P. Moulin répond aux allégations de M. de Lorgeril sur les effets néfastes des statines.
Concernant leurs effets secondaires, le risque de myopathies (connu) et de diabète est retrouvé ainsi qu’une très probable augmentation du risque d’AVC hémorragique. L’auteur rappelle cependant que ces risques sont inférieurs aux bénéfices des statines en termes de morbimortalité par baisse des accidents cardiovasculaires majeurs, des AVC ischémiques et des décès (en particulier par morbidité cardiovasculaire). Le bénéfice maximal du traitement dépend du risque individuel cardiovasculaire de l’utilisateur. La baisse d’1 mmol/l de LDL cholestérol diminue de 25 % par an le risque d’accidents cardiovasculaires majeurs.
Par exemple, pour 10 000 patients traités pendant 5 ans par 40 mg d’atorvastatine, on s’attend à 5 cas de myopathies, 50 à 100 nouveaux cas de diabètes, et 5 à 10 AVC hémorragiques, sans impact sur la mortalité. En comparaison, la diminution de 2 mmol de LDL cholestérol chez ces 10 000 patients permet d’éviter 1 500 évènements cardiovasculaires majeurs, 1 000 en prévention secondaire et 500 en prévention primaire (1).
Il n’existe pas d’arguments pour un impact des statines sur le plan cognitif (risque de démence), oculaire (cataracte) ou sur le plan oncologique. Ces risques, retrouvés dans des études d’observation, n’ont pas été mis en évidence dans des études randomisées prospectives contre placebo et seraient liés à des biais méthodologiques. En ce qui concerne le risque cognitif, il existerait même un effet protecteur dans certaines études comme dans l’analyse du registre suédois « very elderly » des plus de 80 ans. Dans une étude taïwanaise portant sur 60 000 patients avec un suivi de 12 ans, de fortes doses de statine ont un effet protecteur avec un odds ratio à 0,7 (2). Par ailleurs, dans ces mêmes études (randomisées contre placebo), le taux d’effets secondaires « mineurs » attribuées habituellement aux statines ne serait pas plus fréquents que sous placebo.
L’impact de ces allégations sur les « pseudo-effets secondaires » des statines pourraient entrainer un arrêt ou une moindre utilisation dans des populations réellement à risque avec des conséquences majeures en termes d’évènements cardiovasculaires.
Dr Caroline Pichard