Quelques études ont montré que le risque de survenue d'un cancer du côlon semblait être associé à un transit ralenti et à un poids de selles faible. Néanmoins, peu d'équipes se sont attachées à étudier avec précision le poids des selles et le temps de transit colique au sein des différentes communautés.
Le but de l'enquête de J.H. Cummings et coll. était donc de déterminer le poids des selles et le temps de transit colique chez des individus sains habitant le Royaume-Uni, de comparer ces données à celles d'autres études mesurant les mêmes valeurs dans d'autres communautés et d'établir l'existence d'une éventuelle corrélation avec le risque de survenue du cancer du côlon dans la population générale.
Ainsi, au sein de cette population britannique (220 patients), le poids de selles moyen était de 105 g/j et le temps de transit colique moyen de 60 heures. Chez les femmes, il faut noter que le poids des selles était significativement plus faible (17% des femmes étudiées ayant moins de 50 g/j de selles) et que le temps de transit colique était également significativement plus long que chez les hommes (72 heures versus 55 heures, respectivement). Une proportion non négligeable de cette population avait, de plus, un poids de selles quotidien supérieur à 200 g/j, limite habituellement retenue dans les traités de gastroentérologie pour poser le diagnostic de diarrhée, et dont le caractère arbitraire devrait ainsi, selon les auteurs, être remis en question.
Une corrélation inverse
Dans la littérature, le poids de selles quotidien moyen varie énormément de 72 g/j (Ecosse) à 470 g/j (Ouganda). En reprenant l'ensemble des données de la littérature et en effectuant sur celles-ci une méta-analyse, J.H. Cummings et son équipe confirment l'existence d'une corrélation inverse entre le poids de selles quotidien et le risque de survenue d'un cancer du côlon.
Et le seul facteur alimentaire lié de façon évidente au poids des selles est la consommation de fibres alimentaires (un régime alimentaire standard au Royaume-Uni en apporte 12,5 g/j de fibre, alors que dans certains pays du tiers- monde, ce chiffre est 3 à 4 fois plus important).
Aucune explication claire à cette corrélation
Pour les auteurs de l'article, le faible débit de selles n'est pas directement responsable de l'apparition d'un cancer du côlon, mais serait le reflet d'anomalies métaboliques survenant dans le côlon qui prédisposeraient alors à l'apparition d'un cancer.
Les fibres alimentaires augmentent le poids des selles par une rétraction d'eau dans la lumière mais aussi en augmentant la masse bactérienne fécale. Néanmoins, aucune explication claire n'est disponible, à ce jour, pour expliquer la diminution du risque de survenue du cancer colique associée à une consommation élevée de fibre.
Fibres : un apport nécessaire de 20 grammes par jour
Quoi qu'il en soit, d'après J.H. Cummings et son équipe, en doublant la consommation journalière de fibres, afin d'obtenir un apport de 20 g/j en moyenne, l'incidence des cancers du côlon diminuerait de moitié dans les pays occidentaux.
Compte tenu du problème de santé publique que représente cette pathologie, ces modifications diététiques simples viennent d'être récemment recommandées par l'Organisation Mondiale de la Santé.
Benoît Coffin