Hydroxychloroquine et lupus cutané, une autre polémique

Comme l’a souligné F Chasset, l’hydroxychloroquine reste la pierre angulaire du traitement du lupus cutané.

Mais bien avant celle que nous avons connue autour de son utilisation dans la Covid-19, cette molécule faisait déjà l’objet d’une polémique qui a émergé lors de la mise en conformité (en avril 2019) avec la réglementation européenne des caractéristiques du produit. Celle-ci avait imposé d’appliquer sur les boîtes de médicament le pictogramme « danger » en cas de prescription au cours de la grossesse du fait d’une action potentiellement génotoxique. En même temps était formulée la nécessité d’une contraception pendant le traitement et jusqu’à 8 mois après du fait de la longue demi-vie du produit (40 jours).

Les sociétés françaises de dermatologie, de rhumatologie et de médecine interne se sont élevées contre ces positions dictées, selon elles, par des données anciennes tant en ce qui concerne la toxicité au cours de la grossesse que de la demi-vie du médicament qui serait de 5 à 7 jours et non de 40. Il faut en effet rappeler que l’HCQ au cours de la grossesse permet de réduire le risque de poussées de lupus chez la mère et de bloc auriculo ventriculaire (BAV) congénital chez l’enfant.

Seule une étude de pharmacovigilance américaine publiée cette année a montré la possibilité de l’implication de l’HCQ administrée au cours de la grossesse dans l’apparition de fentes palatines et de malformations urinaires chez l’enfant pour des doses de plus de 400 mg par jour. Ainsi peut-il être prudent de limiter les prescriptions de ce produit chez la femme enceinte en dehors du lupus, et peut-être de diminuer les posologies dans ce contexte.

F Chasset a rappelé les autres précautions à prendre (qui feront l’objet de recommandations prochaines de la part des sociétés savantes citées plus haut) : elles concernent le risque de troubles du rythme cardiaque, de troubles de la conduction, et de cardiomyopathies, significativement accru sous HCQ, ces derniers étant des complications tardives. Ceci impose de vérifier l’absence d’association médicamenteuse (citalopram, hydroxyzine, dompéridone…) susceptible de potentialiser le risque d’arythmie ou des antécédents de QTc long.

Dans le cas contraire il faut réaliser un ECG avant la mise en route du traitement.

Quand au bilan ophtalmologique, il doit être fait au cours de la première année de traitement (fond d’œil et champ visuel) et répété tous les ans à partir de la 5e année de traitement.

L’hydroxychloroquine continue à rendre des services inestimables dans la prise en charge du lupus cutané. Cependant plusieurs traitements en cours d’expérimentations dans le lupus systémique vont être ou sont déjà évalués dans le lupus cutané, tels que le bélimumab (anticorps monoclonal ciblant une cytokine nommée BAFF, ayant un rôle essentiel pour la survie des lymphocytes B), deux molécules ciblant la voie de l’interféron de type 1 dont l’anifrolumab, un anticorps monoclonal anti interleukine 17A (secukinimab) et un anticorps monoclonal anti interleukine 23 (guselkumab).

Enfin, la thalidomide a une recommandation temporaire d’utilisation dans le lupus cutané. Un analogue l’iberdomide fait actuellement l’objet d’un essai de phase 2.

Dr Marie-Line Barbet

Référence
Chasset F : Hydroxychloroquine et autres antipaludéens de synthèse en dermatologie : nouveautés 2020.JDP 2020

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