
Un étranger qui me ressemblait comme un frère
Pour lutter contre le risque de suicide des praticiens, des dispositifs ont été mis en place, tels des lignes d’écoute spécifiques ou des groupes au sein des organisations syndicales dédiés à cette problématique. Cependant, l’auteur du blog « Cris et chuchotements », une gastroentérologue installée en ville, estime que pour éloigner le spectre du burn out, les praticiens doivent également se souvenir qu’ils ne sont pas que des médecins. Cette constatation lui a été inspirée d’une confidence désespérée d’un de ses amis, qui, âgé de 67 ans et venant de prendre sa retraite n’a pu que constater : « Je ne suis plus rien ». A partir de cette phrase douloureuse, l’auteur du blog dresse le portrait de praticiens ayant consacré leur vie entière à leur métier et n’ayant jamais trouvé le temps de s’intéresser à d’autres univers. « Nous nous heurtons aux limites de nous-mêmes. Médecins nous sommes, et pour la plupart d’entre nous, c’est une identité. Nous pourrons nous définir avec emphase « habités par la passion du métier »… plus objectivement, c’est juste que nous ne savons pas faire grand chose d'autre. Hors se marier et avoir quelques enfants, nous n’avons pas eu l’opportunité d’aller vers d’autres pôles d’intérêt pendant notre jeunesse, bouffée par l’investissement de temps, par le sacrifice de nos loisirs, par la ténacité de travail. Après coup, il est tard pour trouver d’autres sujets d’intérêt, et puis nous n’avons toujours pas trouvé le temps. De ce fait, être médecin est alors notre vraie et parfois seule valorisation. Nous ne savons pas, ou n’avons plus l’énergie de sortir du rôle pour explorer d’autres champs. Ainsi, l’habit médical ne nous quitte jamais » analyse-t-elle. Cette situation tend à transformer la vie des médecins, en dehors de leur profession en « un marécage. Les rivages des intérêts personnels sont secs, et hors la médecine, trop peu de médecins participent activement à une activité extra-médicale » écrit-elle encore. Cette « pauvreté de notre vie extramédicale » qui à ses yeux est le « plus gros défaut » des médecins aboutit à les transformer en étrangers de leur propre vie.Comment s’échapper ?
L’auteur du blog va même plus loin. Alors que venant des pouvoirs publics et des caisses primaires d’assurance maladie, les dévalorisations et les vexations peuvent apparaître nombreuses, en délaissant tout un pan de leur vie, les praticiens deviennent peu à peu leurs « propres persécuteurs » conclue-t-elle.Reste à savoir si un blog consacré en très grande majorité à l’exercice de la médecine est une véritable échappatoire.
Pour lire l’ensemble de ce post, vous pouvez aller à cette adresse : http://www.cris-et-chuchotements.net/article-b-67-ans-medecin-retraite-je-ne-suis-plus-rien-123461399.html
Aurélie Haroche