ENDOSCOPIE : FAUT-IL SURVEILLER LES ULCERES ?

Bien que les ulcères gastriques ne soient que rarement des lésions cancéreuses, il est bien établi que les cancers gastriques peuvent s'ulcérer. De ce constat a découlé la stratégie diagnostique actuelle, justifiée par l'espoir de déceler des cancers gastriques à un stade précoce, c'est-à-dire à un moment où le pronostic de la maladie est encore relativement favorable.

Tous les ulcères gastriques sont donc actuellement suivis par des endoscopies répétées jusqu'à la guérison complète. Au cours de ces séances d'endoscopie, des biopsies multiples sont systématiquement effectuées au niveau de la base et de la périphérie des lésions ulcéreuses.

Le dogme en question ?

Cette stratégie est maintenant remise en question. En effet, on sait que des ulcérations gastriques d'origine maligne peuvent cicatriser spontanément ou sous traitement.

En outre, l'attitude actuelle, qui a pris naissance à l'époque pré-endoscopique (lorsqu'on ne pouvait proposer que des transits œso-gastro-duodénaux), n'a jamais fait l'objet d'une véritable évaluation du rapport coût/bénéfice. Dans un contexte de crise économique qui oblige à repenser l'utilité réelle des examens à visée diagnostique, la surveillance endoscopique répétée des ulcères gastriques devient controversée.

148 ulcères suivis pendant 5 ans, aucun cancer

Ainsi, une récente étude rétrospective montre clairement que sur 148 ulcères gastriques suivis pendant 5 ans, aucun cas de carcinome gastrique n'a été retrouvé au cours des endoscopies répétées lorsque l'ulcère n'était pas suspect de malignité à l'examen initial. En revanche, sur 67 cas de cancers diagnostiqués, 66 étaient déjà suspectés lors du premier examen, sur la combinaison des données macroscopiques et des résultats histologiques. Le seul cas (1/67) non décelé à l'examen primordial provoquait une telle obstruction de la lumière gastrique que l'endoscopie n'avait pas pu être effectué dans de bonnes conditions techniques.

Ces résultats, ainsi que ceux d'autres études, suggèrent donc que le suivi systématique par endoscopies répétées ne permet que rarement de détecter des cancers gastriques à un stade précoce.

En raison du coût occasionné par les endoscopies itératives effectuées chez les malades atteints d'ulcère gastrique et du faible bénéfice obtenu, R.E. Pruit et coll. proposent donc de se limiter à une seule endoscopie initiale avec biopsies multiples. Ce changement de stratégie permettrait de réaliser aux Etats-Unis une économie de 60 millions de dollars.

Une autre solution à prendre en considération est peut-être celle préconisée par les Japonais : la pratique d'endoscopies systématiques en médecine du travail. En effet, l'incidence des cancers gastriques détectés à un stade précoce représente au Japon 60% de l'ensemble des cancers gastriques diagnostiqués - contre 16% seulement aux Etats-Unis !...

Christophe Gaudin

Référence
Pruit R.E. et coll. : "Endoscopy, gastric ulcer, and gastric cancer. Follow-up endoscopy for all gastric ulcers ?" Dig. Dis. Sci., 1993 ; 38 : 284-288.

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