CANCER : UNE DIVERTICULOSE A RISQUE

De nombreux auteurs de la littérature se sont prononcés en faveur de la théorie environnementale de la diverticulose colique, avec au premier chef le rôle physiopathologique déterminant joué par la carence en fibres alimentaires. Or, plusieurs études épidémiologiques et géographiques comparatives semblent accorder un profil étiopathogénique superposable au cancer du côlon. La structure très particulière du système de santé suédois, système purement public où les informations médicales concernant l'ensemble de la population sont recueillies sur des registres, a permis à T. Stefansson et coll. d'effectuer une étude "basée sur la population entière" et destinée à tester l'association possible entre les deux affections.

Une étude rétrospective

Il s'agit d'une étude rétrospective portant sur l'ensemble des patients hospitalisés dans la période 1965-1983 pour diverticulose ou diverticulite au sein de la région sanitaire d'Uppsala (population : 1,2 million d'habitants). Les 7159 malades en question (dont 2478 hommes) ont été étudiés au plan de l'incidence du cancer colique jusqu'à l'année 1985, soit une durée moyenne de suivi de 6 ans (extrêmes : 2-20 ans). En excluant de l'analyse les 2 premières années de suivi, les auteurs relèvent que globalement, le risque de cancer colique ou rectal n'est pas augmenté (risque relatif 1,2 et 0,9 respectivement).

Un risque pour le côlon gauche

En revanche, le risque de cancer colique gauche a crû significativement chez les sujets étudiés, par comparaison à l'incidence attendue dans la population générale (risque relatif : 1,8). Cette augmentation de risque a, en outre, été perceptible après stratification par sexe et par classe d'âge. Enfin, le surcroît de risque a augmenté de manière significative avec la durée du suivi (p < 0,001). La présente étude soulève une question d'ordre méthodologique : le fait de connaître chez un patient donné l'existence d'une maladie diverticulaire du côlon représente un facteur potentiel de surveillance plus active du viscère et indirectement de diagnostic plus fréquent ou plus précoce de cancer colique, ce travail endossant les biais classiques d'une analyse rétrospective. Les auteurs répondent à cette objection en avançant l'absence d'élévation du risque pour les autres segments du côlon. De plus, une surveillance du côlon théoriquement plus serrée chez les patients atteints de diverticulose aurait pu avoir un effet de prévention secondaire du risque carcinomateux par la détection des lésions polypoïdes. Au chapitre de la discussion, Stefansson et son équipe énumèrent les arguments théoriques en faveur d'une filiation diverticulose-cancer, filiation dont ils défendent l'existence. Parmi ces arguments, la prolifération bactérienne au sein des sacs diverticulaires avec dégradation de stéroïdes biliaires et formation de carcinogènes ou co-carcinogènes figure en bonne place. Pour conclure, les résultats de l'étude ne semblent pas, aux yeux de T. Stefansson et coll., une raison suffisante pour entamer une politique de dépistage systématique précoce du cancer du côlon "ciblée" sur les sujets atteints de maladie diverticulaire colique.

Serge Dyan

Références
Stefansson T. et coll. : "Increased risk of left sided colon cancer in patients with diverticular disease". Gut, 1993 ; 34 : 499-502.

Tirés à part : Dr T. Stefansson, The Department of Surgery, University Hospital, S-751 85, Uppsala, Suède.

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