1,74]). Le RIT global était cohérent selon le
sous-type d’AVC (ischémique, 1,62 [IC à 95 %, 1,44-1,83] ;
hémorragie intracérébrale, 1,32 [IC à 95 %, 0,91-1,92]; hémorragie
méningée, 1,54 [IC à 95 %, 1,00-2,35]) ; et par sexe (hommes, 1,46
[IC à 95 %, 1,34-1,60]; femmes, 1,41 [IC à 95 %, 1,28-1,55]).
Il était également plus élevé dans les études rapportant des
estimations uniquement après 2000 (1,51 [IC à 95 %, 1,30-1,70]) par
rapport à seulement avant (1,18 [IC à 95 %, 1,12-1,24]), ainsi que
dans les études basées sur la population dans lesquelles la période
de vérification la plus récente a commencé après 2010 (1,87 [IC à
95 %, 1,55-2,27]).
Ainsi, les tendances temporelles de l’incidence des AVC
diffèrent selon l’âge dans les pays à revenu élevé, avec des
tendances moins favorables chez les plus jeunes que chez les plus
âgés, et de manière globalement similaire selon le sous-type d’AVC,
le sexe et le groupe ethnique. Bien que ces résultats puissent
sembler surprenants, une divergence similaire a été rapportée dans
les pays à revenu élevé pour d’autres affections, tel que le cancer
colorectal.
En effet, les facteurs de risque vasculaire ont tendance à
être sous-traités à en deçà d’un certain âge, au moins en partie en
raison de l’utilisation de seuils de traitement basés sur des
modèles de prédiction liés à l’âge. D’autres facteurs de risque
plus prépondérants chez les moins de 50 ans émergent également,
tels que la pollution de l’air, et le stress lié au travail. Quoi
qu’il en soit, ces données soulignent l’importance de mieux
comprendre l’étiologie et d’améliorer la prévention des AVC dans ce
groupe d’âge.
Anne-Céline Rigaud