Fractures à répétition? Pensez aussi à l'hypophosphatasie

L'hypophosphatasie est une maladie héréditaire rare caractérisée par un déficit de la minéralisation osseuse et dentaire et un déficit de l'activité de la phosphatase alcaline du sérum. Sa prévalence est de l'ordre de 1/100 000 pour les formes les plus sévères. Ses principales manifestations sont squelettiques, mais il peut également y avoir des manifestations neurologiques (convulsions) chez l'enfant par déficit en pyridoxine dans le cerveau (formé par déphosphorylation du pyridoxal-5-phosphate par les phosphatases alcalines).

L' hypophosphatasie est traditionnellement classée en fonction de l'âge de sa présentation, avec des formes sévères (chez les homozygotes) diagnostiquées in utero ou à la naissance par la présence de fractures avec raccourcissent des membres et difficultés respiratoires, ou au cours des premiers mois de vie, par un retard de croissance avec difficultés respiratoires. Sur le plan biochimique, on constate une hypercalcémie avec hyperkaliurie menant à une diurèse et à une néphrocalcinose. Enfin, une crâniosynostose que l'on peut observer autant chez les enfants traités que non traités peut mener à une hypertension intracrânienne, nécessitant une craniectomie. Des formes bénignes marquées par des anomalies in utero qui se normalisent ensuite ont également été décrites.

Les formes hétérozygotes se manifestent beaucoup plus tardivement, notamment par la perte précoce de la dentition primaire avec des racines intactes, des douleurs osseuses, des lésions de type rachitique, une masse osseuse réduite et des fractures récurrentes qui guérissent difficilement. Ce sont ces cas qui mènent parfois à un diagnostic erroné d'ostéomyélite récurrente focale chez l'enfant ou d'ostéoporose ou de spondylarthrite ankylosante chez l'adulte.

Toutes ces lésions sont liées à la perte de l'action des phosphatases alcalines sur les facteurs inhibiteurs de la minéralisation: pyrophosphates (au départ de l'ATP et l'ADP),  pyridoxal-5-phosphate et phosphoéthanolamine.

Sur le plan thérapeutique, c'est vers l'hormonothérapie substitutive que l'on se dirige, avec notamment une phosphatase alcaline recombinante humaine liée à un fragment du Fc et de la deca-aspartate (asfotase alfa) qui, chez la souris, a permis une amélioration significative du phénotype neurologique et squelettique. Ce produit qui peut être administré de manière intermittente par voie SC a donné des résultats préliminaires encourageants chez l'homme. L'autre aspect thérapeutique est qu'il faut éviter à tout prix les bisphosphonates et tous les autres traitements stimulant l'ostéoformation. Ce qui signifie qu'une hypophosphatasie doit être suspectée chez toute personne âgée présentant des taux abaissés en phosphatase alcaline associés à un aspect ostéoporotique ou des fractures à répétition.

Dr Dominique-Jean Bouilliez

Référence
Bishop N. : Hypophastasia. Educational Symposia 2. European Calcified Tissue Society meeting. (Prague) : 17-20 mai 2014.

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