Eloge de la clinique

Paris, le samedi 19 novembre 2016 – Il y a ceux qui fustigent la détérioration des liens entre les patients et leurs médecins. Et il y a ceux qui avec patience et détermination rappellent le caractère essentiel du rapport singulier et unique, profond et presque intime que l’on noue avec le malade. En décembre dernier, le Lancet accordait le Prix Weakley à un texte rappelant la nécessité de ne jamais considérer comme superfétatoire certains "détails" essentiels de la vie des malades. Lifelines racontait l’histoire de Martin. Martin admis dans un service de gastroentérologie, nécessitant une ligne de nutrition parentérale. Martin qui après des semaines d’une observance et d’une attention parfaites, décroche un jour son cathéter veineux central. Quel événement avait pu entraîner un tel bouleversement dans l’attitude du patient ?

Le dérangement d’un vieil appareil téléphonique dans le couloir de l’hôpital, un appareil téléphonique utilisé chaque vendredi à la même heure par Martin pour prendre des nouvelles du fils d’un vieil ami. Une ligne qui le reliait à la vie. Pour le professeur Claude Matuchansky, à l’origine de ce récit poignant, l’histoire de Martin illustre comment la technicité extrême de la médecine ne saura jamais remplacer le recueil d’informations aussi essentielles, celles tenant la ligne de vie d’un homme.

Pour le JIM, il revient sur cette dimension à travers un vibrant mais précis éloge de la clinique. Essentiel.


Par le Pr Claude Matuchansky*

Est-il plus bel éloge de la médecine clinique, en cette année 2016, que le succès, auprès du grand public, de "Médecin de campagne", le très beau film de Thomas Lilti ? Le dévouement, l'humanité et la compétence du Dr Werner, magnifiquement incarné par François Cluzet, y font écho, près de deux siècles plus tard, aux qualités du Dr Benassis, héros de l'admirable roman de Balzac, "Le médecin de campagne", écrit en 1833.

Mon propos ne sera pas de désigner la clinique comme sacro-sainte ou dépositaire d'une vérité éternelle, mais de dire qu'elle est indispensable à la délivrance d'une médecine à dimension humaine, d'une médecine de la personne.

Loin d’être une vieille dame…

La médecine clinique est tout à la fois ancienne et moderne, mais n'est pas, loin s'en faut, une vieille dame. Née dans sa conception anatomo-clinique actuelle à la fin du 18e siècle en Europe et singulièrement en France,1 elle a su depuis, en effet, s'adapter aux nouvelles technologies et progrès médicaux : elle a notamment su intégrer ces progrès dans des algorithmes cliniques, maintenant largement diffusés et utilisés par les praticiens, algorithmes alimentés par la "médecine fondée sur les preuves" et conformes aux données les plus actuelles de la "science médicale".

Gare à la dématérialisation de la médecine

Quelques éléments d'analyse de l'actuelle et future médecine clinique sont utiles à rappeler, compte tenu des assauts dont elle fait l'objet. L'avenir, pour certains futurologues, pourrait, en effet, être celui d'une médecine sans médecins, dématérialisée, et remplacée par une "média-médecine", celle des "bio-progressistes" par opposition aux cliniciens "bio-conservateurs", média-médecine alimentée par les NBIC (nanotechnologies, biotechnologies, informatique, sciences cognitives) et allant jusqu'à conduire, à terme, à la "Mort de la mort"2. Pour d'autres, plutôt que d'un grand remplacement, d'une substitution, il s'agira, grâce à la média-médecine,  « …d'une redistribution des cartes des métiers de la santé dans laquelle le médecin prendra toute sa place d'expert, mais rien que sa place d'expert au lieu de continuer à jouer avec les instruments…qui ont conduit à la perte inexorable du "bon docteur"… »3,4. Certes, la télémédecine, le téléconseil voire la téléconsultation, sources d'une "réalité médicale virtuelle" chère aux férus d'informatique, peuvent-elles avoir une place dans des circonstances bien précises (isolement, résolution à distance de questions de grande urgence, avis ou second avis à distance sur des dossiers cliniques, d'imagerie ou de biotechnologies médicales), mais elles ne sauraient se substituer régulièrement à la consultation clinique "physique" et au précieux colloque singulier, menacé, parfois contesté mais toujours présent. On ne dématérialise pas la clinique comme on le fait d'une feuille de déclaration d'impôt. Cette médecine futuriste sans le corps, magistralement annoncée et analysée par Didier Sicard5 est-elle une évolution irrémédiable, ou faut-il, plutôt, savoir y résister ?

L’indispensable auscultation

La médecine clinique est une médecine incarnée où l'écoute6 -outre le classique interrogatoire, mais aussi l'examen physique gardent une place essentielle : certains médecins "bâclent" voire omettent l'examen physique parce que, trop souvent négatif, consommateur de temps et guère moderne, il contribuerait peu au diagnostic ; en fait, même négatif mais soigneux et éventuellement répété à court terme, il oriente la prise de décision ! Outre le lien qu'elle établit avec le patient, la clinique reste un temps diagnostic essentiel dans des disciplines aussi variées que, par exemple, la médecine générale et la médecine interne, la dermatologie, les urgences, l'ophtalmologie, l'ORL, la stomatologie, la neurologie, la gériatrie, les soins palliatifs, la chirurgie viscérale ou la chirurgie orthopédique. Une récente étude nord-américaine rapporte qu'une insuffisance de l'examen physique était la cause du retard ou de l'omission diagnostique dans 2 cas sur 3 d'une série de plus de 200 patients ayant connu un problème diagnostic7.

Clinique et technique, main dans la main

La clinique ne s'oppose pas aux technologies médicales les plus nouvelles : elle est un filtre personnalisé de leurs indications. Ainsi les meilleurs cliniciens ne sont-il pas avares, si nécessaire, de demandes d'examens paracliniques (qu'il s'agisse de techniques avancées d'imagerie ou de biotechnologies incluant la génomique),  mais ils savent les sélectionner et les hiérarchiser selon l'individualité du patient. Inversement, les patients, bien qu'eux-mêmes souvent demandeurs d'examens paracliniques, s'étonnent parfois d'avoir été peu examinés ("auscultés") cliniquement, même par de "grands spécialistes". Les enseignants des facultés de médecine ont là une responsabilité pédagogique importante, que les pays anglo-saxons les plus avancés en matière de technologies médicales s'efforcent pourtant de conserver. Le raisonnement clinique, ancré de nos jours sur la "médecine basée sur les preuves" inclut aussi la gestion de l'incertitude, quoiqu'en disent les plus fervents adeptes de la médecine scientifique : l'observation médicale et l'empirisme n'étaient-ils pas, pour Claude Bernard, des points d'appui nécessaires à la médecine scientifique ?8  Cette tolérance de l'incertitude est encore confirmée par une récente Perspective du New England Journal of Medicine, journal de pointe "hypersélectif" s'il en est, publiant les données les plus évaluées et pertinentes de la "médecine basée sur les preuves" : la gestion de l'incertitude y est potentiellement jugée comme un élément d'une prochaine révolution médicale9. De même, dans les meilleures revues médicales internationales, la clinique continue d'avoir une large place, notamment au sein d'articles de synthèse et de cas cliniques qui se veulent pédagogiques en matière de raisonnement médical.

Des défis multiples mais pas insurmontables

Bien sûr, la clinique a ses défis, tels que sa désignation fréquente comme une routine dépassée (parfois même par certains cliniciens épris de futurologie), tel que le temps (en France la durée de consultation des généralistes est le plus souvent [dans 39 % des cas] de 15 à 18 minutes, et de 20 à 24 minutes dans près de 20 % des cas 10. Aux Etats-Unis, l'écoute initiale du patient, pourtant si essentielle, est "redirigée" par le médecin après 23 secondes en moyenne !11), ou tel que la désertification médicale de certains territoires régionaux. Ces défis ne sont pas sans solutions (certes jugées éculées par d'aucuns) permettant de les relever, au moins partiellement : relèvement du numerus clausus, valorisation de l'enseignement et du raisonnement clinique dans les études et les revues médicales générales ou spécialisées, revalorisation de l'acte clinique délivré notamment par les médecins généralistes et les médecins internistes, développement et encouragement des groupes et maisons médicales pluridisciplinaires. En définitive, défendre la médecine clinique dans son existence, ce n'est pas soutenir des routines dépassées ni contester, dans un esprit conservateur "anti-science", les nouvelles technologies, mais c'est plutôt en orienter humainement l'usage et en exploiter rationnellement les résultats.

Ainsi la médecine clinique ne s'irrite-t-elle pas, loin s'en faut, de l'émergence d'une médecine, notamment génomique, dite personnalisée,12 mais elle reste, plus que toute autre et grâce à la synthèse qu'elle permet, la médecine de la personne, d'une personne.

*Ancien médecin-chef de service des hôpitaux de Paris, professeur émérite de l'Université Paris-Diderot, et ancien membre du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé.

Références
1 O. Keel. L'avènement de la médecine clinique moderne en Europe, 1750-1815. Politiques, institutions et savoirs. Les Presses de l'université de Montréal, Georg Éditeur, 2001.
2 Alexandre L. La mort de la mort. JC Lattès, Paris : 2011.
3 Vallancien G. La média-médecine. In : La mort de la clinique ? Sous la direction de Couturier D, David G, Lecourt D, Sraer JD, Sureau C. PUF, Paris : p.76, 2009.
4 Vallancien G. La médecine sans médecin ? Le numérique au service du malade. Gallimard, Paris : 2015.
5 Sicard D. La médecine sans le corps : une nouvelle réflexion éthique. Plon, Paris : 2002.
6 Révah-Lévy A, Verneuil L. Docteur, écoutez ! Albin Michel, Paris : 2016.
7 Verghese A, Charlton B, Kassirer JP, Ramsey M. Ioannidis JP. Inadequacies of physical examination as a cause of medical errors and adverse events : a collection of vignettes Am J Med 2015 ; 128 : 1322-4.
8Bernard C. Introduction à l'étude de la médecine expérimentale. JP Baillère et fils, Paris : 1865.
9Simpkin AL, Schwartzstein RM. Tolerating uncertainty — The next medical revolution ? N Engl J Med 2016 ; 375 : 1713-5.
10 La durée des séances des médecins généralistes : Enquête de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) auprès des médecins généralistes libéraux, N°481 ; Ministère de la santé et des solidarités et Ministère de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Avril 2006.
11 Marvel MK, Epstein RM, Flowers K, Beckman HB. Soliciting the patient's agenda : have we improved ? JAMA 1999 ; 281 : 283-7.
12 Cuchet X. La médecine personnalisée : un essai philosophique. Les Belles Lettres, Paris : 2016.

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Vos réactions (18)

  • Se souvenir d'être humain...

    Le 19 novembre 2016

    Le toucher et l'écoute permettent d'accéder rapidement au sixième sens.
    La poignée de main et la palpation abdominale nous connectent humainement au "quantique". Puisse la nouvelle médecine génomique ne jamais oublier ces bases.

    Dr Jean-Michel Rotty

  • Juste deux phrases

    Le 19 novembre 2016

    Bravo et merci.
    Les énarques du Ministère de la Santé ne prendront pas le temps de vous lire, mais tant pis - pour eux.

    Dr Jean-François Michel

  • Examen clinique indispensable

    Le 19 novembre 2016

    Absolument d'accord avec toutes vos remarques concernant l'examen clinique, le lien avec les patients, le choix des techniques complémentaires même les plus récentes comme la génétique, l'imagerie fonctionnelle si nécessaire mais choisies en fonction des données (ou de l'absence de données) de la clinique.

    Dr Martine El-Etr (Psychologue, Ancien Chef de Clinique des hôpitaux de Paris, Diabéto-Endocrinologue, INSERM U 1195)

  • Examen clinique for ever

    Le 19 novembre 2016

    C'est la base et la racine meme de la medecine et de la chirurgie
    Celui qui n'examine pas cliniquement s'est trompé de chemin et devra changer de métier.

    Dr François Razafimbahoaka

  • Je plussoie...

    Le 19 novembre 2016

    et plutôt deux fois qu'une: depuis Hippocrate, l'examen clinique (et, bien sûr, l'interrogatoire, qui en fait partie intégrante) est Le fondamental incontournable d'une bonne pratique de la médecine: il permet déjà d'établir à lui tout seul pas mal de diagnostics, les examens complémentaires sont certes souvent (mais pas toujours) indispensables pour confirmer et préciser ledit diagnostic mais s'ils n'ont pas été précédés par l'étape clinique, qui doit les choisir et les guider, ils peuvent être plus nuisibles qu'utiles. Pour prendre un exemple dans ma spécialité, j'ai été amené à plusieurs reprises à rectifier un diagnostic déjà étayé par des examens complémentaires non adéquats:
    un patient adressé à ma consultation pour "problème de genou": il boîte, il se plaint en effet de douleurs au niveau du genou, il a déjà eu des radios standart voire une irm, parfois même une arthroscopie, et on a en effet retrouvé quelques lésions cartilagineuses ou méniscales (c'est assez courant passé l'âge de 40 ans). Ceci dit, je trouve qu'il boite vraiment beaucoup par rapport aux anomalies minimes observées sur les examens complémentaires, et surtout qu'il a une façon de boiter qui ne correspond pas vraiment à ce que j'ai l'habitude de voir avec un genou abimé (on a tendance à garder ledit genou en extension, alors que là le patient marche penché en avant, autrement dit avec une hanche en flessum). L'examen clinique retrouve un genou souple, sec, peu ou pas douloureux à la mobilisation ou à la palpation, mais un pied plus ou moins en rotation externe et la mise en rotation interne provoque une vive douleur au niveau du genou, certes, mais aussi à la face antérieure de la cuisse et même au niveau du pli inguinal: vous avez deviné la suite, la radio du bassin de face (qui n'avait pas été prescrite, dans la mesure ou le patient se plaignait du genou) va montrer une coxarthrose souvent évoluée, ou une ostéonécrose.

    Reste plus qu'à convaincre le patient qu'une opération au niveau de la hanche va supprimer ses douleurs du genou et sa boiterie (pas toujours évident...).

    Et on pourrait trouver autant d'exemples qu'on voudra dans toutes les spécialités, à commencer par la spécialité appelée (à tort) médecine générale...

    Deux souvenirs de mes années d'études (début des années 80, comme le temps passe...):
    - un hématologiste: "gardez votre sens critique devant les résultats des examens biologiques: si vous avez devant vous un patient en pleine forme avec une NFS catastrophique, l'hypothèse la plus probable est celle d'une erreur du laboratoire";
    - un chirurgien vasculaire: "on n'opère pas un doppler, on opère éventuellement un patient: quelqu'un qui a un doppler artériel désastreux, mais un périmètre de marche proche du kilomètre n'a sans doute pas besoin de chirurgie, du moins pour le moment".
    Toujours et plus que jamais d'actualité, me semble t-il...

    Dr Jean-Marc Ferrarini

  • L'incontournable interrogatoire

    Le 19 novembre 2016

    Très souvent c'est lui qui met sur la piste du diagnostic et permet une meilleure entrée en matière.
    C'est quelque fois en me quittant que se ravisant le patient décide de lâcher le vrai motif de sa consultation.
    En chirurgie viscérale cela m'a toujours semblé incontournable, même après une présentation sans tache de l'interne de garde.

    Dr Elie Cadji

  • Valeur du contact physique entre médecin et malade

    Le 19 novembre 2016

    Un cardiologue anglais expérimenté, probablement grand consommateur d'ECG, d'échographies et d'épreuves d'effort, comme tous les cardiologues, m'a dit un jour : "Je continue à prendre le pouls de mes malades. Ça me permet, au moins, de leur tenir la main".

    Je n'ai pas oublié cette leçon lapidaire, et je l'applique. Le malade est moins accompagné, moins soulagé, si le médecin a omis de toucher son corps.

    C'est éloigné de l'efficience? Non.
    De la modernité et de la télémédecine? Sans doute et alors? Avouons même que palper un malade est une étrangeté : quand un malade consulte un néphrologue pour une fonction rénale détériorée, il est interloqué de constater qu'on commence par lui appuyer sur les tibias (sans lien compréhensible avec les néphrons) pour évaluer sa surcharge interstitielle. Mais il est infiniment plus mis en confiance que si on avait commencé en compulsant la pile d'ionogrammes qu'il a apportés. Dans le premier cas, il se sent pris en charge en tant que personne, comme l'écrit Claude Matuchantsky. Dans le second cas, il éprouve la désagréable impression d'avoir été réduit à des chiffres. Et parfois il s'en plaint. Ça m'est arrivé...

    Dr Etienne Robin, néphrologue

  • Savoir regarder

    Le 19 novembre 2016

    Bravo, j'applaudis des deux mains.
    Savoir dès les premières minutes, accueillir, serrer la main, regarder sans détours et dans les yeux, s'enquérir de ce qui l'amène vers vous en consultation ou dans un lit d'hospitalisation.
    Déjà le replacer dans le contexte social en fonction de son âge, a t-il une activité professionnelle, si oui laquelle, est il au chômage, en retraite, a t-elle des enfants etc.
    Tout ce qui peut nous créer un lien dès les premières minutes.

    Combien de patients arrivent fièrement avec une échographie qui montre une hernie (et c'est pour cela qu'il viennent chez le chirurgien) et s'étonnent que l'on ne regarde pas cet examen (inutile dans cette indication) et que l'on se concentre sur les circonstances qui les ont amenés à la faire et sur un examen clinique approprié avent de passer à une démarche thérapeutique.

    Interroger, regarder, palper c'est la base de notre métier avant de se lancer dans des examens dont beaucoup pourraient être évités après une bonne investigation clinique...

    Dr A Delzenne

  • Encore de la clinique, toujours de la clinique !

    Le 20 novembre 2016

    Le premier contact passe par ces quelques questions qui, en effet, créent un lien, détendent l'ambiance de la consultation, ne serait ce qu'en faisant le compte des enfants, petits enfants et parfois même d'arrière-petits-enfants !

    Cette approche clinique est la base de notre raisonnement et la qualité d'analyse de la vie d'un patient ! Les prescriptions para cliniques ne viennent qu'à l'appoint de l'analyse clinique, c'est à dire pour conforter ou exclure des hypothèses générées plus ou moins rapidement par le médecin.

    De fait, on ne prescrit pas "pour voir", contrairement au poker comme l'avait rappelé un autre collègue, chirurgien orthopédique celui-ci !

    L'empathie d'un médecin passe aussi par d'autres formations que la biophysique, la chimie organique ou la biologie cellulaire, toutes disciplines très honorables et sans doute utiles aux happy fews. Récemment il a été montré que la formation aux "données humanistes" améliore des scores d'empathie par de jeunes médecins en formation. Eh oui, des scores d'empathie... cela doit faire revoir nos "critères de sélection" des jeunes étudiants du PACES.

    De la clinique, comme poser sa main sur l'avant bras d'un malade est un signal placebo au même titre qu'examiner un patient. Certaines spécialités ont cette spécificité, comme la rhumatologie, où l'absence d'examen physique fausse le diagnostic !

    Dr Frédéric Lioté

  • "Cela va beaucoup mieux"

    Le 20 novembre 2016

    Certains malades me disent: quand vous m'avez examiné, cela va beaucoup mieux. Mais bien sûr, j'en tire, sans en avoir l'air, beaucoup de renseignements. Et le plus souvent le diagnostic.

    Dr Bernard Hoche

  • Le coup de tonnerre dans un ciel serein

    Le 21 novembre 2016

    Ha, la clinique tellement utile.. Et ne serait ce que pour la beauté, l'élégance littéraire des descriptions séméiologiques. La retraite m'appelle il me restera pour les avoir rencontrés le coup de tonnerre dans un ciel serein, le grand drame abdominal de Dieulafoy, la danse des artères, l'hypertrophie des os des extrémités et des extrémités des os, les aphorismes de Mondor, etc etc..
    Ça fait vieux con non?

    Un radiologue.

  • Distanciation du soignant

    Le 21 novembre 2016

    Il fût un temps où nos anciens observaient de près, miraient les urines et les goûtaient pour trouver le diabète...
    Peste soit cette peste qui a mis ces distances avec les procédures de protection et d'isolement, ce risque obsédant d'infection nosocomiale par la main qui touche et par les postillons...
    L'observation à distance a pris le pas : radiographie, imagerie virtuelle, consultation sur écran via internet et explosion de la télé-médecine.
    Alors attention à ces virus "mentaux" qui nous incitent à nous éloigner de plus en plus loin du lit du malade et de sa ruralité, pour pratiquer une médecine virtuelle toujours plus "noble" des RCP et des publications...
    Internationales...

    Dr Jean-Michel Rotty

  • La clinique pour nous aussi

    Le 23 novembre 2016

    Je ne suis pas médecin, "juste" une infirmière et je viens de lire ce bel article et ses réactions sur la clinique. Elle est pour moi l'essence même de nos professions et exprime le respect que l'on doit à autrui. En effet, une personne qui vient consulter son médecin, remet son état de santé ou de non santé "entre les mains" d'un expert avec tout ce que celà comporte de doute, d'anxiété, mais aussi de confiance.

    "Entre les mains" l'expression prend tout son sens, toucher, odorat, ouïe, vision, goût, nous avons à la base tout ce qu'il nous faut pour observer l'Autre. La clinique relève du prendre soin de l'autre avant toute technique qui, si pointue et performante soit elle, ne doit rester qu'un outil. Ne fait-on pas un diagnostic clinique d'état de mort encéphalique avant de recourir aux 2 EEG, ou à l'Angioscanner qui viendront confirmer ou pas l'observation du médecin, et tant d'autres situations similaires...

    Nous aussi infirmières faisons de la clinique au décours des multiples tâches que nous accomplissons, nos sens sont en éveil : écouter les plaintes, les mots employés, toucher sans crainte une personne pendant un soin, observer les traits d'un visage en souffrance, la position d'un corps dans un lit...
    Tous ces éléments observés font partie intégrante de notre rôle auprès des patients, ils doivent aider à la complétude et l'amélioration de sa prise en charge. Les techniques viendront pour leurs parts rationnaliser et affiner ces observations.

    Annie Rouquette

  • Merci de tout coeur !

    Le 24 novembre 2016

    Votre éditorial fait chaud au coeur Monsieur, et il fait résonner tellement de faux pas rencontrés chez nos confrères, tellement d'éloignement par rapport à notre vocation première.
    Il y a de cela quelques années, j'ai accompagné mon mari en consultation de pneumologie chez un "grand" pneumologue/tabacologue, que l'on voit beaucoup (trop ?!) sur les plateaux TV... Objet de cette consultation : faire un "état des lieux" chez un grand fumeur désireux de s'arrêter. Le choix de ce pneumologue n'était pas le mien, mais celui d'un confrère cardio du même hôpital qui l'avait directement orienté vers lui. Ce "grand" pneumologue a réussi "le tour de force" suivant : faire une "consultation" de 20 minutes sans poser un stétho, sans écouter ce que nous lui disions au sujet d'un essoufflement évident, d'une fatigue grandissante... Sans un seul geste clinique ! Pas un seul! Et mon mari est reparti avec sa prescription de patchs et autres gommes à mâcher qu'il n'a bien sûr jamais consommés. Il s'est arrêté tout seul mais... aujourd'hui il se bat contre une BPCO stade IIII... Et je ne peux m'empêcher de penser qu'il pourrait être au stade II, si seulement ce foutu "médecin" avait fait son job...

    Dr Sophie T

  • Plus chaleureux que du gel d'echo

    Le 26 novembre 2016

    On ne mesure plus la hauteur utérine. Elle ne figure même plus dans les derniers traités d'obstétrique au chapitre du suivi de grossesse...
    Pourtant, une observation récente de mort fœtale (MFIU) au sein de notre réseau prouvait que si on avait porté attention à la stagnation de la hauteur utérine les semaines précédentes (et reportées sur la courbe de Belizan a posteriori), on aurait constaté qu'une stagnation de croissance utérine avait précédé la MFIU, et peut-être déclenché un bilan placentaire intermédiaire.

    On ne mesure plus les uterus, mais on fait un "balayage écho" à chaque consultation de gynéco, sans aucun intérêt scientifique démontré, non conforme aux recommandations de non exposition fœtale inutile aux ultra-sons...

    Et pourtant la courbe de Belizan présente des percentiles, des couloirs à suivre. Les sages femmes libérales qui travaillent avec moi l'utilisent, et peuvent expliquer aux patientes qu'entre deux échos, la croissance régulière de la HU, la perception des mouvements fœtaux par la mère, l'écoute des bruits du cœur en consultation sont des très bons signes de bien-être fœtal, à même de rassurer une patiente anxieuse, à condition de l'expliquer.

    Et évidemment, l'attention "manuelle" portée au corps de la femme enceinte est appréciée des patientes, comme un contact "chaleureux" avec son corps et avec son futur enfant. Bien moins froid que du gel d'écho et une sonde électromécanique...

    Dr PY Brettte

  • Une névralgie crurale

    Le 26 novembre 2016

    Il m'est arrivé dernièrement une histoire assez invraisemblable mais tellement typique.
    Je reçois pour avis, un patient adressé par le service d'orthopédie d'une ville universitaire, pour une soi-disant névralgie crurale, avec bien sûr un scanner et une IRM lombaire montrant des images "atypiques".

    Le malade entrant dans mon cabinet, le diagnostic était évident avec une coxopathie sur une nécrose de la tête fémorale.
    Après interrogatoire, il faut se rendre à l'évidence que pendant les 10 jours d'hospitalisation, il n'a jamais été examiné, et personne ne lui avait demandé de se lever.
    J'ai eu la délicatesse de le renvoyer dans le service d'orthopédie avec le bon diagnostic qui avait demandé trois secondes d'examen clinique.
    Ceci montre simplement que l'orientation donnée actuellement aux études médicales ne va vraisemblablement pas dans la bonne direction.

    Dr Alain G

  • Exprimer son amour de l'Autre

    Le 27 novembre 2016

    Bravo pour cette plaidoirie.
    Dermatologue en bout de carrière, j'ai toujours apprécié combien l'examen minutieux du patient avec l'écoute de ses plaintes et antécédents me rapproche du diagnostic à poser mais surtout de la personne que j'examine. Pratiquer la médecine est une manière d'exprimer son amour de l'Autre, son sens de la fraternité humaine.

    Les spécialités de radiologie ou de biologie ne m'ont pas attirées car trop distantes du patient mais je suis sûr que le service à l'Autre en représente un intérêt majeur.

    Dr Christian Marty

  • Joie

    Le 01 décembre 2016

    Quelle joie pour un vieil interniste de lire les commentaires à cet article. Il existe donc encore des vrais médecins (tant pis pour les autres qui seront sans doute vexés).

    Je voudrais insister un peu plus sur l'anamnèse qui me prenait +/- 20 minutes pour un nouveau patient.

    Petit exemple entre mille : vous demandez à un patient s'il a remarqué du sang dans ses selles. Non répond-il. Quelques minutes plus tard :; est-ce que vous avez des hémorroïdes? Oui. Comment vous les avez remarqué ? Parce qu'il y a du sang sur le papier en m'essuyant...

    Dr Guy Roche, ancien interniste

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