Selon l'Académie Nationale des Sciences, le régime alimentaire pourrait avoir une influence sur la survenue de certains cancers. Or, les sujets ayant subi une gastrectomie subtotale ont un régime alimentaire modifié directement, car cette intervention agit sur l'absorption, et indirectement, car elle oblige les patients à une alimentation permettant d'éviter les troubles digestifs.
L'équipe américaine du registre des cancers touchant les japonais d'Hawaï a donc suivi de façon prospective 6 161 patients de sexe masculin à estomac intact et 412 gastrectomisés pour ulcère (226 ulcères gastriques,131 ulcères duodénaux et 55 autres non précisés) pour déceler le développement éventuel d'un cancer.
Sur le plan alimentaire, les gastrectomisés ont des ingesta identiques à ceux des sujets normaux mais ont un poids corporel plus faible et des taux de cholestérol et triglycérides abaissés. Si on considère l'ensemble des cancers, le risque relatif a été augmenté chez les gastrectomisés uniquement pour les cancers du côlon (P < 0,008) et de l'arbre bronchopulmonaire (P < 0,002).
Les études de séries ont montré que ces patients ont eu une consommation d'alcool et de tabac supérieure à celle des sujets ayant un estomac sain mais l'association aux cancers bronchopulmonaire et colique a persisté après ajustement pour le tabac et l'alcool. Aucun cancer gastrique n'a été noté dans cette série, mais cela peut être dû à la durée relativement courte du suivi.
Le type de l'anastomose n'a pas influé sur la survenue de cancer.
Chez le gastrectomisé, la dénutrition peut donc favoriser certains cancers mais il est probable que d'autres facteurs entrent aussi en jeu : perturbations du métabolisme de l'alcool avec disparition du first-pass, négativation de l'équilibre calcique déjà diminué dans cette population, modifications de la microflore gastrique et intestinale et des sécrétions neuro-endocrines.
Selon les auteurs, la gastrectomie subtotale semble associée à une augmentation peu marquée mais significative des cancers du côlon et du poumon, notion inhabituelle jusqu'alors. Les biais d'une telle étude sont cependant nombreux et incitent à la méfiance en attendant de nouvelles études confirmant ou infirmant ces données.
Diana Thierman-Duffaud
