
Le 14 octobre à Tours, une patiente commet trois agressions
dans la même journée dans une pharmacie, insultant le personnel et
détruisant du matériel. Le lendemain à Toulouse, un homme tente de
braquer une officine et menace la pharmacienne avec un couteau. Des
faits graves et malheureusement pas si rares que cela. Si on parle
régulièrement des agressions de médecins, notamment ceux qui
exercent pour SOS Médecins, les délits à l’encontre des pharmaciens
ne sont pas moins nombreux. Selon le dernier rapport annuel de
l’Ordre national des pharmaciens, publié ce jeudi, 427 vols et
agressions ont été déclarés par des pharmaciens à l’Ordre en
2021.
En hausse depuis cinq ans
Un chiffre en baisse de 27 % par rapport à l’année 2020, qui
avait vu une explosion des cas d’agression dans un contexte
sanitaire tendu, où les pharmaciens s’étaient retrouvés en première
ligne et souvent victimes d’incidents liés au port obligatoire du
masque. Mais cette baisse conjoncturelle cache une tendance à la
hausse sur les dix dernières années.
Les agressions et vols subies par les pharmaciens ont ainsi
augmenté de 40 % depuis 2019 et ont été multipliés par deux depuis
2017 et par trois depuis 2012. Ces chiffres sont cependant à
prendre avec précaution puisqu’il s’agit de déclarations et non
d’un recensement exhaustif des délits perpétrés.
Sur les 427 déclarations reçues par l’Ordre des pharmaciens en
2021, deux tiers concernent des agressions physiques ou verbales et
un tiers de vols. S’agissant des agressions, elles sont fort
heureusement sans gravité aux dires mêmes des pharmaciens dans 97 %
des cas. On note tout de même que deux personnes ont dû être
hospitalisés au cours de l’année à la suite d’une agression en
officine et que 16 agressions avec armes (un chiffre en diminution
ces dernières années) ont eu lieu en 2021.
Le contexte sanitaire reste un important facteur favorisant
d’agressions : 28 % des violences physiques ou verbales sont liées
au port du masque, à la vaccination ou au dépistage. La mise en
place du passe sanitaire en juillet/août 2021 a d’ailleurs provoqué
une flambée de violence dans les pharmacies.
Seulement 44 % des pharmaciens victimes portent plainte
Quant aux vols, qui ont quadruplé en cinq ans, ils sont commis
lorsque l’officine est fermée dans les trois quarts des cas. C’est
généralement de l’argent liquide que les malfaiteurs dérobent : le
vol de médicaments et notamment de stupéfiants ne concerne que 13 %
des cas déclarés. Au prorata du nombre d’officines, c’est
semble-t-il la région Nouvelle Aquitaine qui est la plus dangereuse
pour les pharmaciens, puisque près de 3 % des officines y ont été
victimes d’agressions.
Notons enfin pour terminer ce tour d’horizon que,
contrairement à ce qu’on pourrait penser de prime abord, c’est dans
les villes de moins de 30 000 habitants que les délits sont les
plus fréquents.
L’Ordre des pharmaciens profite de ce bilan pour pousser les
pharmaciens à leur déclarer toute agressions dont ils sont
victimes, notamment afin de pouvoir obtenir un soutien matériel et
moral de la part de l’Ordre via ses « référents sécurité ». L’Ordre
incite également les pharmaciens à porter plainte à chaque fois
qu’ils estiment qu’une infraction est constituée : en 2021, ils
n’étaient que 44 % à accomplir cette démarche.
Quentin Haroche