Caractéristiques associées à la spondyloarthrite axiale difficile à traiter

Le développement d’un nombre important de thérapies ciblées pour le traitement de la spondyloarthrite axiale (axSpA) n’empêche pas les échecs thérapeutiques, comme c’est le cas dans la polyarthrite rhumatoïde (PR) pour laquelle le concept de « maladie difficile à traiter » (D2T) est apparu pour décrire les patients qui conservent une maladie active malgré plusieurs lignes de traitement.

L’EULAR exige pour ce diagnostic de D2T-PR 3 critères : (i) un traitement selon les recommandations de l’EULAR avec échec d’au moins 2 traitements anti-rhumatismaux modificateurs de la maladie synthétiques ou biologiques (b/tsDMARDS) avec mécanismes d’action différents, (ii) la preuve d’une maladie active, et (iii) une gestion des symptômes et/ou signes de la maladie perçue comme difficile.

Ce même concept pourrait être transposé, avec quelques différences minimes, pour la spondyloarthrite axiale D2T-axSpA, alors définie par l'échec de 3 (b/tsDMARDs) ou de 2 b/tsDMARDs avec des cibles différentes, et manifestations extra-musculo-squelettiques (EMM), concept utilisé par une équipe bisontine menée par Olivier Fakih pour déterminer l'incidence cumulée et identifier les facteurs associés à la D2T-axSpA ainsi que l’impact du caractère D2T sur le risque d’événements cardiovasculaires et de décès en France.

Pour ce faire, ils se sont basés sur les données du Système National des Données de Santé (SNDS), qui comporte les données administratives, les affections de longue durée (ALD), les remboursements de médicaments et les hospitalisations pour 97 % de la population française. Ils ont analysé tous les sujets âgés de 18 ans ou plus, affiliés au régime général, nouvellement bénéficiaires de l'ALD n°27 "spondylarthrite grave" (ayant une maladie supposée active) avec le code diagnostique associé M45 (spondylarthrite ankylosante) entre 2010 et 2013. La date de fin de suivi était le 31 décembre 2018. Le SNDS n'a cependant pas de données sur l'activité de la maladie.

Des résultats cohérents avec la littérature

Après comparaison des caractéristiques entre les groupes D2T-axSpA (défini uniquement par le premier critère, seul disponible dans le SNDS) et non D2T-axSpA, une analyse multivariée ajustée sur l'âge et de la durée d'exposition aux b/tsDMARDs a été réalisée par régression logistique.

Au total, 22 932 patients ont été inclus dont seuls 10 798 (47,08 %) ont reçu au moins un b/tsDMARD pendant la période d'étude. Une uvéite a été observée chez 82 patients (0,36 %), ce qui est peu, mais explicable par l’utilisation d’un algorithme qui ne détecte que les malades hospitalisés. La détection du tabagisme et de l'obésité a également manqué de sensibilité. Les taux des autres comorbidités et des EMM étaient similaires à ceux des études antérieures.

Ce sont 2 115 patients qui ont été classés comme D2T-axSpA, soit 19,59 % des patients ayant reçu au moins 1 b/tsDMARD, auxquels ils ont été comparés pour limiter les biais de sélection.

En analyse univariée, le sexe féminin (OR=1,93, p<0,001), l'atteinte périphérique (OR=1,84, p<0,001), le psoriasis (OR=1,61, p<0,001), le tabagisme (1,47, p<0,001), l'obésité (OR=1,99, p<0,001), l'hypertension artérielle (OR=1,24, p<0,001) et la dépression (OR=2,19, p<0,001) étaient significativement plus fréquents dans le groupe D2T-axSpA. Ces résultats ont été confirmés en analyse multivariée et chez les patients répondant à la définition D2T-axSpA en moins de 2 ans (n=1 826).

Fort heureusement, ces patients ne présentent pas plus d’événements cardiovasculaires majeurs ou de décès à l’issue des 8 ans de suivi. Enfin, les auteurs ont pu constater que les switchers multiples sont plus souvent de sexe féminin, avec des comorbidités ou un psoriasis. L’activité de la maladie est plus importante en cas de dépression ou de psoriasis, et le taux d’adhésion aux anti-TNF est plus faible chez les femmes.

Ces données sont comparables, dans leurs grandes lignes, à celles mises en évidence sur base clinique par une équipe lilloise.

On peut retenir que la D2T-axSpA touche en France un patient sur cinq exposés aux b/tsDMARD, est plus fréquente chez les femmes et chez les patients présentant une atteinte périphérique, un psoriasis et une dépression.

Dr Dominique-Jean Bouilliez

Référence
Fakih O, et coll. La spondyloarthrite axiale difficile à traiter est associée au sexe féminin, à l'atteinte périphérique et aux comorbidités : résultats d'une cohorte nationale de 22932 patients basée sur le SNDS. Session plénière. Congrès de la SFR 2023, du 10 au 12 décembre 2023.

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