Les folliculites à bacilles gram négatif (BGN) sont rares. C'est une complication exceptionnelle des acnés longtemps traitées par cyclines. Elles concernent alors essentiellement le visage. On les observe sur le corps après séjour prolongé dans des bains chaud à usage collectif (hot tub dermatitis) ou port de vêtements occlusifs.
Une épidémie de folliculites à BGN a été déclenchée à Seattle par un tournoi universitaire de "mud-wrestling".
Sportifs amateurs... de boue !
Jadis confinés aux salles de catch ou aux théatres pornos, les combats dans la boue semblent gagner la faveur des amateurs universitaires. Cet art martial original est encore mal codifié. Plus ou moins complètement dévêtus, 2 à 8 compétiteurs des 2 sexes entrent simultanément en lice dans un coffrage rempli de terre végétale et d'eau pendant quelques minutes. L'ensemble se déroule dans une cave (pour l'ambiance ?). Un jet d'eau est disponible pour rincer les participants en fin de séance. Dans les 36 heures suivant une rencontre de ce type, organisée à Seattle, 7 étudiants ont consulté pour l'apparition de plusieurs centaines de folliculites disséminées sur le corps. Une enquête épidémiologique en règle a été immédiatement déclenchée.
Folliculites à entérobactéries
La conclusion est sans appel : c'est bien le mud-wrestling qui est coupable. En effet, parmi les 46 étudiants des mêmes internats qui n'ont pas assisté à la rencontre, ou n'y sont venus qu'en spectateurs, deux seulement avaient des folliculites à BGN. Il s'agissait de 2 garçons souffrant d'eczéma chronique. Le simple barbottage dans la boue, dont 3 participants s'étaient contentés, n'a provoqué de folliculites que chez l'un d'entre-eux. Au contraire, sur les 26 combattants (13 de chaque sexe), 12 femmes et 9 hommes ont été atteints. Ils présentaient 2 fois plus d'érosions cutanées et de coupures que les autres, ce qui souligne le rôle favorisant des agressions mécaniques de la peau dans la survenue de ces folliculites. Par contre, l'habitude de se raser les jambes, la longueur du combat ou le délai entre celui-ci et la douche sont apparus sans influence sur le risque.
Les germes retrouvés dans les pustules, Enterobacter cloacæ et Citobacter freundii, sont des contaminants occasionnels de l'humus. Les analyses pratiquées en Allemagne dans des établissements de bain montrent par exemple la présence d'E.cloacæ dans 27 % des échantillons de boue fraîche et dans 94 % des prélèvements effectués après les ébats des curistes. La terre de Californie utilisée ici contenait elle aussi des entérobactéries avant l'utilisation. Il n'a pas été possible d'étudier la boue ayant servi à la lutte. Il n'est pas exclu que certains participants l'aient enrichie de leur propre flore périnéale ou cutanée, la plupart étant des habitués des piscines chauffées et des bains à remous.
Adler A.I. : "An outbreak of Mud-wrestling induced pustular dermatitis in collegue students", JAMA, 1993 ; 269 : 502-504.
François Blanc