
Genève, le mardi 27 janvier 2015 - Le 8 août 2014, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) mettait en branle sa riposte à l'épidémie d’Ebola et décrétait une « urgence de santé publique de portée internationale ». Dimanche 25 janvier, alors que l’on constate le reflux de l’épidémie, l’heure des comptes a semble-t-il sonné pour l’OMS !
Ainsi la réunion extraordinaire qui s’est tenue ce jour a viré à l’auto critique généralisée. Margaret Chan, a ainsi estimé qu’en dépit d’une pause dans l’évolution de l’épidémie il n’y avait plus « place à la complaisance » et a reconnu que l’organisation avait été lente à réagir et que cela devrait lui servir de leçon pour l’avenir.
Nous devons avoir honte !
Lors des débats du conseil exécutif, certaines critiques ont été acerbes : « nous devons avoir honte, car nous avons fait beaucoup trop peu ! » a déclaré le représentant de la Grande-Bretagne avant que l’Américain assène « l'OMS que nous avons n'est pas l'OMS dont nous avons besoin pour répondre aux urgences ». « Cela n'aurait pas dû se passer de cette façon. Cela ne doit plus se reproduire. Nous espérons que des solutions vont combler les lacunes et les failles », a enfin commenté la porte-parole de la Sierra Leone.
Les raisons d’un « échec »
Rôles techniques et normatifs qui ont pris le pas sur les aspects opérationnels, nominations dans les bureaux nationaux de l'OMS sur des critères plus politiques que techniques, manque d'harmonisation et de coordination aux différents niveaux nationaux, régionaux et global de l'organisation, lacunes dans la gestion des ressources humaines, manque de flexibilité et de réactivité face aux urgences, lenteur dans la disponibilité et l'allocation des financements ont été les causes de ces dysfonctionnements selon les participants à cette réunion.
Après Ebola, quel avenir pour l’OMS ?
La résolution adoptée par le conseil exécutif a tout de même confirmé (dans le langage qu’on lui connaît…) le « rôle central et spécialisé joué par l'OMS dans la préparation et la riposte aux urgences ». Elle avance d’autre part un certain nombre de préconisations allant dans le sens d'une plus grande autorité du siège et « l'accélération de la réforme en cours de l'organisation ». Elle « invite la directrice générale à envisager de nommer immédiatement, à l'issue de la session spéciale et pour la durée de l'épidémie, un représentant spécial avec le grade et l'autorité appropriés pour prendre la responsabilité de tous les aspects de la coordination aux trois niveaux [national, régional et mondial] et de la riposte à l'actuelle épidémie d'Ebola ». Elle « réaffirme l'autorité de la directrice générale pour réallouer les ressources existantes, en tant que de besoin [sans] compromettre les priorités de programmes ».
Concrètement cette résolution va se traduire par plusieurs mesures : la mise en place d'un « fonds de réserve » d'un montant de l'ordre de 100 millions de dollars et d’une « force de réserve en santé publique mondiale » et d'une évaluation de l'action menée depuis le début de l'épidémie par un panel d'experts indépendants.
Demeure le constat inquiétant que l'épidémie peut redémarrer, en particulier durant la prochaine saison des pluies. « De nouveaux cas pourraient réapparaître à la suite d’une négligence, d’un enterrement ou d’une forte résistance communautaire », a en effet conclu Margaret Chan.
Frédéric Haroche