
L’étonnante tolérance des Talibans
En septembre dernier, alors qu’elle se trouvait au Qatar, la
jeune femme a appris un heureux évènement : elle était enfin tombée
enceinte à 35 ans, alors même que les médecins l’avaient considéré
comme stérile. Une bonne nouvelle rapidement suivi d’une inquiétude
: les relations sexuelles hors mariage sont interdites au Qatar et
Charlotte Bellis n’est pas marié. Un gynécologue qu’elle consulte à
Doha lui conseille alors de quitter l’émirat rapidement pour éviter
d’être emprisonné.
La journaliste songe alors naturellement à rentrer en
Nouvelle-Zélande pour accoucher. Mais l’archipel a totalement fermé
ses frontières aux étrangers depuis mars 2020, dans le cadre de la
stratégie zéro-Covid. Seuls les Néo
Zélandais expatriés peuvent rentrer dans l’archipel, à
condition de respecter un isolement strict de 10 jours à leur
arrivée. Mais les places disponibles en quarantaine étant fortement
limités, ils doivent participer à un tirage au sort pour pouvoir
rentrez chez eux ! La journaliste demande alors aux autorités de
Wellington de pouvoir bénéficier d’une exemption au vu de sa
situation mais voit sa requête rejetée, le fait d’être enceinte
dans un pays islamique et de risquer la prison n’étant visiblement
pas suffisamment urgent pour les très prudentes autorités
néo-zélandaises.
En désespoir de cause, la journaliste se tourne alors vers le
seul pays pour lequel elle dispose d’un visa permanent :
l’Afghanistan, où réside son compagnon, un journaliste belge
travaillant pour le New York Times. A sa grande surprise, les
Talibans se montrent beaucoup plus tolérants envers sa situation
que le gouvernement néo-zélandais. « Nous sommes heureux pour
vous, vous pouvez venir sans problème » lui répond un chef
taliban. Interrogé par Charlotte Bellis sur sa situation de femme
célibataire, le responsable afghan se montre étonnamment peu
regardant sur la morale islamique : « vous êtes étrangers, vous
faites ce que vous voulez ».
La future mère restera en Afghanistan jusqu’en mars
Charlotte Bellis se réfugie donc en Afghanistan en janvier
dernier avec la bénédiction du gouvernement islamique. Mais bien
consciente que l’émirat n’est pas le meilleur pays au monde pour
donner naissance à un enfant, elle réitère sa demande pour être
autorisé à rentrer en Nouvelle-Zélande. Mais là encore, sa
sollicitation est rejetée, le gouvernement kiwi jugeant encore une
fois sa situation insuffisamment grave pour justifier un
rapatriement.
La journaliste décide alors de rendre sa situation publique et
publie une lettre ouverte au gouvernement néo-zélandais, provoquant
une importante polémique aux antipodes. Pour éviter que le scandale
ne prenne de l’ampleur, les autorités néo-zélandaises ont
finalement autorisé Charlotte Bellis à retourner dans l’archipel,
indiquant qu’elle était en danger en Afghanistan. Une décision que
la journaliste a qualifié d’hypocrite, répondant qu’elle se sentait
en sécurité à Kaboul et qu’elle y resterait jusqu’en mars, deux
mois avant la date de naissance prévue de son enfant.
L’histoire de Charlotte Bellis a mis en lumière la situation
difficile dans laquelle se trouve les Néo-Zélandais expatriés,
coupés de leur pays depuis maintenant deux ans. Wellington vient
d’ailleurs d’annoncer un plan de réouverture de ses frontières très
progressif. A partir du 28 février, les Néo-Zélandais vivant en
Australie seront autorisés à entrer dans le pays, suivis de
l’ensemble des expatriés le 14 mars et enfin des étrangers en
juillet prochain.
Grégoire Griffard