
Londres, le samedi 6 juin 2015 – La série télévisée britannique W1A se plaît à dénoncer les travers de l’institution nationale qu’est la BBC. Comme nous le révèlent Juliette Perrot et Loïc de la Mornais, envoyés spéciaux de France 2 à Londres, un des épisodes moque l’obsession de la BBC quant à la représentation à l’écran de la "diversité". C’est ainsi que l’on voit le présentateur de la météo, Muslim Sadiq Iqbal, menacé de licenciement parce qu’il projette de se faire raser la barbe !
Handicapé et passionné par la météo
Aujourd’hui, certains estiment que la réalité est en passe de dépasser la fiction. La semaine dernière, la BBC diffusait en effet une offre d’emploi d’un genre un peu particulier. « Vous souhaitez partager votre passion pour la météo en présentant des bulletins ? Vous avez un handicap ? Actuellement, la BBC n’a pas de présentateur météo handicapé et nous cherchons activement à améliorer notre diversité à l’écran ». Pour postuler, il faut présenter un « intérêt pour l’environnement » et « beaucoup d’enthousiasme » (on relèvera que cette absence d’obligation de qualifications n’est pas propre à cette recherche d’emploi particulière mais est le reflet d’une attitude britannique où la personnalité et l’énergie sont parfois préférées à l’importance des diplômes). Très vite, cette annonce a provoqué un tollé. Beaucoup ont ironisé sur cette nouvelle manifestation de "discrimination positive". Peu amène pour le peuple britannique, un utilisateur de Twitter lançait : « La BBC veut que la « main d’œuvre soit le reflet du Royaume Uni » (…) Elle devrait aussi recruter des présentateurs obèses et racistes ». Face à l’avalanche de réactions, pour la plupart négatives, la BBC a tenu à nuancer. Elle a tenu à préciser qu’elle n’était pas à la recherche « d’un présentateur météo handicapé » à tous prix, mais qu’elle souhaitait « offrir de nouvelles opportunités aux personnes en situation de handicap et qui sont passionnés par la météo ».
Un peu plus que de simples mots
Les principes qui régissent la "discrimination positive" peuvent être l’objet de critiques, dont certaines sont fondées. Néanmoins, on ne peut que louer le volontarisme de la BBC quand aujourd’hui l’action en faveur de l’insertion des handicapés se nourrit principalement de déclarations d’intention. Résultat : la représentation des personnes handicapées dans les médias reste très faible. Un rapport du Conseil supérieur de l’audiovisuel avait ainsi révélé l’année dernière qu’en France sur 1 500 heures de programme, seulement 0,4 % des personnes identifiées sont handicapées. Pour faire évoluer cette situation, une charte avait même été adoptée en 2014, destinée notamment à améliorer l’accessibilité des personnes handicapées aux écoles de journalisme et d’audiovisuel. Des déclarations d’intention qui pourraient ne pas être immédiatement suivies d’effets et qui n’auront probablement qu’un faible impact sur la peur de la stigmatisation qui freinent un grand nombre d’handicapés et la crainte des réactions négatives des téléspectateurs qui bloquent les chaînes de télévision. Dans ce cadre, une action telle celle de la BBC peut apparaître plus dynamique et directe. Tous d’ailleurs ne se sont pas associés à la levée de boucliers. Responsable de l’association suisse de défense des personnes handicapées Pro Infirmis, Benoît Rey s’enthousiasme sur le site helvète de 20 minutes : « C’est une excellente initiative. Le plus grand problème des gens handicapés, ce sont les préjugés. Pour les combattre, il faut de la visibilité » observe-t-il.
Aurélie Haroche