
Quand certains parlent encore de conversion hystérique,
neurologues et psychiatres intéressés par la question parlent
aujourd’hui plutôt de « trouble neurologique fonctionnel ».
Cette maladie mal aimée souffre encore de nombreux clichés :
difficile à diagnostiquer, patients compliqués à suivre,
physiopathologie sombre, symptômes incurables etc… Il y a
aujourd’hui un enjeu majeur d’information, et de déstigmatisation,
auprès des patients mais aussi auprès des praticiens. Pourtant ces
troubles sont décrits depuis longtemps, ils sont sévères,
handicapant, souvent chroniques. Ils correspondent à environ 15 %
des motifs de consultation en neurologie.
Un défaut du sens de l’agentivité
Les patients souffrant de troubles neurofonctionnels sont
encore aujourd’hui suspects de simulation. Des données d’imagerie
cérébrale fonctionnelle déjà anciennes permettent pourtant de bien
différencier ces situations (Spence, 2000). Des progrès
considérables ont été faits dans la compréhension du trouble, grâce
à l’apport conjoint des sciences cognitives et de l’imagerie
cérébrale fonctionnelle. On considère aujourd’hui qu’un défaut du
sens de l’agentivité des actions est à l’origine de la production
des symptômes. Autrement dit, lorsqu’un patient souffre par exemple
de mouvements anormaux fonctionnels, il ne perçoit pas ces
mouvements comme émanant de sa propre « volonté
».
Un modèle bio-psycho-social
Il est aujourd’hui clair que les troubles neurofonctionnels ne
sont pas particulièrement liés à la personnalité histrionique.
Lorsqu’un trouble de personnalité peut être identifié, il s’agit
souvent d’une personnalité obsessionnelle, ou d’un trouble de
personnalité de type « état limite ». Un antécédent
neurologique est souvent retrouvé : épilepsie, traumatisme crânien,
ou encore anomalies à l’IRM cérébrale. Un évènement est souvent
associé au déclenchement de la maladie : une blessure, une maladie
grave, un traumatisme psychique, une forte émotion.
En guise de « bénéfice secondaire », on retrouve en
réalité souvent une situation complexe et angoissante qui vient
pérenniser le trouble, comme par exemple une procédure judiciaire
en cours.
L’annonce du diagnostic, et son explication est capitale dans
le traitement. Un site internet destiné aux patients existe :
http://neurosymptoms.org/. L’idée
est que le patient intègre qu’il ne s’agit pas d’une simulation,
qu’il s’agit bien d’une maladie liée à un problème fonctionnel au
niveau cérébral, dans lequel vont intervenir des facteurs
biologiques, psychologiques et sociaux. Dans les cas des crises non
épileptiques psychogènes (CNEP) par exemple, cette étape permet de
faire disparaitre les crises dans un tiers des cas !
Dr Alexandre Haroche