
Genève, le jeudi 5 février 2015 – Sur le front d’Ebola tout au moins, le mois de janvier avait été une période marquée par l’optimisme. Tandis que passaient les semaines, le nombre de nouveaux cas recensés ne cessait de diminuer. Les dernières informations étaient des plus rassurantes : moins de cinq cas avaient été déplorés au Liberia, une chute si forte qu’on ne trouvait même plus assez de patients pour participer aux essais cliniques récemment lancés !
Pourtant, l’ensemble des spécialistes appelaient à la prudence face à cette décrue. « La situation n’est pas stable. Il va être compliqué de dire quand ce sera fini » alertait par exemple dans les colonnes de Libération, le codécouvreur du virus, Peter Piot. D’autres remarquaient que des discours trop optimistes risquaient de créer un faux sentiment de sécurité auprès des populations et notamment inciter à la reprise de pratiques funéraires dangereuses et jamais totalement abandonnées.
Les voisins de la Guinée de nouveau sur le qui-vive
Les chiffres publiés hier par l’Organisation mondiale de la Santé leur ont hélas donné raison. Dans les trois pays concernés par l’épidémie, une hausse du nombre de cas a été constatée au cours de la dernière semaine de janvier. La hausse est la plus forte en Sierra Leone avec quinze cas supplémentaires (80 contre 65), tandis que la Guinée enregistre neuf malades de plus (39 contre 30) et le Libéria cinq contaminations, contre quatre la semaine précédente. Les experts de l’OMS ont pu identifier que les rites funéraires sont encore et toujours en cause dans cette nouvelle hausse. Ils évoquent notamment comment onze personnes ont été contaminées en Guinée après avoir assisté aux funérailles d’une victime d' Ebola. Second motif d’inquiétude concernant cette série de cas, elle a été rapportée dans une région proche de la Côte d’Ivoire. D’une manière générale, cette nouvelle alerte en Guinée sonne comme une piqûre de rappel pour tous les pays voisins, dont le Mali à la frontière duquel plusieurs cas ont été rapportés.
Un combat loin d’être gagné
Mais c’est plus encore la Sierra Leone qui concentre les inquiétudes des experts. Dans ce pays où 3 276 personnes au moins sont mortes, la capitale demeure très exposée (avec 22 cas recensés la semaine dernière contre 20 à la mi janvier), tandis que le district voisin a également connu une augmentation importante du nombre de nouveaux malades. L’ensemble de ces données incite l’OMS à une sévère constatation. « La résistance persistante des communautés, la progression géographique en Guinée et la large propagation en Sierra Leone, ainsi que cette hausse des cas montrent que la lutte contre Ebola se heurte encore à de sérieux défis » a souligné l’agence onusienne, qui il y a quelques jours, reconnaissait officiellement avoir tardé à comprendre la gravité de la situation et qui semble aujourd’hui déterminée à ne pas affaiblir sa vigilance. Espérons qu’à la lumière de cette réaction de l’OMS, cette augmentation du nombre de patients entraîne des réponses immédiates, empêchant que ce léger pic ne se transforme en nouvelle flambée. Il faudra pour cela que la mobilisation de la communauté internationale reste sans faille. Or cette dernière n’aurait pas toujours été fidèle à ses promesses : une étude publiée dans le British Medical Journal s’appuyant sur les chiffres du Bureau de coordination des affaires humanitaires a en effet révélé que sur les 2,9 milliards de dollars promis, seuls 40 % ont été à ce jour effectivement versés aux états concernés.
Aurélie Haroche