COMPLICATIONS : LES ANTICOAGULANTS AUX PREMIERES LOGES

Le syndrome dit des loges est lié à une augmentation de pression à l'intérieur d'un compartiment peu extensible et conduit à l'installation d'une ischémie avec ses conséquences douloureuses et fonctionnelles.

Les anticoagulants sont utilisés pour prévenir ou traiter des thromboses veineuses et augmentent le risque hémorragique après un traumatisme mineur : ils représentent théoriquement un facteur de risque de saignement à l'intérieur d'un compartiment clos. Cette complication avait déjà été signalée mais uniquement après ponction artérielle pour gaz du sang.

Des loges sous pression

N.M. Hay et coll. rapportent à cet égard sept observations de syndrome de loge survenu chez des patients traités par anticoagulants.

Il s'agissait de six hommes et d'une femme âgés de 22 à 71 ans : 5 étaient sous warfarine depuis 3 à 8 ans, 3 sous héparine de façon récente pour suspicion de phlébite (diagnostic non confirmé). Dans un seul des 7 cas, un surdosage était présent avant l'accident.

Les compartiments concernés étaient 3 fois la loge antéro-externe, 2 fois la partie antérieure de la cuisse, 2 fois le mollet (1 fois la loge profonde, 1 fois la loge superficielle), 1 fois la loge antérieure de l'avant-bras.

Les symptômes étaient habituels : douleur et tuméfaction dans tous les cas, paresthésies deux fois, hypoesthésie ou dysesthésie au tact ou à la piqûre dans trois cas, paralysie motrice deux fois. Les traumatismes initiaux étaient mineurs sauf dans un cas (fracture du péroné non déplacée).

Les pressions intra-compartimentales étaient élevées dans 5 cas sur les 6 où elles ont été mesurées.

Une évolution pas toujours heureuse

Un acte chirurgical a été nécessaire 4 fois, 12 heures à 7 jours après le début des symptômes. L'évolution a été marquée par la régression complète des symptômes dans 5 cas, et des séquelles motrices relativement importantes deux fois (deux cas n'ayant pas fait l'objet d'un traitement chirurgical et de diagnostic tardif).

Chez les trois malades ayant reçu de l'héparine pour une suspicion de thrombose veineuse, 2 fois le compartiment intéressé était la loge postérieure de jambe, 1 fois la loge antéro-externe : un patient a été opéré et un seul traité médicalement a vu ses symptômes disparaître totalement.

Enfin lorsqu'une intervention a été réalisée, la présence de sang a été notée. Dans un cas non opéré, c'est la mise en place du cathéter de mesure de pression qui a permis le retrait de 65 ml de sang et donc la réduction de la pression intra-compartimentale.

Un diagnostic à évoquer

Cette complication des traitements anticoagulants n'est pas habituelle. Elle doit être connue et surtout reconnue car elle justifie une hospitalisation immédiate pour surveillance, mise au repos et souvent traitement chirurgical.

Des trois patients suspects de thrombose veineuse, aucun n'en était atteint. Or, il est probable que pour au moins deux d'entre eux, il s'agissait déjà d'un syndrome de loge qui a été nettement aggravé par la mise sous héparine. Il est donc essentiel d'être certain du diagnostic lésionnel avant de commencer un traitement anticoagulant.

Ces observations, survenues spontanément lors de ce type de traitement, sont les premières rapportées mais cette complication est probablement beaucoup plus fréquente.

Didier Alcaix

Hay N.M. : "Acute compartment syndromes resulting on anticoagulant treatment". Br.Med.J., 1992 ; 305 : 1474-1475.

Tirés à part : Dr Allen - Leicester Royal infir

ALCAIX DIDER

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions

Soyez le premier à réagir !

Réagir à cet article

Les réactions sont réservées aux professionnels de santé inscrits et identifiés sur le site.
Elles ne seront publiées sur le site qu’après modération par la rédaction (avec un délai de quelques heures à 48 heures). Sauf exception, les réactions sont publiées avec la signature de leur auteur.


Lorsque cela est nécessaire et possible, les réactions doivent être référencées (notamment si les données ou les affirmations présentées ne proviennent pas de l’expérience de l’auteur).

JIM se réserve le droit de ne pas mettre en ligne une réaction, en particulier si il juge qu’elle présente un caractère injurieux, diffamatoire ou discriminatoire ou qu’elle peut porter atteinte à l’image du site.