On ne rappellera pas ici les circonstances de l’attentat de Nice si ce n’est que 86 personnes y sont décédées, dont 10 enfants.
Dix minutes après le début de l’attaque (qui a démarré vers 22h30), dix victimes sont arrivées directement pour des blessures mineures à l’Hôpital Pédiatrique de Nice CHU-Lenval (HPNCL), centre de traumatologie de niveau 1, exclusivement pédiatrique, situé tout près du lieu du drame. Ces premiers blessés ont informé le personnel de la gravité de la situation. Le Plan Blanc a été activé par l'équipe de garde à 22h45. Et, quinze minutes plus tard, trois adultes et une adolescente en situation critique ont été amenés dans des coffres de voitures privées. Plusieurs victimes ont également été transportées par les premières ambulances sans assistance médicale. Puis, en moins de deux heures, 44 patients ont été admis :
- 12 adultes dont 5 en situation d'urgence absolue (4 sont décédés rapidement), 6 en situation d'urgence relative et un en situation d'urgence mineure.
- 32 enfants dont 7 en situation d'urgence absolue (2 sont décédés rapidement), 21 en situation d'urgence relative et 4 en urgence mineure.
La cause des décès a toujours été un choc hémorragique par traumatismes multiples, dont des disjonctions pelviennes, traumatismes crâniens, thoraciques ou abdominaux.
Six interventions chirurgicales ont été effectuées au cours du premier jour dont 3 au cours des 4 premières heures. Treize scanners ont été réalisés entre 0h et 5h du matin, dont 10 corps entiers avec des délais médians de réalisation de 14 minutes. En même temps, des pédopsychiatres et des psychologues sont arrivés spontanément, ou activés par le Plan Blanc, pour prendre en charge les parents des victimes et les témoins.
Le traitement des adultes n'était pas facile pour une équipe pédiatrique, en termes d'équipement et d'approches psychologiques et médicales. En revanche, les salles d'opération, la disponibilité des lits, l'équipement pédiatrique et les compétences étaient suffisants pour le nombre et la gravité des victimes pédiatriques (1).
Des corps ont été coupés, d’autres comprimés ou écrasés. Les personnes présentes ont été prises dans un grand mouvement de foule et ont été confrontées à une menace de mort imminente, à des images d’horreur, ainsi qu’au développement rapide des odeurs des corps éviscérés. Ces facteurs ont induit des symptômes psychologiques spécifiques observés chez un grand nombre d'enfants tels que des réminiscences olfactives, auditives et kinesthésiques, des angoisses majeures de séparation, des réactions d’agressivité.
Le 14 juillet au soir jusqu'à minuit, dix-sept personnes (12 adultes et 5 enfants) ont été officiellement comptabilisées comme venant consulter aux urgences médico-psychologiques du CHU-Lenval, dont 7 ont présenté des états de dissociation post-traumatique (5 mères et 2 pères).
À partir du 15 juillet, l’HPNCL a proposé des consultations de 9 h à 1 h du matin avec un roulement de trois équipes. Cette organisation a été effective jusqu'au 28 juillet. Cette cellule d'urgence médico-psychologique pédiatrique (CUMP) a mobilisé du personnel pédopsychiatrique venu de tout le territoire national qui a travaillé avec l'ensemble des personnels des secteurs basés au CHU-Lenval. Au total, sur la période du 14 au 28 juillet 2016, 227 soignants, dont 51 psychiatres d'enfants et d'adolescents, 55 psychologues, 42 infirmiers, 12 cadres, 30 assistants sociaux et 35 secrétaires ont été mobilisés.
Sept-cent-huit personnes ont consulté à la CUMP pédiatrique, dont 382 enfants (54 %) âgés entre 3 mois et 17,7 ans, 117 parents (81 mères et 36 pères), 6 grands-parents, 13 autres membres de la famille, 145 adultes isolés et 14 membres du personnel hospitalier.
Sur les 708 patients, 576 étaient présents sur la Promenade des Anglais le 14 juillet au moment de l'attaque. Dans l'ensemble, 408 personnes (enfants et adultes) ont été reçues par un binôme de soignants spécialisés en pédiatrie et en psychiatrie (67,7 %) (2).
Une analyse plus fouillée des diagnostics et des conséquences de l’attentat sur le plus long terme est attendue pour bientôt.
Dr Dominique-Jean Bouilliez