
Paris, le samedi 12 décembre 2021 – Certaines des errances,
parfois gravissimes, de la hiérarchie ecclésiastique et de l’Eglise
en règle générale, poussent beaucoup de ceux que la foi catholique
anime pourtant à considérer que ce n’est pas nécessairement en son
sein que l’on appliquera le plus absolument les principes des
Evangiles. C’était ainsi la conviction de Michel
Aupetit.
« Quand j’étais petit, je voulais être médecin. Je ne sais
pas pourquoi, certainement pas par mimétisme, car il n’y avait pas
de médecin dans ma famille. Puis, une fois médecin, je ne pensais
pas être prêtre : je pensais que le médecin avait plus de chance
d’apporter l’Évangile au monde, puisqu’il touchait un public
varié » avait-il ainsi confié au Quotidien du médecin en 2018
alors qu’il venait d’être nommé archevêque de Paris. Aujourd’hui,
alors que poussé par une tempête médiatique, il vient de présenter
sa démission au Pape, celui qui a toujours été plus à l’aise avec
les fidèles qu’avec les autorités civiles et religieuses, doit
probablement repenser au médecin qui servait l’Evangile en soignant
la souffrance.
D’un appel à l’autre
Pourtant, celui qui a toujours été habité par une foi profonde, héritée de sa mère qui était la seule personne croyante dans sa famille, ressent un « appel » plus fort que celui de la médecine et décide à près de 40 ans d’abandonner son cabinet de médecin généraliste à Colombes et d’entrer au séminaire. Vingt ans auparavant c’est avec la même détermination qu’il avait suivi des études de médecine, passant notamment pendant son internat par les hôpitaux Bichat et Necker. Médecin dévoué à sa patientèle présentant un visage socio-économique contrasté, il s’engage notamment auprès des malades en fin de vie, et saluera alors qu’il est déjà devenu prêtre le consensus de la loi Leonetti de 2005, mais regrettera les évolutions suivantes. Il vivait la médecine comme un sacerdoce, une vocation, à la manière des autres appels qui ont bouleversé sa vie et était très attaché aux liens de confiance entre lui et ses patients. Mais au printemps 1990 « J’ai frappé à la porte de l’Église. C’était en mars. On m’a dit que si je devais rentrer au séminaire, c’était en septembre. Ce fut rapide ! J’ai quand même pris le temps de prévenir ma patientèle, que ma remplaçante habituelle a reprise (…). Par la suite, devenu évêque de Nanterre, je revoyais parfois mes anciens patients de Colombes. C’était drôle ! » avait-il raconté au Quotidien du médecin.Une carrière fulgurante stoppée nette
Après une carrière fulgurante, le voyant passer de vicaire à Saint-Louis-en-L’île en 1995 à évêque en 2013 puis archevêque en 2018, il continue à s’intéresser prioritairement au sort des malades (multipliant les célébrations de guérison), à la souffrance et aux questions de bioéthique. Mais en cette fin d’année 2021, à travers notamment un reportage du Point, ses méthodes autoritaires lui sont reprochées et plus encore une liaison « privilégiée » avec sa secrétaire. S’il ne reconnaît aucune relation charnelle avec cette dernière, celui qui n’a prononcé son vœu de chasteté qu’à l’âge de 40 ans, a néanmoins admis un comportement « ambigu ». Sa démission présentée à la suite de cette révélation vient d’être acceptée par le Pape.Pragmatisme pour ceux qui ne peuvent être fidèles
Celui qui avait tenu une position très dure vis-à-vis de la
loi sur le mariage homosexuel (n’hésitant pas à considérer qu’une
telle évolution pourrait ouvrir la voie à l’acceptation de
l’inceste) se montrait plus pragmatique en ce qui concerne le port
du préservatif. Il défendait ainsi dans le Quotidien du médecin sur
ce sujet controversé au sein de l’Eglise : « Ma position a
toujours été claire : il faut éviter de transmettre le danger. Mais
le principe le plus sûr demeure une vie bien ordonnée : si vous
êtes fidèle dans le mariage, comme le préconise l’Église, vous ne
risquez pas de transmettre le sida. En revanche, si on a affaire à
quelqu’un qui ne veut pas vivre cela, on doit protéger la société.
En Afrique, l’Église avait mis en place le principe « ABC », qui
signifiait Abstinence, Be Faithfull, Condom, en fonction de ce que
les gens sont capables de vivre ».
Des déclarations du Dr Aupetit qui résonnent aujourd’hui d’une
façon singulière.
A.H.